HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

TOME HUITIÈME

LIVRE NEUVIÈME

 

CHAPITRE XII. — ESSAIS DE GUERRE CIVILE

 

 

Aspect nouveau de la Convention après le 2 juin. — Impression dominante à Paris. — Modération des Jacobins. — Discussion des affaires publiques substituée aux querelles de parti. — Irritation profonde des Girondins ; plusieurs vont souffler en province la guerre civile. — Leur plan. — État des frontières ; suprêmes périls. — Soulèvement de l'Eure ; mot d'ordre donné par les meneurs. — Les Girondins à Caen ; ils y allument le foyer central de l'insurrection des provinces. — Ce qu'était Félix Wimpfen. — Défiances de Louvet. — Calomnieux manifeste de l'Assemblée centrale de résistance à l'oppression. — Arrestation de Prieur et de Romme ; Romme devant Wimpfen. — Embrasement des provinces ; le royalisme au fond des résistances locales. — Indignation de Paris. — Danton revendique pour lui mensongèrement l'honneur du 31 mai. — Rapport équivoque de Barère. — Décret de la Convention sur les journées du 31 mai et 2 juin. — Injuste et violente sortie de Robespierre contre Brissot. — Lettre non moins injuste et violente de Vergniaud à Barère et à Robert Lindet. — Wimpfen aux Parisiens. — Républicanisme sincère des Girondins. — Les royalistes jettent le masque. — La coalition se dissout. — Puisaye. — Défaite sans combat. — Évreux se rétracte solennellement. — Wimpfen propose aux Girondins de s'appuyer sur l'Angleterre ; ils s'y refusent avec horreur. — Leur fuite à travers la Bretagne ; périls et aventures ; embarquement pour Bordeaux.

 

La Convention, après le 2 juin, prit un aspect tout nouveau. Aux clameurs furieuses qui, la veille encore, ébranlaient la salle, avait succédé une sorte de stupeur douloureuse. Les Montagnards ne pouvaient dissimuler la tristesse qui empoisonnait leur triomphe[1]. Un morne silence régnait sur les bancs du côté droit, presque entièrement désert, et où le génie de la Gironde, ses passions, son courage, n'étaient plus représentés que par Ducos et Fonfrède, jeunes gens héroïques, restés là pour protéger leurs amis abattus, ou mourir.

A Paris, l'impression dominante était moins mêlée de regret que d'espoir. On se croyait enfin arrivé au terme des luttes personnelles, et tous s'en félicitaient. Ceux même qui, au fond du cœur, désapprouvaient la violence faite à l'Assemblée, s'en consolaient par l'idée que la Révolution n'allait plus avoir à combattre comme ennemis... que ses ennemis. Comment, d'ailleurs, se refuser à ne point voir ce qu'avait eu d'imposant une pareille insurrection, accomplie sans un désordre qu'on pût citer, sans une mort dont on eût à gémir ? Quelle journée dans tout le cours de la Révolution, s'écriait Prudhomme[2], fit plus d'honneur à la ville de Paris ? Or, Prudhomme écrivait cela sous le coup d'une irritation profonde, car un comité révolutionnaire de section l'avait fait arrêter arbitrairement, à la suite du 2 juin ; et le Comité révolutionnaire central n'avait révoqué l'ordre d'arrestation qu'à la prière de Réal, substitut du procureur de la Commune[3].

Au reste, ce Comité révolutionnaire n'eut pas plutôt achevé l'œuvre pour laquelle il avait été institué, qu'il donna sa démission[4]. Des onze citoyens qui le composaient, pas un dont le nom ne fût obscur et la position médiocre ; et cependant nul d'entre eux ne se laissa emporter à l'ivresse d'une élévation subite ; nul ne se montra tenté du désir de faire survivre son pouvoir à la circonstance. A son tour, Henriot résigna son commandement, et avec plus de noblesse qu'on ne devait en attendre d'un homme tel que lui : Le calme est rétabli, dit-il à ceux de la Commune[5]. Mes services ne sont plus nécessaires. Il faut qu'un général de sans-culottes sache être soldat : je rentre dans mon obscurité. Le désintéressement et la modération étaient à l'ordre du jour. Informée que de vagues rumeurs lui attribuaient des projets d'usurpation, et que le Comité de salut public s'en inquiétait, la Commune protesta sur le ton d'une indignation solennelle ; et un jeune député lyonnais, nommé Leclerc, ayant émis devant elle des vœux sanguinaires, elle le frappa d'une réprobation que sanctionnèrent les acclamations de tous les citoyens présents à cette scène. Quiconque proposera de répandre du sang, s'écria Hébert, est un mauvais citoyen. Il demanda qu'on en fit la déclaration formelle, et son réquisitoire fut unanimement adopté[6]. Que dire encore ? On vit Marat se piquer d'une générosité chevaleresque, et, à cause de la haine particulière dont les Girondins l'avaient poursuivi, se suspendre volontairement de ses fonctions jusqu'à leur jugement définitif[7].

Un autre caractère, non moins remarquable, du mouvement moral qui se produisit immédiatement après le 2 juin, fut la préoccupation des affaires publiques, abstraction faite des rivalités personnelles et des animosités de parti.

Devenu tout à coup sobre de paroles, et d'autant plus active, la Convention commença par renouveler tous les comités, à l'exception de celui de salut public[8], dont on reconnaissait les services en le conservant ; elle confia à une commission de douze membres le soin de réviser le Code civil et le Code criminel, et d'en approprier les dispositions aux bases du gouvernement républicain[9] ; elle régla ce qui concernait les pensions militaires ; elle décréta la peine de deux ans de fers contre quiconque dégraderait les monuments des arts[10] ; enfin, elle pressa l'achèvement du grand travail de la Constitution, pour lequel elle adjoignit aux membres du Comité de salut public Hérault de Séchelles, Ramel, Mathieu, Couthon et Saint-Just[11].

De leur côté, dans des séances que la voix des passions s'abstint un moment d'agiter, les Jacobins préparaient les matériaux de la loi avec un ordre, une décence et une discipline dont il n'y avait pas encore eu d'exemple. Chabot faisait ressortir la nécessité de donner place, dans la Constitution qu'on méditait, à la solution de ce problème tragique : le pain à tous. Robespierre jeune appelait l'attention des esprits sur la question de savoir si la liberté de la presse devait être accordée lorsqu'elle compromettait la liberté publique[12]. Peyre insistait sur la prompte formation d'une armée révolutionnaire, c'est-à-dire composée de citoyens munis d'un certificat de civisme[13]. Billaud-Varenne, développant et résumant les opinions du club, relativement aux mesures à prendre pour sauver la Révolution, proposait de punir, sans hésitation ni délai, les généraux coupables ; de mettre sous le coup d'une responsabilité sérieuse les généraux ineptes ; de licencier les officiers supérieurs ayant appartenu à la noblesse ; de destituer les agents militaires nommés par Dumouriez ou par Beurnonville ; de rendre les ministres comptables du choix des fonctionnaires ; d'éloigner, tant que la patrie serait en péril, tous les étrangers non naturalisés ; de bannir tous les gens sans aveu ; de soumettre à une réclusion absolue toutes les anciennes religieuses non mariées ou qui ne s'étaient pas retirées dans leurs familles ; de détenir dans les villes les femmes des émigrés ; d'établir l'impôt progressif ; de lever l'emprunt forcé d'un milliard sur les riches ; d'assurer la défense de Paris, au moyen d'une ar- mée révolutionnaire soldée[14].

C'étaient là, certes, des mesures d'une rigueur extrême ; mais, du moins, l'esprit de parti ne les avait point dictées, et elles ne témoignaient que d'une âpre sollicitude pour le salut de la République : but souverain vers lequel on put croire un instant qu'allaient se diriger toutes les pensées et tous les efforts !

Malheureusement, les Girondins n'avaient point souscrit à leur défaite, et ils trouvèrent moyen de remplir de leur absence cette scène qu'ils avaient occupée avec tant d'éclat. Pour adoucir leur malheur, pour calmer leur ressentiment, on fit tout ce que comportait la situation ; mais rien ne fut assez pour les fléchir : ni la surveillance des députés captifs réduite à la présence d'un seul gendarme, avec faculté de parcourir Paris[15] ; ni la bienveillance, à peine déguisée, du Comité de salut public[16] ; ni l'assurance des sympathies de Garat, resté ministre pour les protéger[17] ; ni Marat résignant ses fonctions de législateur ; ni le comité central révolutionnaire dissous ; ni Couthon offrant de se rendre à Bordeaux, en qualité d'otage[18]. La passion de la vengeance, enflammée chez les uns par l'espoir, ennoblie chez les autres par le danger, légitimée aux yeux de tous par le sentiment d'une injustice soufferte, avait envahi leur âme et l'obsédait.

Plusieurs s'évadèrent, dans le seul but d'aller soulever les provinces. Valazé, à qui le chemin de la fuite était ouvert, consulta Lacaze, son ami, qui le dissuada. Menacé à son tour, Lacaze est pressé de partir ; il répond : Non, c'est moi qui ai retenu Valazé. S'il meurt, je veux partager son sort[19]. Vergniaud, Gensonné, refusèrent aussi de profiter des facilités d'évasion qu'on leur ménagea, plaçant ainsi leur innocence sous la sauvegarde de leur courage. Ils firent plus : ils mirent à braver les vainqueurs une sorte d'affectation hautaine. Le bruit ayant couru qu'il était question d'amnistier les membres de l'ancien Comité des Douze, Valazé déclara repousser l'idée d'une amnistie avec horreur, et demanda des juges, dans le cas où l'on ne sévirait pas contre ses lâches assassins[20]. Vergniaud écrivit à la Convention une lettre qui contenait ces mots : L'Huillier, Hassenfratz et les hommes qui sont venus reproduire une pétition déjà jugée calomnieuse, ont promis les preuves de leurs nouvelles dénonciations. S'ils les produisent, je me suis mis volontairement en état d'arrestation, pour offrir ma tête en expiation des trahisons dont je serais convaincu. S'ils n'en produisent pas, je demande qu'ils aillent à l'échafaud[21].

Quelque violent que fût ce langage, peut-être n'eût-il paru que magnanime, de la part d'hommes vaincus et prisonniers, s'il n'eût été l'écho d'orages dont on était fatigué. Et puis, il semblait trahir dans les Girondins une persistance de préoccupations personnelles que les embarras de la République condamnaient.

La vérité est que, depuis l'arrestation des députés dénoncés, les bancs du côté droit, déserts quand s'agitait une question de bien public, ne se garnissaient que lorsqu'un incident lié au 31 mai promettait de ranimer le feu des querelles de la veille. Bourdon (de l'Oise) en fit amèrement la remarque, dans la séance où l'on entendit la lecture de la lettre de Vergniaud. Le procès-verbal doit constater, dit-il, que ces messieurs du côté droit ne se sont rendus à la séance d'aujourd'hui que pour nous troubler, et qu'ils se sont retirés au moment où l'on entamait la discussion d'une loi utile[22]. Heureuse encore la Gironde, si sa cause n'eût été compromise que par des démarches comme celles de Vergniaud et de Valazé ! Mais tandis qu'eux, du moins, se bornaient à provoquer la Montagne, leurs amis couraient sur mille points divers souffler la guerre civile : Buzot, Gorsas et Barbaroux dans le Calvados ; Meillan et Duchâtel, qui n'avaient pas été décrétés, en Bretagne ; Chasset, à Lyon ; Rabaut-Saint-Étienne, à Nîmes ; Brissot, à Moulins[23].

Entendaient-ils, comme on les en accusa, fédéraliser la France, la mettre en lambeaux ? Non : s'ils exposèrent la patrie au malheur d'être déchirée, ce fut en dehors de toute vue systématique, par pur entraînement et sous l'impulsion de la fureur. Ils prétendirent défendre, contre Paris, l'unité et l'indivisibilité de la République, et, chose inexplicable s'il était une folie que l'excès de la passion n'expliquât point, ils le crurent ! Opérer une réunion entre les troupes départementales et les habitants de Paris, rétablir la Convention dans son intégrité, assurer sa liberté par une garde prise dans tous les départements, et faire juger les membres de la Convention par un tribunal composé de juges que tous les départements seraient appelés à fournir[24], tel était leur plan, et leur fédéralisme n'allait pas au delà. Ce fut donc avec la décision que donne une conscience en repos qu'ils travaillèrent à soulever la province.

Et dans quel moment, grand Dieu !

Quiconque eût fait alors le tour de la France, sans connaître la puissance de l'idée qui remplissait son âme, l'eût jugée irrévocablement perdue.

L'armée des Alpes, assez bien organisée d'ailleurs, comprenait de nombreuses recrues qui, n'ayant ni sabres ni fusils[25], pouvaient mourir, mais non se battre.

L'armée d'Italie avait emporté quelques forts ; mais, engagée sur un terrain coupé de montagnes et qu'on lui disputait pied à pied, elle n'y avançait qu'en marquant son passage par une longue traînée de sang ; et la forteresse de Saorgio, dont la prise eût assuré la possession du comté de Nice, était encore au pouvoir de l'ennemi[26].

L'escadre espagnole, après s'être emparée de l'île Saint-Pierre, croisait sur les côtes de Nice et de Villefranche, prête à se réunir à l'escadre anglaise[27]. L'armée des Pyrénées était à peu près nulle, les contre-révolutionnaires n'ayant que trop bien réussi à empêcher le recrutement et les levées extraordinaires que le pays eût été en état de fournir. Le Comité de salut public avait ordonné qu'on y transportât quantité d'armes et de munitions tirées de l'arsenal de Lyon : vaine ressource ! La contre-révolution n'avait rien laissé partir ; si bien que la frontière des Pyrénées ne se trouvait défendue, à part les garnisons de Perpignan et des autres places, que par une dizaine de mille hommes sous la tente, lesquels n'avaient pu s'opposer à la prise de Bellegarde, poste d'une importance extrême, et, de ce côté, véritable clef de la France[28].

Quant aux armées de Brest et de Cherbourg, elles n'étaient pas encore formées, grâce aux calomnies qui, lancées de Paris, avaient précédé dans ces départements les commissaires montagnards et paralysé leurs réquisitions[29].

Mais les dangers les plus pressants étaient à la frontière du Nord, Là, soixante mille Prussiens ou impériaux avaient envahi, dès le mois d'avril, le territoire de la République, menaçant à la fois Lille, Valenciennes et Condé.

Dampierre, à qui la trahison de Dumouriez avait légué une armée forte à peine de vingt-deux mille hommes, et qui l'avait placée au camp de Famars d'abord, puis sous le canon de Bouchain, l'héroïque Dampierre livre à l'ennemi plusieurs combats dont les succès se balancent, rentre au camp de Famars pour se rapprocher de Valenciennes, reprend l'offensive, emporte les postes d'Orchies, de Lanoy, et, par cinq attaques, dirigées sur plus de sept lieues de développement, essaye de dégager Condé. Malheureusement, l'armée de Saxe-Cobourg, avec les Hollandais que commandait le jeune prince d'Orange, et les Anglais que venait d'amener le duc d'York, ne s'élevait pas alors à moins de quatre-vingt mille hommes : comment résister à une aussi énorme supériorité de forces ?

La bravoure et l'enthousiasme des soldats républicains n'y suffirent pas ; Dampierre trouva la gloire dans la mort ; et bientôt les Français, attaqués jusque dans le camp de Famars, durent l'évacuer après une résistance opiniâtre.

Un avantage remporté, du côté de Lille, par le général Lamarlière, sur les troupes du prince d'Orange, n'était pas une compensation suffisante de ces revers ; et si le 2 juin, arrivé dans l'intervalle, servit à les couvrir, il ne les réparait pas. On put bien, pour consoler l'orgueil national, faire grand bruit de trois cents prisonniers hollandais, et montrer solennellement au peuple de Paris un drapeau qu'au combat de Turcoing et de Ronk le grenadier Gros-Lambert avait enlevé ; la situation n'en restait pas moins ce qu'elle était : formidable. Lorsque Custine, nommé au commandement de la frontière du nord, accourut des bords du Rhin, que trouva-t-il ? L'armée dont il venait prendre la direction campait sous Bouchain, à demi désorganisée ; Condé était pressé sans espoir de secours ; l'ennemi, maître des hauteurs d'Anzin, jetait des obus dans la citadelle de Valenciennes, qu'il avait investie ; et sur toute la ligne des frontières, depuis Dunkerque jusqu'à Givet, l'ennemi, le bras levé, semblait n'avoir plus qu'un coup à frapper[30].

L'aspect des choses n'était guère plus rassurant vers la frontière allemande. L'armée de la Moselle, réunie, après le départ de Custine, sous les ordres du général Laage, n'était que de quatorze mille hommes, et les ennemis assiégeaient Mayence au nombre de soixante mille[31]. Il est vrai que le succès avait paru à la veille de couronner un essai de diversion ayant pour objet de s'emparer d'Arlon, de menacer Luxembourg, et d'obliger ainsi l'ennemi à partager ses forces, en tirant des troupes soit du siège de Mayence, soit de l'attaque des frontières. Le 9 juin, en effet, les alliés avaient été rejetés sur Luxembourg, à travers bois, en grand désordre, et les Français s'étaient emparés d'Arlon. Mais, faute d'être appuyé, cet avantage n'opéra point la diversion attendue. Luxembourg restait pourvu, et l'armée de la Moselle n'était pas en mesure d'entreprendre un siège[32].

A quelles plus déplorables extrémités la France pouvait-elle être réduite ? Le prince de Hardenberg écrit à ce sujet : Douze jours de marche serrée sur la capitale auraient suffi pour venir occuper les hauteurs qui la dominent, chasser la Convention et ses adhérents, et s'emparer de ce foyer des actes et de l'armement de la Révolution[33].

Que si de ce tableau l'on rapproche celui des dangers intérieurs ; si l'on songe que, pendant ce temps, les montagnes de la Lozère vomissaient des milliers de rebelles[34] ; que le royalisme, récemment en possession de Saumur, poursuivait, dans la Vendée, son itinéraire sanglant[35] ; que Paoli se préparait à pousser aux bras des Anglais la Corse enivrée de colère et trompée[36], il faudra bien reconnaître qu'en secouant sur leur pays les torches de la guerre civile les Girondins poussèrent l'aveuglement jusqu'au délire.

Le feu prit, tout d'abord, dans le Calvados. Dès le 4 juin le Conseil général du département, informé des événements de Paris, avait appelé deux membres de chaque administration de district à se concerter, en assemblée générale, sur les moyens de sauver la patrie, et, deux jours après, la commune d'Évreux était invitée à prendre part à de factieuses délibérations. Elle n'hésita point, et les représentants qu'elle élut furent Gardembas, notable, et Chaumont, maire de la ville[37].

Sur ces entrefaites, arrivent des députés de Caen, et, parmi eux, Caille, procureur-syndic du district de Caen, orateur emporté. Ils annoncent qu'ils étaient à Paris lors de l'insurrection ; qu'ils ont tout vu ; ils tracent de ce qu'ils nomment l'anarchie et de sa dernière victoire une peinture émouvante ; ils pressent les patriotes de se lever, de s'armer, de marcher. Bientôt paraissent, à leur tour, Buzot, Salles, Bergœing, et ils assurent que la Convention est au moment de périr ; qu'une faction, soudoyée par Pitt, a juré de la dissoudre[38]. Ces discours achèvent d'enflammer le peuple. Un arrêté avait été pris, portant qu'une force armée de quatre mille hommes serait levée sans retard et une correspondance établie avec les autres départements[39] : cet arrêté funeste est envoyé, le 14 juin, aux diverses sections de la ville, lesquelles s'empressent d'y adhérer ; et, le 21 juin, les dragons de la Manche et les chasseurs du district d'Évreux ayant reçu du ministre de la guerre l'ordre de se rendre à Versailles, la population se précipite en masse au-devant d'eux pour les empêcher de partir[40]. La révolte était flagrante.

Il est à remarquer, toutefois, que, loin de braver la Convention, les révoltés se couvraient du prétexte de la venger, et prétendaient n'aspirer qu'à l'honneur de la défendre. Ce fut le mot d'ordre, et le peuple s'y trompa[41].

Louvet s'était évadé de Paris, le 24 juin, avec sa chère Lodoïska. Obligé de changer de voiture à Meulan, il raconte que leur nouveau conducteur se répandait en injures contre ces coquins de députés qui allaient embraser les départements. Pourtant, ajoute-t-il[42], nous soutînmes gaiement cette conversation, qui ne finit qu'à la couchée. Le lendemain, il entra dans Évreux, qu'il trouva en pleine insurrection ; et il allait en sortir, le soir, pour pousser jusqu'à la ville de Caen, lorsqu'il vit venir à lui un garçon tapissier. C'était Guadet, qui, sous ce déguisement, avait fait vingt-deux lieues à pied dans la journée[43]. Ils continuèrent leur route ensemble, et, le 26, ils étaient à Caen, où les avaient précédés plusieurs de leurs amis, et qui était déjà devenu le centre d'une coalition formée entre huit départements : cinq de la Bretagne, trois de la Normandie[44].

Là était le commandant des côtes de Cherbourg, Félix Wimpfen, brave soldat, très-opposé à la Montagne, et auquel, par ce double motif, les Girondins confièrent leur destinée : grande imprudence, et qui avait un faux air de trahison ! Car cet homme que des républicains chargeaient de relever leur cause n'était pas un républicain. Membre de la Constituante, il avait combattu la suppression de la noblesse, proposé — dérisoirement à ce qu'on croit — l'institution d'une monarchie démocratique[45] ; et son royalisme avait toujours si bien percé à travers certains dehors révolutionnaires, qu'au siège de Fionville, qu'il défendit, au reste, en bon capitaine, le parti des princes lui avait fait des avances[46]. A la suite du 31 mai, il offrit son épée aux Girondins, mais sans prendre la peine de dissimuler le fond de ses sentiments.

Aussi Louvet ne tarda-t-il pas à en prendre souci. Je demandai à Barbaroux et à Buzot ce qu'ils pouvaient attendre d'un tel homme. Celui-ci me répondit que Wimpfen était homme d'honneur, royaliste à la vérité, mais incapable de trahir ses engagements. Je trouvai que l'autre était entièrement séduit par les qualités très-aimables de Wimpfen. Guadet et Pétion, qui venaient d'arriver, ne concevaient pas mes alarmes. Ils s'étonnaient de mon excessive promptitude à soupçonner quiconque n'était pas républicain comme moi. Dès lors, je vis que tout devait aller à Caen comme tout avait été à Paris[47]. Quel aveu ! Sur cette pente, pour peu qu'elle s'oubliât, la Gironde courait risque de s'entendre dire : Qu'avez-vous fait de votre drapeau ?

Quoi qu'il en soit, une assemblée s'étant formée à Caen, elle prit le titre d'Assemblée centrale de résistance à l'oppression, et publia une déclaration que les historiens, nos prédécesseurs ont, ou volontairement passée sous silence, ou ignorée. La voici :

Après les attentats du 10 mars et du 31 mai, après les forfaits du 2 juin, nous avons demandé justice et ne l'avons point obtenue. Indignés, les républicains du nord et de l'ouest se sont levés ; ils nous ont dit : Allez à nos frères du Calvados, qui les premiers ont arboré l'étendard de la sainte insurrection ; constituez votre comité central de résistance à l'oppression, et nous nous sommes constitués... Enfants de l'Armorique et de la Neustrie, vous aussi vous en appelez aux armes... Déjà les bannières du Calvados, de l'Ille-et-Vilaine et de l'Eure se sont réunies, aux cris de l'allégresse commune. Déjà votre avant-garde est dans Évreux, insurgée contre les usurpateurs. Vous voulez qu'on les punisse, ils seront punis. Ils seront punis : pour avoir commis les vols et les massacres de septembre, peuplé les administrations de leurs créatures, laissé les Alpes sans défense, ouvert à l'Espagne un chemin facile à travers les Pyrénées, fait périr dans le dénuement les légions du Rhin, désorganisé les armées du nord, ruiné la marine, livré aux Anglais notre commerce et nos colonies, corrompu le peuple à prix d'argent ; conseillé, préparé et accompli les pillages de février, acquitté Marat ; ils seront punis, pour avoir salarié, afin qu'ils poursuivissent les représentants de leurs huées, des femmes publiques et des gladiateurs ; ils seront punis pour avoir pactisé avec d'Orléans et Dumouriez ; voulu égorger, au 10 mars, les plus inflexibles républicains, établi le tribunal révolutionnaire, et livré la province à la tyrannie de leurs proconsuls ; ils seront punis pour avoir envoyé partout des émissaires d'une Commune usurpatrice et de deux ministres conspirateurs, Bouchotte et Garat, prêcher la doctrine du vol et du meurtre ; ils seront punis, pour avoir, en juin, aiguisé, dans la maison de Pache, les poignards destinés à leurs victimes ; pour avoir, le 31 mai et le 2 juin, entouré de cent canons parricides la Convention, et hasardé, en ce moment qu'ils croyaient favorable, une première tentative pour que la nation prît un chef[48] ; ils seront punis, pour avoir emprisonné les représentants du peuple, fait livrer Saumur par des généraux de leur choix, et forcé la représentation nationale à enfanter, dans l'état de dissolution où ils l'avaient réduite, un fantôme de constitution, ferment nouveau de discordes, dégoûtant squelette... Malheureux Parisiens, Parisiens généreux, nous venons terrasser des municipaux tyrans, briser vos fers, vous embrasser... Toi, Pache, et tous les tiens, et tes municipaux, et tes cordeliers, et tes femmes révolutionnaires, tous, tous, vous nous répondez sur vos têtes, nous ne disons pas seulement d'un mouvement qui déterminerait l'assassinat des représentants captifs, mais de toutes les espèces d'accidents qui pourraient d'une manière, en apparence moins violente, terminer leur vie.

Signé : REGNAULT, président ; CAILLE, secrétaire[49].

 

Impossible de resserrer en moins de mots plus de calomnies. Les Montagnards, les Jacobins, la Commune, n'étaient certes pas sans avoir des torts ; mais les prendre en masse et leur reprocher indistinctement, quoi ? Les journées de septembre, où le rôle de Robespierre n'avait été que celui de Vergniaud ; les pillages de février, dont Marat seul eût pu être accusé, et dont tous les autres patriotes ardents avaient gémi ; le 10 mars, que les Jacobins avaient flétri d'une manière si éclatante, et dont un des fauteurs, Fournier l'Américain, avait été arrêté sur la motion de Marat lui-même[50] !... Quant à faire des Montagnards les complices du duc d'Orléans, de Dumouriez, des royalistes vendéens, les destructeurs systématiques de notre marine et de nos armées, les auxiliaires des Anglais, en vérité c'était de la folie. Il fallait un excès de passion bien extraordinaire pourvoir dans Garat, l'homme le plus réellement modéré de la Révolution, l'organisateur de l'apostolat du vol et du meurtre. Et que dire de ces lignes de la fin, qui, semblant refuser aux Jacobins jusqu'au courage d'égorger leurs victimes, les supposaient capables de recourir au poison !

Il est permis de douter que Vergniaud eût adhéré à ce noir libelle s'il eût pu être consulté ; mais c'est le sort des hommes de parti d'avoir à souffrir de certaines fautes qu'ils condamnent, plus encore que de celles qu'ils commettent.

La Convention avait envoyé dans le Calvados deux commissaires, Prieur (de la Côte-d'Or) et Romme : ils furent arrêtés et enfermés au château de Caen. Wimpfen leur ayant rendu visite et leur demandant s'ils jugeaient leur arrestation légitime : Oui, répondit Romme. Les citoyens du Calvados ont pu se croire opprimés, ils ont eu le droit de s'insurger[51]. Romme, nature forte et austère, avait été l'instituteur du fils du comte de Strogonoff, qu'il avait élevé dans les principes de la Révolution, le faisant assister aux discussions de l'Assemblée et aux débats des clubs. Ce fut lui qui, plus tard, à l'époque où le peuple, soulevé, criait : Du pain et la Constitution de 1793 ! proposa qu'à l'avenir il n'y eût plus qu'une sorte de pain, et qu'il fût défendu aux pâtissiers de faire des gâteaux. Ce trait et sa réponse à Wimpfen le caractérisent. C'était un de ces esprits roides qui, apportant dans la conduite des choses humaines le génie des mathématiques, veulent à tout prix et jusqu'au bout raisonner juste. Romme, d'ailleurs, eut tous les genres de logique, y compris celle de la vertu ; et ce n'est pas seulement à l'adoption du Calendrier républicain que se lie la gloire de son nom : Romme figura parmi les derniers soldats de la liberté mourante, et, la liberté morte, il fut un des six qui, condamnés pour l'avoir aimée d'un indomptable amour, se poignardèrent, n'ayant à eux six qu'une paire de ciseaux et deux couteaux, qu'ils se passaient après s'être frappés !

Cependant, la nouvelle du 31 mai avait provoqué dans beaucoup de villes un mouvement semblable à celui qui se produisait à Caen et à Évreux.

Dès les premiers jours de juin, les autorités constituées de Bordeaux s'étaient réunies et déclarées dans un état provisoire d'indépendance, sous le titre de Commission populaire de salut public. Or, cette commission, à peine élue, s'empara des fonctions législatives, ordonna des levées d'hommes et d'argent, et fit signifier à la Convention un acte où la rébellion s'exprimait sans détour[52].

A Rennes, les assemblées primaires, formées en grande hâte, votèrent une véhémente adresse à la Convention, et les administrateurs procédèrent à la levée d'une troupe destinée à marcher sur Paris[53].

Limoges expédia des courriers à tous les chefs-lieux du centre avec convocation à Bourges des députés suppléants de la Convention[54].

Marseille institua une sorte de gouvernement provisoire[55].

Il y eut à Nîmes, à Grenoble, à Bourg, à Besançon, à Dijon, à Mâcon, des secousses, préludes de la guerre civile[56].

Les autorités constituées de Toulouse placardèrent le discours de Lanjuinais contre la Commune de Paris, remplirent les prisons de patriotes, levèrent une force armée de mille hommes, et appelèrent à Perpignan toutes les troupes départementales de la contrée[57].

Quant à la ville de Lyon, elle se mettait en rapport avec Bordeaux[58], et le moment approchait où il faudrait l'assiéger pour la réduire.

Chose tristement curieuse et qui montre combien le caractère apparent de cet essai de révolte était trompeur !

Dans le département du Gard, où, en 1790, les adversaires des patriotes avaient arboré le signe de la croix, et où catholiques et protestants s'étaient livré un combat à mort, on vit les massacreurs marcher côte à côte avec les enfants des massacrés[59], et les provocateurs fanatiques des troubles de Jalès furent aperçus poussant en avant ceux qui avaient failli être leurs victimes[60]. Les prêtres, complices des voltairiens de la Gironde ! qui jamais se serait attendu à un tel spectacle ? Ah ! c'est qu'au fond de toutes les résistances locales se cachait le royalisme. Les aristocrates, accourus en foule aux assemblées primaires[61], d'où se trouvaient nécessairement absents et ceux qu'occupaient les travaux du labourage et ceux que retenaient les travaux de l'atelier, les aristocrates se gardaient bien, on le devine, de déployer leur propre étendard : ils parlaient de défendre la Convention, de la venger, de délivrer Paris de la tyrannie des anarchistes, d'écraser la Commune de Paris au profit de la République ; et il arriva qu'au premier moment beaucoup de patriotes se laissèrent prendre à cet artificieux langage. Ce qui eut lieu à Lyon, où, selon le mot d'un écrivain du temps, les menés étaient des patriotes, et les meneurs des agents de l'étranger ou des royalistes[62], eut lieu à peu près dans toute la France. Les Girondins eurent beau adopter, pour en couvrir leur révolte, la devise sainte : République une et indivisible, cette devise, dans la bouche de leurs nouveaux alliés, était si bien un mensonge, qu'en plusieurs des villes appartenant à la coalition départementale des assignats à l'effigie de l'ex-roi gagnèrent depuis 5 jusqu'à 10 pour 100 sur les assignats républicains ! Mais quoi ! dans la bouche des Girondins eux-mêmes, que pouvaient signifier les mots unité et indivisibilité de la République, lorsqu'ils souffraient que leur querelle devînt le prétexte d'une effroyable confusion ? Les coalitions n'arrêtaient-elles pas la circulation des denrées ? Un de leurs effets n'était-il pas, ainsi que le fit observer Cambon, d'empêcher l'annulation des assignats, ce qui revenait à en créer[63] ? Et les forces départementales qu'on poussait vers Paris n'étaient-elles point nécessaires aux Pyrénées pour repousser les Espagnols ; en Vendée, pour combattre La Rochejacquelein et Lescure ?

Voilà ce qui se disait à Paris, et ce qui insensiblement étouffait, même dans les cœurs les moins durs, la sympathie que l'infortune des Girondins pouvait avoir excitée.

On se rappelle la conduite de Danton lors du 31 mai et du 2 juin : elle avait été si ambiguë, que, dans la séance du 7, aux Jacobins, Camille avait dû prendre la parole pour affirmer le civisme de son ami, un des membres du club n'ayant pas craint de s'écrier : J'ai de violents soupçons sur les sentiments actuels de Danton : ce député n'est plus aussi révolutionnaire qu'il l'était[64]. Il est certain que la chute de la Gironde n'avait pas été considérée par Danton comme une victoire ; loin de là ! Il en paraissait honteux et inquiet, écrit Garat dans ses Mémoires[65] ; et l'on verra plus loin que son attitude au 2 juin fut un des griefs dont Saint-Just s'arma contre lui. Eh bien, tel fut l'effet moral des manœuvres qui agitaient la province, que Danton lui-même se crut obligé de prendre parti avec éclat. Seulement, il eut le tort de dépasser le but, comme il arrive à ceux qui ont des soupçons à dissiper. Il appela les Girondins une secte impie ; il appela Brissot un misérable ; il déclara que le 31 mai et le 2 juin feraient la- gloire de Paris ; il alla jusqu'à revendiquer pour lui l'honneur de la dernière insurrection, et cela par l'unique motif qu'il lui était échappé un jour de dire : S'il y avait cent hommes dans la Convention qui me ressemblassent, nous résisterions à l'oppression[66]. Mensongère vanterie où il n'y avait ni générosité ni courage !

Ce fut dans cette séance que Couthon demanda à l'Assemblée de fixer l'opinion de la France sur les événements des. 31 mai et 2 juin. Dans un rapport[67] digne de son rusé génie, Barère les avait présentés sous un jour assez équivoque ; et il était naturel qu'aux yeux des gens de province ils n'apparussent qu'à travers un nuage, La motion de Couthon, que Robespierre appuya, fut donc adoptée, et donna naissance à un décret ainsi conçu : La Convention nationale déclare que, dans les journées des 31 mai, 1er, 2 et 3 juin, le Conseil général révolutionnaire de la Commune et le peuple de Paris ont puissamment concouru à sauver la liberté, l'unité et l'indivisibilité de la République[68].

Mais cela ne suffisait pas, il fallait poursuivre la révolte dans ses fauteurs. Une lettre trouvée sur un chef vendéen ayant prouvé que Duchâtel correspondait avec les royalistes, un décret d'arrestation fut lancé contre lui[69]. Wimpfen avait osé écrire au ministre de la guerre : On demande que je me rende à Paris pour donner des renseignements ? Le général ne pourrait le faire qu'accompagné de soixante mille hommes : l'exigerez-vous de lui ? Wimpfen fut décrété d'accusation, ainsi que Brissot, qu'on avait découvert et arrêté à Moulins[70].

Il était temps aussi de regarder aux fruits de l'indulgence déployée à l'égard des députés détenus ; chaque jour quelqu'un d'eux s'évadait : après Pétion, Lanjuinais ; après Lanjuinais, Kervélégan ; après Kervélégan, Biroteau.

Or, ces évasions, sur lesquelles on aurait pu fermer les yeux si la Gironde s'était résignée, devenaient très-importantes à empêcher, dès qu'elles avaient pour résultat d'alimenter la guerre civile. De là l'idée de traduire dans des maisons nationales ceux des Girondins dénoncés qui ne s'étaient pas encore soustraits à la loi. Car ce fut en ces termes qu'Amar formula sa proposition. Non content de la combattre, Ducos voulait qu'un rapport fût fait relativement aux membres détenus : Robespierre s'élance à la tribune : Quoi ! il existe encore des hommes qui feignent d'ignorer des faits que la France entière connaît ! Quoi ! c'est au moment où les brigands de la Vendée ravagent nos départements, que l'audace de leurs complices s'éveille dans notre sein, et que nous entendons dans cette enceinte les cris de la révolte ! On a dit qu'on demandait un rapport pour vous-mêmes : Quoi ! l'on met en parallèle la Convention nationale et une poignée de conspirateurs ![71]

Il continua sur ce ton, interrompu tour à tour par les applaudissements et par les murmures. Son indignation était si violente, qu'oubliant à la fois et le respect dû au malheur et celui qu'on doit à la justice, il s'emporta jusqu'à dire de Brissot : Lâche espion de police, que la main du peuple a saisi couvert d'opprobre et de crimes[72].

Brissot n'était point là pour répondre : à l'Histoire de répondre pour lui ! Lorsqu'on le transféra, malade, de la prison de l'Abbaye à la Conciergerie, il y fut laissé sur la paille, sans autre nourriture que du pain et de l'eau, parce qu'il n'avait pas les trente-trois livres[73], prix d'un meilleur traitement ; et l'ordre de marcher à l'échafaud serait venu le trouver dans cet état de détresse, si ses amis, qui en furent informés, n'eussent payé la somme requise[74] !...

Au reste, dans ce conflit de passions implacables, la sérénité avait fui de toutes les âmes, et l'équité semblait n'avoir plus de refuge. Tandis que les Jacobins reprochaient à Barère ses ménagements envers la Gironde, lui et Robert Lindet recevaient de Vergniaud, comme membres du Comité de salut public, une lettre où ils étaient apostrophés en ces termes :

Hommes qui vendez lâchement vos consciences et le bonheur de la République, pour conserver une popularité qui vous échappe et acquérir une célébrité qui vous fuit !

Je vous dénonce à la France comme des imposteurs et des assassins.

Vous êtes des imposteurs ; car si vous pensiez que les membres que vous accusez fussent coupables, vous auriez déjà fait un rapport et sollicité contre eux un décret d'accusation qui flatterait tant votre haine et la fureur de leurs ennemis.

Vous êtes des assassins ; car, n'osant les traduire devant les tribunaux où vous savez que leur justification vous couvrirait d'infamie, vous les tenez, par un silence et des rapports également calomnieux, sous le poids des plus odieux soupçons et sous la hache des vengeances populaires.

Vous êtes des assassins ; car vous ne savez les frapper que par derrière...

Vous êtes des imposteurs ; car vous les accusez d'exciter dans la République des troubles que vous seuls et quelques autres membres dominateurs de votre Comité avez fomentés...

Ce n'est pas en effet dans l'intérêt des membres accusés qu'un grand nombre de départements s'insurgent ; c'est dans l'intérêt de la représentation nationale, qui a été violée.

Un prompt rapport eût prévenu tout mouvement...

Lâches !... ma vie peut être en votre puissance.

Vous avez dans les dilapidations effrayantes du ministère de la guerre, pour lesquelles vous vous montrez si indulgents, une liste civile qui vous fournit les moyens de combiner de nouveaux mouvements et de nouvelles atrocités.

Mon cœur est prêt : il brave le fer des assassins et celui des bourreaux.

Ma mort serait le dernier crime de nos modernes décemvirs.

Loin de la craindre, je la souhaite : bientôt, le peuple éclairé par elle se délivrerait enfin de leur horrible tyrannie.

Paris, 28 juin 1795.

VERGNIAUD[75].

 

Et pendant que Vergniaud rendait de la sorte responsable de la guerre civile ce même Comité de salut public où, selon le témoignage de Garat, l'arrestation des députés proscrits n'avait excité que des sentiments de consternation et de douleur[76], les amis de Vergniaud, réunis à Caen, s'efforçaient d'y rassembler les matériaux d'un vaste incendie ; Gorsas, Guadet, Louvet, Pétion, Lanjuinais, Kervélégan, Mollevault, se présentaient tour à tour dans l'Assemblée centrale de résistance à l'oppression, que leurs discours enflammaient[77] ; les citoyens désignés sous le nom de carabots s'armaient, passaient des revues ; et le président de la société jurait, en recevant la bannière, de la rapporter entière ou teinte de sang[78] ; on renfermait au château de Caen, comme coupables de propos séditieux, deux officiers, l'un neveu de Danton [79], l'autre frère de Duhem[80] ; on entretenait une correspondance active avec Évreux, Nîmes, Marseille, Lyon[81] ; enfin la proclamation suivante était lancée :

Félix Wimpfen, aux bons citoyens de Paris, salut :

Déjà une fois, j'ai contribué essentiellement à sauver la République, et les factieux m'ont calomnié et persécuté ; aujourd'hui, je suis appelé à la sauver plus efficacement ; ils me proscrivent, ils mettent ma tête à prix.

Les méchants vous disent : Félix Wimpfen marche contre Paris. N'en croyez rien ; je marche vers Paris, pour Paris, et pour le salut de la République une et indivisible...

Bons citoyens de Paris, rallions-nous pour la cause commune. Je commande les Bretons et les Normands.

Frères, je fraterniserai avec vous ; mais mes ordres portent de combattre tous ceux qui inquiéteraient ma marche. Je les combattrai, je les vaincrai ; la vérité sera entendue, et justice sera faite.

Le général, FÉLIX WIMPFEN[82].

 

Heureusement pour la France, qu'un choc semblable eût jetée mourante aux pieds de l'étranger, ces menaces ne se réalisèrent pas. Et il y avait à leur réalisation un obstacle : le républicanisme sincère des Girondins. Dans l'emportement de leurs colères, ils avaient bien pu ne pas repousser l'artificieux appui des royalistes ; ils avaient bien pu — et en ceci ils n'étaient déjà que trop coupables — s'aveugler volontairement sur les suites d'une lutte entre la province et Paris ; mais abdiquer leur dignité devant le trône, abdiquer leur raison devant l'autel, et vouloir écraser la Montagne coûte que coûte, fût-ce sous les ruines de la Révolution renversée, voilà ce dont ils étaient incapables. Non, ils ne tramèrent pas la perte de cette République à laquelle ils devaient leur gloire comme leurs malheurs. Vainement, dans une note trop complaisamment recueillie par Toulongeon, Wimpfen accuse-t-il Pétion et Buzot d'avoir nourri le rêve d'une dynastie nouvelle[83] ; comment ajouter foi au témoignage d'un homme qui va jusqu'à prétendre que Pétion imagina de mettre le feu à la ville de Caen, pour imputer cet attentat à la Montagne, et décider ainsi les habitants à marcher sur Paris[84] ? Quand on lit le bulletin des autorités constituées réunies à Caen, ce qui frappe c'est le républicanisme ardent qui respire en chacune des pièces dont se compose ce bulletin, rédigé sous l'influence immédiate de la Gironde. Et n'est-ce pas sous les auspices de la République une et indivisible que se place Wimpfen, dans la proclamation qu'on vient de lire ? Les Montagnards, a écrit René Levasseur, longtemps après la tempête, regardaient les Girondins comme des traîtres... Aujourd'hui, je ne puis juger de même. Un assez grand nombre de nos adversaires ont souffert pour la liberté, et plusieurs d'entre eux ont déployé un trop beau caractère, principalement Louvet, qui se montrait notre ennemi le plus acharné, pour que je doive voir seulement des fautes là où, alors, je croyais reconnaître des crimes. Nous étions injustes sans le savoir, et peut-être en était-il de même de beaucoup de membres du côté droit... Roland et Louvet avaient confondu La Fayette et Bailly avec Maury et Bouillé. Il n'était pas étonnant, lorsque les premiers s'arrêtèrent à leur tour, que nous fussions portés à confondre Vergniaud et Pétion avec Ramond et Dumas. C'est le cours naturel des choses. Nous n'apercevions que le but et l'entrave[85].

La Gironde voulant le maintien de la République, il eût été d'une politique habile, de la part des royalistes, de masquer soigneusement leur but. C'est ce qu'ils firent d'abord ; mais, bientôt, éblouis par l'apparence du succès, ils crurent se pouvoir passer d'hypocrisie ; et, dès ce moment, la coalition fut dissoute. Elle le fut d'autant mieux que, parmi les patriotes de province que la Gironde entraînait dans son tourbillon, beaucoup ne s'étaient armés contre les Montagnards que parce qu'on les leur avait représentés comme des Orléanistes déguisés, comme des misérables qui, par l'anarchie, préparaient le gouvernement d'un seul, ce que résumait, dans les départements, la dénomination de Maratistes. On juge de quel trouble les républicains honnêtes se sentirent saisis, lorsque, les manœuvres du royalisme venant leur montrer où étaient leurs ennemis véritables, ils comprirent qu'en cherchant à tuer la Montagne ils avaient couru risque de tuer la Révolution !

Autre circonstance décisive : la Constitution, si impatiemment attendue, avait été, à partir du 2 juin, reprise, refaite, achevée et publiée, en l'espace d'un mois[86]. Or, quels que fussent les défauts de ce grand travail, œuvre exclusive de la Montagne, jamais certes contrat social plus profondément démocratique n'avait été soumis à la sanction d'un peuple. Et d'autre part, il semblait résulter du prompt achèvement de la Constitution, depuis la chute des Girondins, que c'était par eux, par leur orgueil, par leur rage de substituer des questions de personnes aux questions de principes, que tout avait été paralysé jusqu'alors.

Ainsi s'explique l'étonnante rapidité avec laquelle s'éteignit, et en quelque sorte d'elle-même, une insurrection qui s'était annoncée si menaçante et si générale. La Constitution fut presque pour tous les républicains de diverses nuances, mais sincères, un signe de ralliement ; et les royalistes, déconcertés, rentrèrent dans l'ombre.

On a vu de quelle ardeur les insurgés du Calvados s'étaient montrés un instant animés. Eh bien ! lorsque, l'heure de marcher sur Paris étant venue, Wimpfen voulut faire l'essai des forces disponibles, Caen, sur huit bataillons qu'on y passa en revue, ne fournit que dix-sept volontaires ; Vire envoya vingt soldats ; les autres villes du Calvados s'abstinrent[87]. Il fallut appeler du fond de la Bretagne cinq ou six cents hommes, que Wimpfen mit sous les ordres du royaliste Puisaye, et qui prirent la route d'Évreux[88].

Pendant ce temps, on avait fait partir de Paris, à la rencontre des insurgés, douze cents hommes levés à la hâte, auxquels se joignirent trois cents gendarmes, venus des lieux voisins de la capitale ; et cette petite armée n'était guère qu'à trois lieues d'Évreux, lorsque Puisaye y arriva de son côté. Aussitôt il ordonne à la garde nationale de la ville de se réunir aux troupes qu'il amène, en ayant soin toutefois de déclarer qu'il s'agit uniquement d'aller fraterniser avec l'armée parisienne, campée à Vernon[89]. Sur cette assurance, les gens d'Évreux se mettent en marche ; mais le canon, tiré à Brécourt, leur apprenant qu'il s'agit de combattre, non de fraterniser, ils abandonnent leurs rangs, et se retirent chez eux dans la nuit du 13 au 14 juillet[90]. Le reste sui vit. Ce fut une défaite sans combat.

Le 14, de retour à Évreux, Puisaye fait battre la générale, donne à ses hommes l'ordre de se rendre à Lisieux, et enjoint à ceux des membres du conseil de département qu'il rencontre au lieu des séances, de l'accompagner avec les caisses, menaçant, en cas de refus, d'employer la force. Les administrateurs, effrayés, obéissent ; mais la commune d'Évreux n'est pas plutôt délivrée de la présence des Bretons, qu'elle se forme en assemblée générale et s'empresse d'abjurer franchement son erreur[91].

Wimpfen reçut sans s'émouvoir la nouvelle de l'échec de son lieutenant. Il parla de fortifier Caen, de déclarer cette ville en état de siège, de créer un papier-monnaie.

Ce langage se rapportait peu au plan primitif des Girondins, et ne leur offrait d'autre perspective que celle d'être enfermés sur un point difficile à défendre, avec les Jacobins en face et les royalistes à dos. Louvet et Salles soupçonnèrent un piège caché ; ils entrevirent Pitt derrière Wimpfen ; et leurs soupçons, que repoussa d'abord l'incrédulité de leurs collègues, se changèrent en certitude, lorsque le général ayant fait demander un entretien à tous les députés, leur dit, après une comédie de terreur, assez mal jouée du reste : Tenez, je vous parle franchement, je ne vois plus qu'un moyen d'avoir sûrement et promptement des hommes, des armes, des munitions, de l'argent, des secours de toute espèce ; c'est de négocier avec l'Angleterre. Moi, j'ai des moyens pour cela ; mais il me faut votre autorisation et vos engagements. Sans s'être consultés, et par un mouvement spontané d'indignation, les Girondins présents se levèrent, et la conférence fut rompue[92].

Wimpfen alla recueillir à Lisieux les débris des bandes insurgées, revint à Caen, y fit quelques préparatifs de défense ; mais déjà le sol se dérobait sous lui. La Montagne, par une politique habilement généreuse, avait pris le parti de traiter le soulèvement du Calvados comme une erreur née des manœuvres de quelques factieux[93] : les moins compromis ne songèrent plus qu'à profiler de ces dispositions indulgentes ; et, pour mieux acheter leur pardon, les administrateurs du Calvados allèrent jusqu'à placarder, à la porte même de l'intendance où logeaient les Girondins proscrits, l'affiche montagnarde qui portait le décret de leur mise hors la loi[94]. C'était les avertir durement de pourvoir à leur sûreté ; et, sous le coup d'une menace semblable, l'hésitation n'était guère permise.

Lorsque la bande conduite par Puisaye était partie pour Évreux, Buzot avait proposé à ses collègues de la suivre, aimant mieux mourir les armes à la main que de traîner, selon ses propres expressions, une inutile et inglorieuse vie dans les landes de la Bretagne ou les souterrains de la Gironde[95]. Car, ajoute-t-il, je ne crus jamais aux brillantes nouvelles qu'on répandait au loin des dispositions patriotiques — c'est girondines qu'il veut dire — de cette partie de la France, bruits qui se dissipaient comme de vains nuages à mesure qu'on approchait du pays[96]. Mais le découragement de Buzot n'était point partagé par ses amis ; ils ne pouvaient croire que le midi les abandonnât, et Bordeaux, surtout, les attirait[97]. Ce fut donc là qu'ils résolurent de se rendre, dès qu'ils virent que, dans l'ouest, leurs affaires étaient entièrement ruinées. Il y avait alors à Caen un bataillon du Finistère qui leur paraissait dévoué : ils s'y incorporèrent, décidés à faire route avec lui jusqu'à Quimper ; et tandis que Wimpfen se cachait à Bayeux[98], ils partirent, sous l'uniforme de volontaire.

Or, l'esprit jacobin s'était si bien glissé jusqu'au sein de cette troupe envoyée contre les Jacobins, qu'il ne tarda pas à s'y manifester une division d'opinions peu rassurante pour les députés proscrits, qui, à Dinan, se séparèrent du bataillon[99], moitié générosité, moitié prudence. Ils se trouvèrent réduits de la sorte à une petite caravane de dix-neuf personnes : Pétion, Barbaroux, Lesage, Cussy, Meillan ; Girey-Dupré, rédacteur du Patriote français ; un jeune homme nommé Riouffe, qui s'était attaché à la fortune des Girondins, et six Finistériens servant de guides[100].

Quant à Guadet, Duchâtel et Kervélégan, ils avaient précédé leurs collègues à Quimper. Armés jusqu'aux dents, et couverts, par-dessus l'uniforme, du sarrau blanc bordé de rouge que portait le soldat en voyage, les illustres fugitifs continuèrent leur route à travers toutes sortes d'alertes, d'aventures et de périls, traversant des villages que remplissait le bruit du tambour ou le son du tocsin, vivant de pain noir et de mauvais cidre, passant la nuit dans des granges ou sur la terre dure, s'égarant dans des chemins de traverse, sans cesse au moment d'être reconnus, et forcés, soit qu'il fallût braver la vigilance des districts, soit qu'il y eût à la déjouer, tantôt de mettre la baïonnette en avant, tantôt de se coucher à plat ventre en d'épais taillis, tantôt d'affecter des allures joyeuses et de chanter la Carmagnole[101].

On arriva ainsi à Quimper, après une marche fort longue, fort pénible, dont le passage suivant des Mémoires de Meillan donnera une idée : ... C'est alors que j'ai vu, pour la première et unique fois, Pétion prendre une vivacité. Son flegme ne s'était pas démenti jusque-là ; mais, lorsque à peine échappés à un aussi grand danger, il remarqua que quelques-uns d'entre nous ne pressaient point assez le pas, il se fâcha assez vivement pour ne vouloir écouter aucune excuse, et il avait raison... Barbaroux riait de tout ; encore à la vue de Rostrenen, il disait en plaisantant que nous nous étions couverts de gloire, et que la postérité aurait peine à croire que dix-sept hommes eussent triomphé d'un district. Le pauvre malheureux avait pourtant une entorse au pied, qui le faisait cruellement souffrir et ne lui permettait pas de marcher sans appui. Nous nous relayions pour le soutenir ; mais je supportais la plus forte charge, parce qu'il prétendait que personne ne le soulageait autant que moi. Je le traînai de la sorte jusqu'à Quimper, où j'arrivai plus malade des jambes que lui-même... Nous eûmes à souffrir aussi à l'occasion de Riouffe. Sa botte l'avait blessé, et nous n'avions ni bottes ni souliers à lui offrir. Il fut réduit à marcher d'abord sur ses bas, ensuite nu-pieds ; il se mit en sang. Il était souvent obligé de s'arrêter et de se coucher au milieu du chemin ; et quoiqu'il retardât notre marche, il n'était pas possible de le laisser en arrière : il eût été pris[102].

A Quimper, tandis que des toits hospitaliers et discrets recevaient les proscrits, Duchâtel, publiquement et non sans imprudence, faisait fréter la barque qui devait les conduire à Bordeaux. Au bout de douze jours, qu'ils passèrent entre la crainte et l'espoir, elle se trouva prête, et partit emportant neuf voyageurs : Cussy, Duchâtel, Bois-Guyon, Girey-Dupré, Salles, Meillan, Bergœing, Riouffe, et un ami de Brissot, l'Espagnol Marchena. Barbaroux ne put les suivre, étant tombé malade de la petite vérole. Quant à Pétion, Buzot, Guadet et Louvet, ils avaient préféré prendre une autre voie, et ne s'embarquèrent, avec Barbaroux, que quelque temps après[103]. Tous, à l'exception de Buzot, ils croyaient n'avoir qu'à toucher le sol de la Gironde pour être au terme de leurs angoisses. Et que leur gardait cette terre tant désirée ? Une destinée si tragique, hélas ! qu'au souvenir de leur infortune, l'histoire se sent à peine la force d'insister sur leurs fautes ! Nous aurons à l'achever, néanmoins, ce lamentable récit, et à raconter comment Louvet, précipité du haut de ses espérances, fut amené à s'écrier : Ô malheureux humains, vos joies sont quelquefois aussi follement placées que vos tristesses ![104]

 

 

 



[1] Voyez les Mémoires de Levasseur, t. I, chap. VIII, p. 282.

[2] Révolutions de Paris, n° 205.

[3] Révolutions de Paris, n° 204.

[4] Révolutions de Paris, n° 205.

[5] Procès-verbal de la Commune, séance du 11 juin 1793.

[6] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 157 et 158.

[7] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 165.

[8] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 162.

[9] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 162 et 163.

[10] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 165.

[11] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 178.

[12] Journal de la Montagne, n° 6.

[13] Journal de la Montagne, n° 8.

[14] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 160 et 161.

[15] Voyez Les Mémoires de Levasseur, déjà cités sur ce point.

[16] Mémoires de Garat, ubi supra, p. 408.

[17] Mémoires de Garat, ubi supra, p. 408.

[18] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 163.

[19] Mémoires de Buzot, p. 191 et 192.

[20] Voyez la lettre adressée par Valazé au président de la Convention, dans l'Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 164 et 165.

[21] Voyez sa lettre dans l'Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 166 et 167.

[22] Convention, séance du 6 juin 1793.

[23] Voyez Mémoires de Louvet, p. 101. — Mémoires de Meillan, p. 65. — Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 148.

[24] Mémoires de Buzot, p. 83 et 84.

[25] Rapport de Cambon, au nom du Comité de salut public, dans la Bibliothèque historique de la Révolution. — Situation de la France. — 1164-65.

[26] Rapport de Cambon, au nom du Comité de salut public, dans la Bibliothèque historique de la Révolution. — Situation de la France. — 1164-65.

[27] Bibliothèque historique de la Révolution.

[28] Bibliothèque historique de la Révolution.

[29] Bibliothèque historique de la Révolution.

[30] Voyez, pour plus de détails, l'Histoire de France, par Toulongeon, t. II, huitième époque. In-4°, an XII.

[31] Histoire de France, par Toulongeon, t. II, p. 284.

[32] Histoire de France, par Toulongeon, t. II, p. 285.

[33] Mémoires tirés des papiers d'un homme d'État, t. II, p. 286 et 287.

[34] Rapport de Cambon, présenté le 8 juillet 1793, au nom du Comité de salut public.

[35] Voyez plus bas.

[36] Rapport de Cambon, ubi supra.

[37] Précis des événements qui ont eu lieu dans le département de l'Eure, après les journées du 31 mai et du 2 juin, par Gardembas.

[38] Précis des événements qui ont eu lieu dans le département de l'Eure, après les journées du 31 mai et du 2 juin, par Gardembas.

[39] Voyez le texte dans l'Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 149 et 150.

[40] Précis des événements qui ont eu lieu dans le département de l'Eure, après les journées du 31 mai et du 2 juin, par Gardembas.

[41] Précis des événements qui ont eu lieu dans le département de l'Eure, après les journées du 31 mai et du 2 juin, par Gardembas.

[42] Mémoires de Louvet, p. 102.

[43] Mémoires de Louvet, p. 102.

[44] Mémoires de Louvet, p. 103. — Recherches sur les Girondins, p. 82, en tête des Mémoires de Buzot.

[45] Biographie universelle.

[46] Biographie universelle.

[47] Mémoires de Louvet, p. 103

[48] Allusion à un mot reproché à Marat dans la journée du 2 juin.

[49] Bibliothèque historique de la Révolution, — 652-3. British Museum.

[50] Voyez les chapitres précédents.

[51] Biographie universelle.

[52] Toulongeon, t. II, septième époque, p. 259.

[53] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 149.

[54] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 151.

[55] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 152.

[56] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 153.

[57] Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 151.

[58] Voyez les Mémoires de Guillon de Montléon, t. I, p. 280.

[59] Rapport de Cambon, 8 juillet 1793.

[60] Rapport de Cambon, 8 juillet 1793.

[61] Rapport de Cambon, 8 juillet 1793.

[62] Toulongeon, t. II, septième époque, p. 241.

[63] Rapport de Cambon, 8 juillet 1793.

[64] Le Républicain français, n° 207, cité par les auteurs de l'Histoire parlementaire, t. XXVIII, p. 160.

[65] Page 408, ubi supra.

[66] Convention, séance du 15 juin 1793.

[67] Séance du 6 juin 1795.

[68] Histoire parlementaire, t XXVIII, p. 202.

[69] Histoire parlementaire, t XXVIII, p. 202.

[70] Histoire parlementaire, t XXVIII, p. 203.

[71] Séance du 24 juin 1793.

[72] Séance du 24 juin 1793.

[73] Mémoires de Buzot, p. 191 et 192.

[74] Mémoires de Buzot, p. 191 et 192.

[75] Voyez, à la suite des Mémoires de Meillan, la note F.

[76] Mémoires de Garat, t. XVIII, p. 407, de l'Histoire parlementaire.

[77] Bulletin des autorités constituées, réunies à Caen : Voyez la note E, p. 241 et suiv. des Mémoires de Meillan.

[78] Mémoires de Meillan, p. 241.

[79] Mémoires de Meillan, p. 250.

[80] Mémoires de Meillan, p. 253.

[81] Mémoires de Meillan, passim.

[82] Mémoires de Meillan, p. 259. — Ce document se trouve aussi dans la Bibliothèque historique de la Révolution. — 652-3. — British Museum.

[83] Toulongeon, t. II, huitième époque, p. 386. In-4°.

[84] Toulongeon, t. II, huitième époque, p. 386. In-4°.

[85] Mémoires de Levasseur, t. I, chap. V, p. 208.

[86] Pour éviter toute confusion dans le récit, et vu l'importance de ce qui se rattache à la Constitution de 1793, nous lui avons consacré un chapitre à part. Elle fut achevée le 23 juin, et Hérault de Séchelles en donna lecture définitive le 24.

[87] Toulongeon, t. II, huitième époque, p. 287, in-4°.

[88] Toulongeon, t. II, huitième époque, p. 287, in-4°.

[89] Précis de ce qui s'est passé dans le département de l'Eure, après les journées des 31 mai et 2 juin, par Gardembas.

[90] Précis de ce qui s'est passé dans le département de l'Eure, après les journées des 31 mai et 2 juin, par Gardembas.

[91] Précis de ce qui s'est passé dans le département de l'Eure, etc., ubi supra. — Les Mémoires de Louvet ne présentent pas les choses tout à fait de la même manière ; mais Louvet ne pouvait pas être aussi bien informé de ce qui se passait à Évreux, qu'un notable de cette ville, qui était sur les lieux et qui avait été mêlé de sa personne au mouvement.

[92] Mémoires de Louvet, p. 107-109.

[93] Voyez sur ce point Toulongeon, t. II, huitième époque, p. 289.

[94] Mémoires de Louvet, p. 128.

[95] Mémoires de Buzot, chap. I, p. 144.

[96] Mémoires de Buzot, chap. I, p. 144.

[97] Mémoires de Meillan, p. 139.

[98] Biographie universelle.

[99] Mémoires de Louvet, p. 156. — Mémoires de Meillan, p. 121.

[100] Mémoires de Meillan, p. 122.

[101] Voyez les Mémoires de Louvet et ceux de Meillan, passim.

[102] Mémoires de Meillan, p. 130 et 131.

[103] Mémoires de Louvet, p. 165 et suiv.

[104] Mémoires de Louvet, p. 191.