LE ROI LOUIS XIII À VINGT ANS

 

CHAPITRE VII. — LA PETITE REINE.

 

 

Louis XIII et Anne d'Autriche. — Physique de la reine ; son caractère inconsistant : ses imprudences. — Louis XIII ne l'aime pas. — Existences séparées du ménage royal. — Les Espagnols qui entourent la reine. — La jeune duchesse de Luynes ; mauvais conseils et mauvais exemples qu'elle donne à Anne d'Autriche : elle cherche à séduire Louis XIII. — La question de la naissance d'un dauphin, affaire importante dont toute la cour s'occupe ainsi que les gouvernements étrangers. — Eloignement de Louis XIII pour Anne d'Autriche : le nonce, l'ambassadeur d'Espagne, l'entourage pressent le roi ; résistance de celui-ci ; Luynes réussit ; moyens qu'il emploie, 1610. — Transformation dans les sentiments du ménage ; affection réciproque, tendresse ; lettres que Louis XIII écrit à la reine. — La crise de 1622 ; Madame de Luynes en est cause ; sévérité de Louis XIII ; Anne d'Autriche froissée : l'indifférence reparaît : mesures de défiance prises par Louis XIII. — La présence de la belle-mère, Marie de Médicis, achève d'aigrir les rapports du roi et de la reine.

 

A côté de sa mère, qui allait plus tard lui causer encore tant d'autres soucis, il était, auprès de Louis XIII, une seconde princesse dont le roi, au cours de son règne, ne devait pas mieux avoir à se louer, la jeune reine Anne d'Autriche.

Tous deux du même âge, — elle l'aînée de cinq jours. — ils avaient été mariés en 1615 à quinze ans, par politique[1]. Après s'être regardés sans trop se comprendre, ils s'étaient mis à vivre côte à côte, en frère et sœur, dans le cadre d'une existence royale dont le protocole réglait le programme journalier. Les portraits à cette date de celle qu'on appelait la petite reine font penser qu'elle devait être jolie. De taille moyenne, mince, avec de beaux yeux mêlés de vert, au regard un peu court, les cheveux blonds, abondants, frisés et bouclés, la peau blanche, la bouche petite et vermeille, elle passait pour une des plus grandes beautés de son siècle, affirmait madame de Motteville, avec exagération sans doute. On lui trouvait en réalité le nez un peu gros, les yeux un peu grands, le teint douteux ; mais elle avait le tour du visage exquis, le front bien fait, le pied petit : c'était une princesse agréable[2]. Louis XIII, au moins, la jugeait telle : il questionnait son entourage, désirait qu'on lui dît que la reine était belle, se préoccupait de savoir si elle n'était pas un peu menue et, lorsqu'on le niait, révélait qu'elle portait des patins pour se hausser[3] ; quant à l'aimer il n'y songeait pas.

Elle avait une voix désagréable, un ton de fausset aigre, élevé et dur. Toutes les fois qu'elle parlait, le charme de sa fraîche beauté paraissait s'évanouir un peu sous l'effet de ce timbre déplaisant[4]. Elle était ensuite coquette, passait du temps à se parer, ce que Louis XIII n'appréciait pas[5]. Aux ballets, dans lesquels, elle figurait en bonne place, elle s'appliquait à jouer son rôle avec une grâce séduisante, indice, croyait-on, de tendances peu sérieuses. Surtout son esprit et son caractère laissaient à désirer. Elle n'était pas très intelligente. Froide, indifférente, elle donnait l'impression d'une personne dédaigneuse, ce qui n'était chez elle que l'effet d'un défaut de souplesse : elle n'attirait pas la sympathie. Le cardinal de Retz la trouvera plus tard intéressée, dure, rancunière, opiniâtre. Madame de Motteville la déclarera entêtée. Elle manquait d'ordre ; elle se montrait tour à tour trop bavarde ou trop méfiante, égoïste, orgueilleuse, avare. Retz la traite de sotte ; — sa partialité le rend, il est vrai, suspect. — Madame de Motteville, mieux disposée, atténue l'expression en disant, qu'Anne d'Autriche s'est trop défiée de son esprit et de sa raison[6]. Ce qui est certain c'est qu'on n'avait pas grande idée de ses moyens. Si quelque ambassadeur venait lui faire la révérence, quoiqu'elle parlât bien le français, elle était incapable de répondre et l'introducteur, M. de Bonneuil, devait prendre pour elle la parole[7]. Tout le monde s'accorde à reconnaître qu'elle était ignorante, paresseuse, indolente. C'était une Espagnole, avec les défauts de la race : l'insouciance tranquille, la passivité. Son entourage se plaignait de la voir s'attacher à une ou deux intimes et ignorer les autres ; il regrettait qu'elle n'aimât personne, qu'elle ne parut pas assez touchée de l'amitié qu'on avait pour elle. En revanche, prenait-elle quelqu'un en grippe, elle se montrait vindicative. Puis on s'étonnait que, fière comme elle l'était, elle ne craignît pas de causer familièrement avec des gens du commun, fort indignes de son entretien ; par là elle se faisoit du tort[8].

Reine et jolie, elle a provoqué des passions. Elle était trop froide pour y répondre, mais assez coquette pour en être flattée et s'en amuser. On n'a rien articulé contre elle, au moins jusqu'à Buckingham qui est venu après 1624. La vertu de la reine est solide, disait-on, et sans façon. C'est un ange, assurait l'ambassadeur d'Espagne, Giron, qui répondait de la princesse au roi son maître[9]. La cour s'était divertie du fol amour qu'avait éprouvé pour elle le grand écuyer, M. de Bellegarde, un bel homme, qui avait, vers 1620, plus de cinquante-cinq ans. Anne l'avait laissé dire, riant de ses airs, et ménageant le gentilhomme favori de deux rois, survivant d'un siècle de galanteries et de dames[10]. Le duc de Montmorency éprouvera une passion semblable. D'autres amoureux se feront comprendre. Je puis dire qu'elle a été aimée, affirmait madame de Motteville, et que malgré le respect que Sa Majesté inspire, sa beauté n'a pas manqué de toucher des cens qui ont fait paraître leur passion. Personne ne reçut d'espoir ; c'était beaucoup qu'elle écoutât. Plus tard, causant de ces souvenirs avec une amie, elle se moquoit de sa vanité passée[11].

Elle se donnait plus de liberté dans les propos. Une personne de son entourage disait d'elle : Elle est modeste sans être choquée de l'innocente gaieté. Cette innocente gaieté était la forme par laquelle se traduisait son esprit porté à la galanterie : terrain plissant et dangereux ! Des intimes imprudemment acceptées, une compagnie de dames et de princesses imposées par les rapports de famille formeront autour d'elle un groupe au passé suspect, aux manières peu retenues. Il y aura des histoires, des scènes, des mesures prises.

 

Esprit sérieux et réfléchi, Louis XIII ne pouvait guère éprouver d'attachement pour une nature aussi contraire à ses goûts. Après une première minute de surprise agréable au moment de son mariage, il s'était replié sur lui-même[12]. Anne l'aimait-elle ? Elle crut qu'elle l'aurait aimé. Le roi était fort beau, disait une de ses confidentes, fort bien fait et sa beauté brune ne déplaisait pas à la jeune reine. Je crois que de la façon dont j'en ai ouï parlé, elle l'auroit fort aimé si le malheur de l'un et de l'autre et celte fatalité quasi inévitable à tous les princes n'en eut disposé autrement[13]. Il y a eu de leur faute à tous deux dans cette fatalité. Mais peut-être Anne a-t-elle eu la plus grosse part. Un peu de grâce et de tendresse chez elle, à l'égard du prince, l'eussent ramené. Pourquoi demeurait-elle devant lui nonchalante, réservée, pleine de méfiance ? Le jeune prince s'irritait et s'éloignait. Au fond il ne l'appréciait pas : tout le monde le remarquait[14]. D'après le duc de Rohan, il éprouvait même de l'aversion[15]. Anne avouait dans la suite que l'indifférence témoignée par le roi à son égard lui avait fait penser que le prince ne l'avait jamais aimée[16].

Leurs existences étaient séparées. Vivant chacun dans leur appartement, au Louvre, ils ne se voyaient que deux ou trois fois par jour, un quart d'heure, une demi-heure, à intervalles fixes : visites cérémonieuses, prescrites par les usages royaux et où ils n'avaient pas grand chose à se dire. C'était avant le dîner et le souper, généralement, que le roi se rendait chez la reine. Ils ne prenaient pas leurs repas ensemble. Si Louis XIII s'absentait de Paris, il laissait sa femme. Parfois celle-ci venait le rejoindre à Saint-Germain, mais c'était pour y retrouver la vie froidement protocolaire, dans son appartement, avec les visites journalières réglées. La reine était-elle souffrante d'une maladie qui lit craindre la contagion ? La faculté interdisait au roi l'accès de l'appartement. En novembre 1618 Anne eût la rougeole ; Louis XIII passa près de vingt jours sans la voir[17].

Pour l'ambassadeur d'Espagne, leurs rapports étaient aigres[18]. Louis XIII n'admettait pas que sa femme lui fit de recommandations. Si elle se hasardait, elle était obligée de prier M. de Luynes d'atténuer auprès du roi l'effet de la démarche[19]. Un jour où le roi s'était rendu à Lésigny, Anne vint inopinément le rejoindre. Louis XIII lui manifesta un tel mécontentement, sous prétexte qu'il n'y avait pas assez de place dans le château, qu'elle dut repartir le lendemain. A son retour à Paris, le roi étant allé la voir dans sa chambre, la trouva sombre et taciturne. Il ne fit rien pour la ramener. La dame d'honneur cherchant à raccommoder les choses, envoya au roi, de la part de la reine, un bouquet de fleurs avec quelques mots aimables ; Louis XIII ne répondit pas[20]. Au peu de sympathie des natures devaient s'ajouter beaucoup de malentendus : nombre de négligences inattentives du roi accentuaient le désaccord. Ce qui achevait de les tenir éloignés, était la présence, autour de la reine, de certaines personnes, nouvelles causes de mésintelligence et de querelles, d'abord les dames et serviteurs espagnols imposés à Marie de Médicis au moment du mariage de son fils, en 1615, et formant à la porte du cabinet du roi un groupe hostile qui épiait, écoutait, puis instruisait la cour d'Espagne. Depuis sa plus tendre enfance le roi haïssait les Espagnols : c'était l'ennemi héréditaire.

Une cousine du duc de Lerme, la comtesse de la Torre, dirigeait ce personnel, sur des instructions venues de Madrid[21]. Louis XIII reprochait aux espagnols d'exploiter Anne d'Autriche, de lui extorquer ses revenus ; il redoutait l'apparition de quelque favori qui recommençât l'histoire du maréchal d'Ancre ; il croyait que la reine était, par l'intermédiaire de l'ambassadeur d'Espagne et de cet entourage, entre les mains de la cour de Madrid[22]. De fait, l'ambassadeur d'Espagne se trouvait constamment au Louvre, conseillait Anne d'Autriche, tenait son souverain au courant des incidents de sa vie[23]. Le lendemain de la mort de Concini, on avait cherché à l'écarter : il avait répondu qu'il venait au château, comme majordome de la reine régnante, ce qui lui avait valu cette réponse qu'on ne connaissait pas cette charge en France et qu'il eût à se renfermer dans son rôle d'ambassadeur[24].

En même temps que lui, écrivaient régulièrement en Espagne, la comtesse de la Torre, le confesseur, Francisco de Arriba[25], puis Anne d'Autriche elle-même. On le lui a reproché : nous avons de ses lettres ; ce sont des billets sans grande importance ; son père, qui l'aimait beaucoup, lui donnait de ses nouvelles, lui envoyait de l'argent ; elle écrivait aussi à son frère, le futur Philippe IV, au duc de Lerme, au duc d'Olivarès ; elle avait des courriers spéciaux[26]. Inquiet de cette correspondance, Louis XIII soupçonnait sa femme de connivence avec ses ennemis : il lui échappa de le dire. Anne se récriait. Au moment où la cour d'Espagne se dérobait à ses engagements au sujet de la Valteline, Louis XIII disait à la reine : Ecrivez au roi votre père et dites à l'ambassadeur d'Espagne que je suis résolu à vouloir l'exécution du traité de Madrid, ou qu'autrement j'y emploierai toute ma puissance : et la reine étonnée répondait que puisque Sa Majesté le commandait elle écrirait au roi d'Espagne et parlerait à l'ambassadeur, mais qu'elle le suppliait de croire qu'elle n'était pas Espagnole, qu'elle était toute Française[27]. Pense-t-on, disait-elle à son entourage, que, parce que je suis née en Espagne je sois Espagnole ? On se trompe, je suis Française et ne veux être autre. A Luynes elle répétait : Il n'y a rien au monde de si conjoints que mes intérêts avec ceux du roi[28].

En décembre 1618 Louis XIII chassa les Espagnols. Ce fut toute une affaire. Anne d'Autriche témoigna beaucoup d'affliction, puis se consola[29]. Les étrangères parties, le roi avait nommé comme surintendante de la maison de la reine la femme du duc de Luynes, Marie de Rohan, et, comme dame d'atour, la sœur du favori, madame du Vernet. Il n'allait pas mieux s'en trouver[30].

La duchesse de Luynes était cette future duchesse de Chevreuse, la sémillante personne qui remplira la moitié du XVIIe siècle du bruit de ses galanteries et de ses aventures. Agée de dix-huit ans, jolie, friponne, éveillée, d'humeur fort indépendante, elle joignait une légèreté charmante à beaucoup de grâce provocante[31]. Après avoir éprouvé une vive contrariété de cette nomination, à cause du duc de Luynes qu'elle détestait, en raison de la place excessive qu'il tenait dans le cœur du roi, Anne d'Autriche avait fini par accepter la nouvelle surintendante[32]. Celle-ci s'était d'ailleurs chargée de gagner sa cause. Du même âge que la souveraine, vive, impétueuse, pleine de gaîté, elle amusait la reine. Elle se montrait prévenante pour le couple royal, L'invitait à dîner. Anne d'Autriche se prit de sympathie [tour elle, puis d'amitié : leur intimité grandit. Lorsqu'en décembre 1620 la duchesse de Luynes mettra au monde un fils, la reine la veillera[33].

Richelieu accuse les Luynes d'avoir abusé du pouvoir qu'ils exercèrent, chacun de leur côté, sur le ménage royal pour tenir les époux éloignés l'un de l'autre afin de demeurer les maîtres. Madame de Motteville écrit que le malheur d'Anne d'Autriche étant de n'avoir pas été assez aimée du roi son mari, elle avait été forcée d'amuser son cœur ailleurs, en le donnant à des dames qui en avoient fait un mauvais usage et qui, au lieu de la convier à rechercher les occasions de plaire au roi, l'en éloignèrent autant qu'il leur fut possible afin de la posséder davantage[34].

Les Luynes, au contraire, commencèrent par employer leur influence à servir d'intermédiaire entre les deux époux. Revenant un peu de ses préventions contre le duc, au moins extérieurement, car au fond, elle ne lui pardonna jamais, Anne consentit à faire meilleur mine à celui-ci. Elle se servit de lui pour communiquer avec le roi ; elle lui demandait des conseils. Tout heureux, le favori lui écrivait, la mettant au courant de ce qui se passait auprès du prince. Ce fut un échange de bons procédés[35].

Mais, rieuse, légère, madame de Luynes, n'avait aucune consistance : Jamais personne n'a moins fait d'attention sur les périls et jamais femme n'a eu plus de mépris pour les scrupules et pour les devoirs, a dit quelqu'un qui l'a bien connue[36]. Elle se montrait inconsidérée. Très sévère pour elle, Richelieu dit quelle était la honte du roi, la perte de la reine dont le bon naturel était forcé par son mauvais exemple[37]. Madame du Vernet, la dame d'atour, n'était pas plus sérieuse : on l'accusera plus tard d'avoir été d'intelligence avec Buckingham et d'avoir facilité les entrevues du gentilhomme anglais avec la reine[38]. A côté de ces dames en étaient d'autres, aussi peu pondérées, achevant le cercle intime d'Anne d'Autriche : Mlle de Verneuil, sœur naturelle du roi ; surtout la princesse de Conti, personne aux mœurs faciles, à la plaisanterie risquée, dont Louis XIII qualifiera plus lard d'un mot assez dur le rôle d'entremetteuse jouée par elle auprès de la duchesse de Chevreuse et que, dans ses lettres chiffrées il désigne du pseudonyme significatif de le péché[39].

Ce groupe exerça sur Anne d'Autriche une influence détestable. Il n'y eut dans l'entourage de la reine que des conversations légères à propos de l'amour ; on émoussa la conscience de la princesse ; on lui fit lire le Cabinet satyrique, publication qui venait de paraître et d'un genre libre. Peu à peu se répandit le bruit à la cour que le salon de la reine était un endroit fort plaisant, où l'on causait licencieusement et où on usait sans retenue, de mots contraires à la modestie et aux convenances[40]. Les dames s'amusaient des passions que la reine pouvait provoquer, les encourageaient, poussaient M. de Bellegarde à des familiarités au moins puériles. C'est ainsi que la petite reine allait être conduite à prêter une oreille complaisante aux propos séducteurs de Buckingham[41].

Puis, futile et malicieuse, la duchesse de Luynes non contente de donner des conseils, prêcha d'exemple. Ne s'avisa-t-elle pas de s'en prendre à Louis XIII lui-même ? Quelque froid qu'il fût, le jeune roi ne pouvait être indéfiniment insensible aux charmes d'une coquetterie entreprenante. Justement, en juillet 1617, la cour avait été agitée par l'annonce que le prince regardait avec une attention émue certaine demoiselle d'honneur de la reine, mademoiselle de Maugiron. Le nonce s'en était inquiété. Les Luynes, peut-être par intérêt personnel, s'étaient empressé d'éloigner mademoiselle de Maugiron en la mariant très loin, en Dauphiné. Devenue jalouse et souffrant vivement quand elle voyait le roi causer et plaisanter avec la demoiselle d'honneur, Anne d'Autriche les avait secondés. Louis XIII n'avait rien dit[42]. Pour elle-même, la duchesse de Luynes s'y prit adroitement : le roi s'entretenait volontiers avec elle, riait, badinoit ; elle l'enveloppa. Ce fut Anne d'Autriche, la première, qui remarqua les nuances : elle en éprouva une amère douleur. Le nonce, qui nous en informe, assure que ces craintes étaient exagérées. Tout le monde épiait. L'ambassadeur d'Espagne, intéressé à savoir, niait ; il conseillait à Anne d'Autriche d'agir avec prudence, de dissimuler lorsqu'elle voyait que les visites du roi à la duchesse ou ses conversations avec elle étaient trop fréquentes. Anne, désolée, pleurait à chaudes larmes, disant qu'elle était la plus malheureuse femme du monde, la plus misérable : n'était-ce pas la mépriser que de témoigner à madame de Luynes ses préférences devant elle, de lui marquer des attentions dont elle-même avait été sevrée jusque-là ? On découvrit que la petite reine était passionnée. Le nonce interrogeait le confesseur du roi, le P. Arnoux, qui l'assurait que le cœur du prince était pur. Mais comment le croire lorsqu'on voyait le roi, arrivant à Paris après un long voyage et entrant au Louvre, faire à la reine une courte visite, pour, de là, monter chez la duchesse de Luynes, encore au lit, à la suite de la naissance récente d'un fils, et lui témoigner une très tendre affection[43] ? Sans doute le P. Arnoux avait raison, car lorsque le duc de Luynes sera mort, toute cette sympathie réelle ou simulée s'évanouira pour ne plus laisser place qu'à une animosité étrange. Au moins si madame de Luynes avait tant contribué avec l'entourage à tenir brouillé le ménage du souverain', le duc, avant de disparaître, avait-il, par une compensation signalée, rendu au couple royal et au royaume un considérable service.

 

Célébrant dans leurs écrits les grandeurs de la maison royale, les poètes du temps regrettaient amèrement l'absence d'un Dauphin ; il l'appelaient de leurs vœux[44] ; la cour le désirait ; le peuple l'attendait. Les sentiments réciproques du roi et de la reine, hélas ! ne rendaient guère vraisemblable l'événement souhaité. Sans doute les moralistes vantaient la tenue exemplaire du roi. Combien il était différent de son père Henri IV ! Lui, au moins, montrait une vertu angélique[45]. Malheureusement cette vertu était poussée à un trop haut degré. L'entourage, le monde diplomatique, gouvernement et royaume commençaient à s'inquiéter. Il s'agissait du trône et de sa succession. En cas de mort du roi, n'était-on pas menacé de voir se renouveler les difficultés sans nombre qu'avait causées à la fin du dernier des Valois l'absence d'héritier direct ? Et chacun jasait. Les ambassadeurs étrangers entretenaient leurs gouvernements de l'état étrange de ce jeune couple royal qui était marié sans l'être : affaire grave et délicate ! Elle allait prendre peu à peu l'importance d'un événement, provoquer des négociations, amener des échanges de dépêches de cour à cour[46].

Chez Louis XIII le sentiment dominant était une répulsion invincible. Doué de peu d'imagination, d'esprit positif, de tempérament paisible, il montrait aussi peu de disposition que son père avait manifesté de violence. Pas plus Anne d'Autriche qu'une autre n'aurait pu émouvoir ce garçon calme, qu'un sentiment religieux prononcé gardait contre toute surprise. Il s'était fait des idées sévères. Il jugeait — et il l'écrira plus tard — qu'il devait donner l'exemple à son royaume, s'abstenir d'un sentiment quelconque susceptible de provoquer le scandale, veiller jalousement sur lui-même[47]. Il pourra être touché ; il l'a été sûrement ; il n'eût jamais voulu dépasser certaines limites, comme il ne les a jamais dépassées. Mais le résultat d'une pareille discipline de cette obligation qu'il s'était faite à lui-même de chasser de sa pensée toute image de nature à troubler son cœur, avait été de réduire en lui jusqu'à la moindre flamme d'amour. Il n'admettait pas d'autre manière d'être avec le prochain que celle à laquelle la vie coutumière de chaque jour l'avait habitué. En fait il se trouvait aussi éloigné que possible d'Anne d'Autriche. Son confesseur, le P. Arnoux, causant de ce sujet avec le nonce, désignait d'un mot l'état d'esprit du jeune roi : Il avait honte[48]. Et cette honte avait trop facilement raison de tendances qui, si elles se produisaient, étaient atténuées, ou arrêtées, par la crainte du péché. Dans sa conscience scrupuleuse, en effet, le prince faisait difficilement le départ de ce qui était faute et de ce qui ne l'était pas. Il étendait indéfiniment le champ défendu et son confesseur ne laissait pas que d'en conclure des réflexions inquiètes : son père a commencé lard, disait-il, puis il a suppléé par trop d'excès le reste de sa vie : plaise à Dieu que le fils ne l'imite pas, au moins pour la seconde partie de son existence[49]. Et alors il jugeait de son ministère d'appeler, en confession, l'attention du prince sur les véritables devoirs que lui imposaient les conditions dans lesquelles il se trouvait. Il insistait ; sobrement il énumérait les raisons, calmait les scrupules, appuyait sur les meilleurs arguments : Louis XIII répondait évasivement qu'il voulait sans doute beaucoup de bien à la reine, qu'il savait quels étaient ses devoirs et n'avait pas l'intention de s'y soustraire ; qu'à vrai dire, même, il avait eu plusieurs fois la pensée d'y songer ; mais enfin ils étaient jeunes tous deux — dix-huit ans, — il n'y avait pas de temps perdu ; puis, ne se trouverait-il pas des inconvénients à trop se hâter : n'en pouvait-il pas résulter, en raison de leur jeunesse, des conséquences préjudiciables ou dangereuses ? Et le nonce Bentivoglio, auquel le P. Arnoux rapportait ces confidences, répondait en invoquant le grand bien de la chrétienté : que le confesseur revint à la charge, qu'il multipliât ses instances, qu'il employât ses bons offices à assurer la stabilité de ce mariage ; c'était le vœu de tous et nul n'y pouvait mieux réussir que lui : le P. Arnoux promettait[50].

Mais alors, pressé de nouveau, Louis XIII invoquait mille prétextes. Puis fatigué, il se confiait, il avouait : le souvenir pénible qui lui était demeuré d'une velléité, d'ailleurs inutile, en 1615, à Bordeaux, après son mariage, lui avait laissé d'insurmontables appréhensions. Il répétait qu'il se croyait trop jeune, qu'il n'éprouvait que de l'éloignement et le confesseur insistait encore disant qu'il n'était pas possible de différer indéfiniment, que l'opinion ne pourrait admettre de pareils atermoiements[51].

Tout le monde s'y mit. Au nom du roi d'Espagne, l'ambassadeur Monteleone vint appuyer de ses instances ; son maître, déclarait-il, ne désirait rien tant que de voir la reine régnante, sa fille, dans les bonnes grâces du roi. Louis XIII répondait toujours qu'ils étaient trop jeunes, qu'il fallait attendre. Monteleone offrait alors des choses extravagantes, de faire apprendre à la petite reine à se montrer aimable pour lui, à le séduire, ou bien à user de prières et de larmes. Le roi agacé répliquait qu'il ne voulait pas. Le soir de cette conversation, Louis XIII se trouvait dans l'appartement de la reine ; au moment où il allait prendre congé, les dames de l'entourage d'Anne d'Autriche essayèrent de le décider à rester ; il refusa ; elles le supplièrent ; il parut impatienté ; les instances en vinrent à ce point qu'il se dégagea vivement, prononça quelques mots durs et sortit. Le lendemain, la comtesse de Soissons était obligée d'aller le trouver, afin de calmer sa colère et d'expliquer que la démarche de la veille était causée par l'ardent intérêt que ces dames portaient à leur souveraine. Laissons faire le temps, disait le nonce mélancoliquement[52]. C'était Luynes qui allait réussir.

Ne perdant pas courage, le P. Arnoux qui, à chaque confession, répétait ses conseils, disait à Bentivoglio, en décembre 1617, que le duc de Luynes se décidait à joindre ses efforts aux siens[53]. On crut qu'en janvier 1618 on allait aboutir. Les gens de la cour s'interrogeaient. Si le roi avait tant d'appréhensions, déclaraient quelques-uns, que ne s'adressait-il d'abord à des complaisances faciles, déjà éprouvées, qui ne demanderaient pas mieux que de lui donner l'assurance nécessaire ; on le lui conseillait. Mais le confesseur se récriait scandalisé : il n'était pas possible que Sa Majesté tombât dans un tel péché ! Le roi était de cet avis. Alors, dédaigneuses, les dames espagnoles de la maison d'Anne d'Autriche, qui étaient encore là, assuraient que Louis XIII ne valait rien : Matière un peu délicate, s'excusait le nonce, en envoyant ces détails au pape ; c'est pourquoi j'ai voulu en écrire en particulier à Votre Sainteté[54].

Mais, pendant ce temps, timide et émue, la pauvre petite reine, au courant de ce qui se passait, sentait obscurément grandir en elle un attachement mystérieux pour le mari qui semblait ainsi la fuir. Une affection troublante l'envahissait, résultat de l'attente. Comme fasciné, son cœur se tournait vers le roi. On remarquait qu'elle tenait maintenant à paraître plus belle pour lui, qu'elle le regardait longuement ; on constatait aussi que peu à peu Louis XIII devenait plus aimable, esquissait de vagues caresses, s'attardait ; puis tous deux s'arrêtaient : Quelquefois ils eussent voulu s'engager davantage : la honte retenait leurs désirs[55].

L'été de 1618 passa. Louis XIII en restait toujours à de vagues paroles. Parfois de nouveaux indices faisaient espérer, puis la réalité démentait. Les ambassadeurs étrangers annonçaient à leurs cours une date fixe, ensuite avouaient qu'ils s'étaient trompés. On supputait quels étaient ceux qui pouvaient désirer l'événement, ceux qui pouvaient le craindre[56]. Le renvoi des dames espagnoles fut le prétexte d'une sorte de promesse. Au nom du roi, Luynes dit à l'ambassadeur d'Espagne que, si elles s'en allaient, le roi se déciderait : Cela était certain, affirmait Luynes à Fernando Giron, parce que le roi me l'a promis et qu'il tiendra sa parole. Les Espagnoles s'en allèrent. Le 17 janvier 1619 Giron mandait au roi Philippe III : Voilà quarante-huit jours que la comtesse de la Torre est partie ; le roi et la reine vivent toujours en frère et sœur ![57] Luynes tenait bon. Il avait cru pouvoir profiter de l'incident, il avait échoué ; il allait chercher à en utiliser d'autres, et, cette fois, aboutir.

En ce mois de janvier 1619, avait lieu le mariage de la sœur de Louis XIII, Chrétienne, avec le prince de Piémont. On assaillit le ménage royal de demi-mots discrets. Le nonce dit au roi, en plaisantant : Je ne crois pas, Sire, que vous voudrez recevoir cette honte d'avoir un neveu avant que Votre Majesté ait un dauphin ! Le roi rougit et répondit en riant avec bonne grâce qu'en effet il ne pensait pas recevoir cette honte[58]. L'observation l'avait touché. On crut remarquer que les égards qu'il avait pour la reine devenaient plus nuancés, qu'il éprouvait de plus en plus de plaisir à venir la voir, à rester avec elle. Luynes pressait. Il prit une singulière résolution. Le dimanche 20 janvier, on célébrait le mariage d'une autre sœur du roi, celle ci fille naturelle d'Henri IV, mademoiselle de Vendôme, avec le duc d'Elbeuf. Suivant les usages royaux, le souverain devait accompagner le jeune couple chez lui, le soir, dans sa chambre, puis, les rideaux du lit tirés, s'en aller. Le duc n'eut-il pas l'extraordinaire idée de décider le roi à rester ? Un ambassadeur donne des détails et ne paraît pas autrement choqué. Mademoiselle de Vendôme riait et concluait par de bons conseils. Louis XIII fut ému[59].

Le 25 au soir, devant ses résistances dernières, Luynes prit le parti d'en finir. Il était onze heures, le roi était sur le point de se coucher ; il le prit par le bras, l'entraîna dans la chambre de la reine et le poussa, puis ferma la porte[60] !... Triste privilège des existences royales ! La scrupuleuse conscience d'un médecin exact consignant jour par jour les moindres détails de la vie de son souverain, susceptibles de servir à l'étude de sa santé, ne met pas le ménage royal à l'abri des pires indiscrétions de l'histoire ! Le lendemain, officiellement, tous les ambassadeurs étrangers étaient prévenus de l'heureuse nouvelle et priés de la transmettre à leurs gouvernements respectifs : au dire d'Héroard, la communication n'était pas encore tout à fait exacte. Mais, par une transformation inattendue, sans autre insistance, Louis XIII se décidait maintenant de lui-même : et, le 18 mai, Anne d'Autriche pouvait enfin déclarer, comme une autre reine de la fin du siècle suivant, placée dans des circonstances analogues, qu'elle était décidément reine de France ![61]

Ce fut une joie universelle. Les ambassadeurs accueillirent la notification avec un contentement extrême et donnèrent à leurs cours les détails nécessaires. Celui d'Espagne mandait au roi Philippe III qu'il s'en félicitait d'autant plus que l'événement allait, sans aucun doute, procurer plus d'influence à la reine, ce qui permettrait d'utiliser efficacement son intermédiaire pour les négociations futures[62]. Des courriers avaient été expédiés. La cour en a éprouvé une grande satisfaction, mandait le nonce au Saint-Siège, parce qu'ainsi le ménage royal est consolidé : on peut croire qu'il n'en résultera que du bien non seulement pour la France, mais encore pour le reste de la chrétienté[63]. Le secrétaire d'Etat Puisieux, écrivit à tous les ambassadeurs de France : Les meilleurs nouvelles que je vous puisse mander par cette dépêche, expliquait-il à l'ambassadeur français à Rome, Simon de Marquemont archevêque de Lyon, est que le roi, depuis quatre jours a commencé... de quoi leurs Majestés ont reçu un réciproque contentement et le public une très grande consolation. Ce n'est pas une petite affaire et m'assure bien que M. le nonce n'aura oublié à l'écrire à Sa Sainteté à laquelle vous le devez confirmer comme un avis très important dedans et dehors le royaume. J'espère que ce bon commencement sera suivi d'effets très favorables et heureux[64]. Les correspondances particulières étaient remplies de l'expression du contentement public[65] : l'allégresse était justifiée.

L'événement en effet avait amené dans les rapports entre les deux époux comme une révolution. Ces deux êtres, jusque-là si étrangers l'un à l'autre, semblaient maintenant se reconnaître après un malentendu prolongé. Ils se témoignaient des trésors de tendresse ignorés l'un de l'autre. Profondément touché, Louis XIII avait dit, le lendemain du 25 janvier, à sa femme, qu'il l'aimait, qu'il lui faisait le serment de ne jamais aimer qu'elle, de lui rester fidèle, explosion touchante de cette sensibilité vive que les circonstances seules l'avaient empêché de montrer[66]. Et il tenait parole. La confiance, l'abandon faisaient place aux aigreurs précédentes. Le terrible Héroard indique en marge de son journal, par un petit signe cabalistique, certains points de repère dont la Faculté pourra ensuite avoir besoin afin de suivre avec précision l'existence de quelque futur roi de France. Cette extraordinaire statistique nous renseigne sur la constance des nouveaux sentiments de Louis XIII. Visiblement, aux appréhensions d'autan, avaient succédé des dispositions contraires. Suivant un protocole médical imposé pour des raisons de prudence et que les rois de France devront subir comme une partie de cérémonial obligatoire, des délais de quinzaine lui étaient imposés. Il s'y soumettait plus ou moins. Si le dauphin n'est pas venu, on ne peut le reprocher à Louis XIII[67].

La transformation fut surtout remarquable chez la petite reine. De froide et revêche, elle était devenue douce et bonne, abandonnée, cherchant une protection. Son caractère indolent paraissait s'éveiller et même attester quelque violence. Elle se montrait tendre pour Louis XIII, impatiente de le voir, attentionnée, souriante.

Ce fut une idylle. Le jeune roi, amoureux de la jeune femme, en oubliait ses plaisirs favoris, la chasse[68]. Il fut plein de sollicitude, d'égards : il était assidu. Sa Majesté, écrivait M. de Puisieux à M. de Léon, montre à la reine une affection très grande qui est capable d'effacer plusieurs petits sujets de mécontentement et d'assurer une vraie amitié et intelligence pour la chose publique[69]. Quelques mois après on crut pouvoir parler d'espérances : l'émotion était vive ; elle devait être de courte durée. Anne d'Autriche en éprouva une grande déception. Louis XIII lui manifesta plus de tendresse encore ; elle se conduisait avec un tact parfait et tout le monde l'aimait pour cette douceur et cette bonté qui étaient un peu nouvelles chez elle et qu'on appréciait d'autant[70]. A qui voulait l'entendre, Louis XIII répétait combien il aimait la reine. Par Luynes, il faisait dire à l'ambassadeur d'Espagne, afin que celui-ci n'en ignorât, et transmit la déclaration à Madrid, qu'il adorait Anne d'Autriche par dessus toutes les choses de ce monde, qu'il le lui témoignait de tout son pouvoir et que cela était notoire à tous. Si même sur un point quelconque le roi avait une légère observation à faire à sa femme, il priait Luynes de demander à l'ambassadeur d'Espagne de s'en charger : Rôle délicat, mandait Giron au roi d'Espagne, et de beaucoup d'importance, mais que je tâcherai de remplir au mieux des intérêts de Votre Majesté et de ceux de la reine très chrétienne ; tellement Louis XIII était soucieux d'écarter la moindre ombre de son bonheur. C'était la lune de miel[71].

Seulement, pour ce qui était des suites, rien ne se décidait. La reine régnante, se porte bien, écrivait Bentivoglio à Monteleone ; je lui demande souvent que fait M. le dauphin ; elle rougit, elle sourit et ne dit mot[72]. Beaucoup de gens osaient parler comme le nonce et la réponse était la même. Elle sourit, disait Contarini ; elle devient rouge et elle répond qu'il n'est que de s'en remettre à la volonté de Dieu[73]. Personne ne voulait croire que cela put durer : A quel propos, s'écriait Malherbe, nous imaginerions-nous une stérilité en un roi et une reine tous deux en la fleur de leur âge et tous deux d'une constitution excellente, qui s'aiment avec passion ![74] A la fin de cette année 1619, une seconde fois, l'espoir remplit de joie les cœurs ; il fut suivi d'une déception nouvelle, puis d'appréhensions terribles. Anne d'Autriche manqua mourir.

Elle était tombée malade à Saint-Germain et les médecins avaient déclaré que la princesse, présentant tous les signes d'un état intéressant, il n'y avait pas lieu de lui administrer de remède. Il avait été décidé qu'Anne assisterait aux fêtes organisées le 1er janvier pour la réception de nouveaux chevaliers du Saint-Esprit. L'ambassadeur Contarini, présent aux cérémonies, écrivait combien il avait été frappé de sa pâleur, de sa maigreur excessive, de son air languissant : Si je ne l'avais pas vu manger, ajoutait-il, je ne pourrais pas affirmer qu'elle fut morte ou vive[75]. Dans le courant du mois, elle voulut assister au ballet traditionnel de la Cour. Ce fut une fatigue extrême ; les forces l'abandonnèrent ; elle tomba ; une fièvre intense la prit, fièvre double tierce, ardente et aiguë, disaient les médecins. Elle eut le délire : on appliqua des ventouses sur les reins afin de le dissiper. L'inquiétude était générale. Neuf médecins ne quittaient pas la malade qu'entouraient princes, princesses, grandes dames de la cour empressées à la servir. On essaya de tous les remèdes : elle refusait de les prendre. On la saigna deux ou trois fois : loin de diminuer le mal ne faisait que croître. Le septième jour on la crut perdue. Dans l'appartement, les femmes sanglotaient. Au dehors, le public multipliait les prières, suivait des processions ordonnées pour la guérison de la souveraine, remplissait les églises afin de participer aux offices des quarante heures, entendait les messes spéciales dites à la Sainte Chapelle. Le onzième jour, un léger mieux se déclara ; le quatorzième la fièvre commença à décroître et le seizième il parut que la petite reine était sauvée ![76]

Celui qui avait montré encore le plus de douleur était Louis XIII. On ne le reconnut pas. Il fut pris de détresse ; il pleurait à chaudes larmes devant tout le monde, à ce point que l'ambassadeur d'Espagne, surpris, ne pouvait s'empêcher de trouver que ces larmes, quoique justes, n'étaient pas bien séantes à un roi. Il ne quitta pas le chevet de la reine, y demeurant jour et nuit, voulant servir la malade, lui tenant la main, lui disant de prendre courage qu'il n'y avait rien au monde qu'il ne fit pour elle, y allât-il de la moitié de son royaume ? et un sourire effleurait les lèvres de la reine. Ce fut lui qui l'exhorta à prendre les médicaments, qui insista, la supplia, jusqu'à se mettre à genoux : Anne, touchée, disait qu'elle voyait bien que le roi l'aimoit de tout son cœur. Il fit un vœu à Notre-Dame de Lorette ; Anne d'Autriche en ayant fait un à Notre-Dame de Liesse, il prit l'engagement d'aller lui-même le tenir. Il voulut qu'on apportât dans la chambre de sa femme les reliques de Saint-Denis, celles de Saint Charles, d'autres encore et prescrivit de dire des messes. Il renonça au protocole, refusa de dîner en public, décommanda toute cérémonie, répondant que sa douleur ne lui permettait rien, lorsqu'il se sentoit si particulièrement affligé. Anne en était attendrie. Entrant en convalescence et le jeune roi lui témoignant ainsi son affection, elle le regardait les yeux pleins d'amour, et, par reconnaissance, prenant la main du prince, la soulevait et la portait à ses lèvres : la figure de Louis XIII rayonnait d'une joie d'enfant[77].

La convalescence suivit, lente. Les neuf médecins se relayaient : quatre de la cour, quatre de la ville, et, les départageant, Héroard, le premier médecin du roi. Ceux de Paris voulaient qu'on saignât encore, ceux de la cour s'y opposaient ; Héroard n'osant pas décider, Louis XIII faisait venir un vieux médecin qui avait servi les rois précédents, lequel opinait qu'il était plus utile de remettre du sang dans les veines de la malade que de lui en retirer. Peu à peu Anne d'Autriche reprenait ; elle faisait distribuer de larges aumônes aux hôpitaux et aux monastères : les poètes célébraient sa guérison et des actions de grâces publiques s'élevaient vers le ciel[78]. Le souverain écrivait de tous côtés pour annoncer l'heureuse nouvelle ; il disait la joie qu'il en avait éprouvée : J'avais été grandement affligé de la maladie de la reine, mandait-il à sa sœur la princesse d'Espagne ; maintenant je reçois par ses meilleures dispositions un allégement incroyable. Je sais que vous y prendrez votre part[79].

La crise passée, les deux époux continuèrent à se manifester la même tendresse confiante, à faire preuve d'attention, de complaisance, de bonté. Une circonstance solennelle allait leur permettre de rendre témoin de leurs sentiments une foule considérable qui, ravie, acclama.

Le 17 mai de cette année 4620, avait lieu à la Place royale une grande parade dans laquelle Louis XIII devait courir la bague avec un certain nombre de seigneurs. Au jour dit, un dimanche, un public immense s'entassait derrière les barrières. Un échafaud, la loge royale, tapissée de velours violet, semé de fleurs de lys d'or, et sur lequel devait se mettre Anne d'Autriche entourée des grandes dames de la cour, avait été dressé. Aux fenêtres des hôtels de la place, garnies de tapis d'Orient, courtisans, princesses et seigneurs, en riches habits, se pressaient. A deux heures la reine arriva dans son carrosse de gala, accompagnée de la sœur du roi et de sa suite de dames. A trois heures s'avançait à son tour Louis XIII, vêtu de satin blanc, la tête ornée d'un grand panache de même couleur, monté sur un petit coursier blanc à la selle brodée d'or et d'argent ; il était précédé et suivi de chevaliers et de princes, escadron multicolore, brillant, qui caracolait. La petite troupe fît au pas le tour de la lice, saluée par les vivats de la foule, puis, aux sonneries des clairons et trompettes, — la bague posée sur une potence et qu'il s'agissait d'enlever au moyen d'une lance, en passant au galop, ayant été mise au point, — la course commença[80]. A la file, Louis XIII, M. d'Effiat, le prince de Condé, le comte de Soissons, les ducs de Guise, de Chevreuse, d'Elbeuf, une trentaine, s'élancèrent. Le marquis de Courtenvaux et Saint-Luc touchèrent. Il devait y avoir trois courses. A la deuxième et à la troisième le roi enleva la bague. Finalement ils se trouvèrent quatre ayant obtenu le même succès. Courtoisement, les trois champions déclarèrent laisser la palme au roi : Louis XIII refusa. Deux courses supplémentaires furent décidées : à la seconde Louis XIII enlevait l'anneau. Les acclamations de la foule saluèrent sa victoire. D'un geste aimable il se dirigeait vers son vieil écuyer Pluvinel, afin de montrer qu'il lai rapportait le mérite de ce succès, lorsque Pluvinel lui indiquant la loge royale fit signe de le conduire à la reine. La reine devait en effet donner au vainqueur le prix de la course : une bague d'or garnie d'un magnifique diamant. Anne d'Autriche, tout heureuse, avait les larmes aux yeux. Quand Louis XIII, arrivant au pied de l'échafaud, vit son émotion, déjà touché lui-même, il ne put se contenir, et sans souci du cérémonial ou de la tenue qui lui imposait Sa Majesté royale, il escalada rapidement les degrés, puis, d'un mouvement charmant, se jetant dans les bras de la petite reine, il l'embrassa. L'enthousiasme des assistants ne connut plus de bornes[81].

Durant les mois qui suivirent, ces dispositions se confirmèrent. Obligé départir en campagne pour rétablir l’ordre dans le royaume, Louis XIII écrivait à sa femme. Il ne faut pas attendre de lui des lettres nuancées : il a un style court et froid ; il donnait à la reine de ses nouvelles, la tenait au courant de ce qu'il faisait. Cependant sous des formes mal articulées la tendresse et la passion se faisaient jour : J'avais été, ce me semble, lui mandait-il, plus de temps que de coutume sans avoir de vos nouvelles ; cela me mettoit en peine, mon contentement étant d'en recevoir souvent. J'aime à voir ce qui vient de vous ; je vous prie de le croire et que l'écharpe que vous m'avez envoyée m'est aussi bien agréable ; je vous en remercie ; je réserve à la porter aux jours de la montre (la revue) générale de mon armée qui se fera mardi. J'espère qu'elle se verra en bon lieu et de témoigner que j'étais seul au monde digne de porteries faveurs venant de votre main[82]. Il pensait à elle : Il m'ennuie bien fort que vous soyez loin de moi[83]. Il désirait la retrouver : Je souhaite avec impatience de vous voir[84]. Il l'aimait : Je veux vous témoigner mon affection puisque je n'en ai point de plus grande en ce monde... Je pense souvent à vous et qu'il n'y a point d'objet capable de m'en divertir et que quelque compagnie que j'aie, vous êtes avec moi bien qu'absente plus que tous ceux qui me parlent à toute heure : c'est ce que je vous ai promis et que vous pouvez assurément attendre de mon affection... Près de vous est le lieu où je me plais le plus et que je quitte avec déplaisir[85]. Et Anne d'Autriche exprimant le désir de venir au devant de lui : Venez, venez aussi gaiement que vous serez attendue de moi qui souhaite passionnément de vous voir[86].

De la petite reine à Louis XIII, nous avons peu de lettres ; elles sont surtout pleines de soumission. Pourquoi écrit-elle de préférence à Luynes afin que celui-ci transmette au prince l'expression de ses sentiments ? C'est au duc qu'elle dit ses craintes, ses ennuis de voir la campagne se prolonger, qu'elle demande des assurances sur la rentrée prochaine du roi : Je m'attends à vos promesses d'être bientôt de retour, lui dit-elle, si ce n'est que vous meniez en Espagne cette grande armée ; je vous prie de croire que j'en ai grand peur[87]. Elle interroge : Vous avez si bien fait la bouche à tous ceux qui viennent ici qu'il est impossible de tirer d'eux aucune certitude de la venue du roi[88]. Nous devinons son affection à travers les lettres de Louis XIII.

Les sentiments demeurent les mêmes l’année suivante 1621 : Je vous aime plus que ce qui est au monde, dit le roi. Quelques affaires qui adviennent, je n'ai contentement autant que de penser à vous et vous témoigner que je vous aime autant que vous le désirez[89]. En mars on crut que les espérances attendues allaient se réaliser. Elles devaient être déçues comme les précédentes[90]. La mort du père d'Anne d'Autriche arrivant sur ces entrefaites, la jeune reine, ébranlée par cette déception, en reçut un coup douloureux. Elle aimait son père. Sa peine fut extrême. Enervée pour d'autres raisons elle manifesta un véritable désespoir. Tout le monde l'entourait, cherchant à la calmer, à la consoler. Le roi s'empressait, affligé au dernier point : il ne savait que faire entourant Anne d'Autriche de caresses, pleurant lui-même[91].

Lorsqu'il partit pour sa campagne de 1621 contre les protestants du midi, il voulut que la reine le suivit, au moins à quelque distance. En avant avec les troupes, ou près du feu dans les sièges, il prenait quelques heures de liberté afin d'aller revoir la petite reine. Les notes d'Héroard ne laissent aucun doute sur l'intimité affectueuse des époux. De son côté, Anne d'Autriche s'inquiétait du roi qu'elle savait brave, téméraire ; elle priait Luynes de veiller sur lui pour l'empêcher de s'exposer au danger[92]. Pendant le siège de Montauban, elle s'était logée à Moissac, dans l'évêché, demeure plus confortable que le château de Piquecos, quartier général de Louis XIII. L'un et l'autre venaient à tour de rôle : le roi partait à cheval sur les trois heures de l'après-midi, arrivait à Moissac vers cinq heures et demie, soupait, couchait et repartait le lendemain matin à cinq heures. Anne d'Autriche venait à Piquecos en carrosse, le malin, déjeunait, repartait à trois heures : visites tendres, sans cérémonial, entrevues intimes loin de tout regard profane[93]. - Il tardait bien un peu à la petite reine de rentrer : Vous aurez bientôt le contentement de me voir, écrivait-elle à madame de Monglat, ayant résolution de faire si bonne diligence à m'en retourner que j'espère être dans un mois à Paris[94]. Hélas ! elle l'eut moins désiré si elle avait su qu'une crise allait en résulter qui devait être grave, troubler de nouveau le ménage et faire reprendre à Louis XIII son humeur fâcheuse d'antan.

 

Parlant de cette crise de 1622, madame de Motteville, écho peut-être de la reine, accuse Marie de Médicis, la belle-mère, d'en avoir été cause. Après la mort du connétable de Luynes, dit-elle la reine Marie de Médicis, s'étant accommodée avec le roi, la paix entre lanière et le fils brouilla le mari et la femme. La reine mère étant persuadée que, pour être absolue sur ce jeune prince, il fallait que cette jeune princesse ne fût pas bien avec lui, travailla avec tant d'application et de succès à entretenir leur mésintelligence, que la reine sa belle-fille n'eut aucun crédit ni aucune douceur depuis ce temps-là[95]. Il y a eu cette raison ; il y en a eu d'autres.

De retour du siège de Montauban à la suite duquel le connétable de Luynes était mort, Louis XIII était rentré à Paris ulcéré, pour beaucoup de motifs, contre la mémoire de son ancien favori. Ses dispositions n'étaient rien moins que favorables à l'égard de la famille de Luynes[96]. Les frères de celui-ci comprenant, s'effacèrent. La veuve, à ce moment, était des plus intimes avec la reine qu'elle avait suivie pendant la campagne, qui l'aimait tendrement et trouvait un plaisir infini à sa gaieté légère. Or cette gaieté légère était précisément une des causes de sérieuses préoccupations contre madame de Luynes[97]. De mœurs plutôt suspectes, la duchesse passait pour admettre dans l'entourage de la souveraine des gens de conduite douteuse. Les ministres avaient demandé au nonce de faire agir le confesseur auprès d'Anne d'Autriche afin que celui-ci exprimât le désir à la reine de voir éloigner la connétable, madame du Vernet, la princesse de Conti, mademoiselle de Verneuil. L'intervention n'avait pas abouti[98]. Sur ces entrefaites, en mars 1622, une fois encore on annonçait que la reine se trouvait dans une situation intéressante : la distribution des charges de la maison du futur dauphin était déjà commencée[99]. Le lundi 14 mars, Anne d'Autriche était allé passer la soirée dans l'appartement de la princesse de Conti, au Louvre ; elle revenait, après minuit, accompagnée de madame de Luynes, de mademoiselle de Verneuil, suivie de seigneurs et de dames. En traversant la grande salle du palais, au premier étage — la salle Lacaze d'aujourd'hui — les deux amies eurent l'imprudente idée de faire courir la reine en la soutenant par les bras. Anne broncha au petit relais du haut dais, tomba. Deux jours après les espérances étaient évanouies. La cour fut affligée. On cacha le malheur au roi qui était sur le point de partir pour la campagne de 1622, dans le midi, et on ne se décida à le lui apprendre que lorsqu'il était à Orléans[100]. Louis XIII eut une violente colère ; cette colère était faite de la déception du mari et du souverain, de son animosité contre des personnes futiles dont on lui faisait tant de rapports défavorables et qui avaient si légèrement compromis de graves intérêts, de sa rancune contre la famille de Luynes. Déjà il avait ordonné à la duchesse, en février, de quitter son appartement du Louvre et d'aller loger dans un endroit du château plus retiré[101]. Il était impatienté de l'ascendant pris parla connétable sur la reine, au moment même où l’on jasait plus que jamais de la conduite de la jeune veuve, auprès de laquelle les assiduités du prince de Joinville étaient la fable de la cour. Il décida de chasser madame de Luynes et mademoiselle de Verneuil. Un gentilhomme, M. de la Folaine, fut expédié porteur de trois lettres : les premières à chacune des deux jeunes femmes, l'autre à la reine ; ces lettres étaient sèches[102]. Ayant reconnu, disait Louis XIII à madame de Luynes, qu'il est du bien de mon service de régler à l'avenir la maison de la reine d'autre sorte qu'elle n'a été par le passé, j'ai estimé ne le pouvoir si bien faire qu'en la forme et par les moyens que vous dira le sieur de la Folaine[103]. Mademoiselle de Verneuil était confiée à la duchesse d'Angoulême : La résolution que j'ai prise, mandait Louis XIII à la mère de la jeune personne, la marquise de Verneuil, l'ancienne maîtresse d'Henri IV, pour ce qui regarde ma sœur de Verneuil, votre fille, étant sur des considérations qui sont de mon service et de son bien, je désire qu'elle l'effectue de la sorte que je l'ai ordonné[104]. Quant à la reine, le billet qui lui était adressé était sans le moindre mot aimable : Le soin que je dois avoir qu'il y ait bon ordre en votre maison, lui disait le roi, m'a fait résoudre d'y apporter du changement qui ne sera que pour un plus grand bien comme vous recognoistrez par le temps. J'envoie la Folaine vous faire entendre sur cela ma volonté, laquelle je vous prie d'effectuer au plus tôt et de vous rendre aussi prompte à me donner le contentement que j'en attends que je vous crois disposée à me faire recevoir tout celui que je me suis promis de vous[105].

La décision rigoureuse prise et surtout la forme dépourvue de grâce produisirent sur la reine une impression des plus pénibles. Anne se considéra comme offensée. Elle montra une extrême affliction. Elle dépêcha M. de Putange au roi avec une lettre protestant contre la mesure imposée, disant que sa maison était tenue comme il le fallait, sinon que le prince devait lui dire les fautes commises afin qu'elle prit d'elle-même les résolutions nécessaires ; ajoutant que madame de Luynes était surintendante, qu'elle ne pouvait s'abstenir de venir remplir son office, qu'il était impossible de lui interdire l'entrée du Louvre ni l'accès près de sa maîtresse. Anne demandait une prompte réponse. Puis elle chargea M. de Bonneuil d'aller expliquer toutes ses raisons au roi[106]. Ayant désiré une prompte réponse à la lettre que Putange m'a donnée de votre part, lui répondit Louis XIII, je vous la fais aussitôt qu'il arrive près de moi. Je n'ai point entendu, ordonnant autre demeure que celle du Louvre à ma sœur de Verneuil et à ma cousine la connétable de Luynes, leur en interdire absolument l'entrée ni vous ôter la liberté de les voir. Mais il est du bien de mon service et du vôtre que les choses se passent comme j'ai commandé à la Folaine de vous le faire entendre de ma part[107]. Il ajoutait le lendemain : J'ai entendu tout ce que vous avez donné charge à Bonneuil de me dire. La résolution que j'ai prise ayant été avec bonne considération arrêtée, je n'y puis rien changer[108]. Madame de Luynes envoya M. de Montbazon, M. de Guise, le prince de Joinville. Louis XIII les reçut très mal et leur répondit qu'il vouloit être obéi[109]. Il ne le fut pas. Les relations de la reine et de madame de Luynes continuèrent comme par le passé. Indigné, le roi écrivit au président Jeannin : Ayant su que ma sœur de Verneuil et ma cousine la connétable de Luynes sont tous les jours avec la même liberté près de la reine, nonobstant l'éloignement que j'en ai ordonné, et ne désirant pas qu'elle en use de la sorte, j'écris à la reine pour lui faire entendre ma volonté : c'est qu'absolument je ne veux plus qu'elle la voie, que parfois et rarement, comme font les autres dames. A cette fin, vous lui présenterez ma lettre que je vous prie d'accompagner de vos bons et salutaires avis[110]. Jeannin parla. Anne lui dit qu'elle désirait contenter le roi, mais qu'elle ne pouvait interdire l'entrée de son appartement à madame de Luynes qui n'était pas révoquée de ses fonctions. Jeannin insista[111]. Anne d'Autriche céda. La résolution que vous avez prise, lui écrivait Louis XIII, d'effectuer ce qui est de ma volonté me contente bien fort ; comme je ne pouvais attendre autre événement, aussi avez-vous occasion de croire qu'il n'y a rien que j'affectionne à l'égal de votre bien, ce que vous recognoistrez toujours de plus en plus par tant de témoignages de ma bonne volonté[112].

Mais c'était un nuage qui avait passé sur leur bonheur ! Orgueilleuse et rancunière, Anne d'Autriche avait jugé, nous dit madame de Motteville, qu'étant elle-même hors de tout soupçon, elle n'aurait pas dû être traitée comme elle venait de l'être : la disgrâce de madame de Luynes, étoit un outrage qu'elle avoit de la peine à supporter. D'autres qu'elle avait protesté, la fortifiant ainsi dans ses sentiments. Les suites allaient aggraver cette impression[113].

A quelque temps de là le prince de Joinville, Claude de Lorraine, cinquième fils du duc Henri de Guise le Balafré, déclarait son intention d'épouser madame de Luynes ; il demandait au roi son consentement, puis, sans attendre la réponse, épousait la jeune veuve. Ce mariage surprit. Louis XIII, bien que mécontent de la désinvolture du marié et que toute la cour se moquât du couple allant s'installer au château de Lésigny, préparé, semblait-il, à cet effet, par le défunt duc de Luynes[114], aimait assez Joinville, duc de Chevreuse, qu'il allait nommer grand fauconnier de France, pour que deux mois après il décidât, en considération du nouvel époux, de laisser revenir l'ancienne madame de Luynes à la cour[115]. Mais alors pourquoi avait-il ainsi humilié Anne d'Autriche quelques semaines auparavant ? Et la petite reine se demandait si vraiment ce n'était pas elle-même que le roi avait voulu atteindre ! N'avait-il pas éloigné d'auprès d'elle un de ses secrétaires sous le prétexte qu'il était trop libre avec la souveraine ? Ne faisait-il pas surveiller ses entours ?[116] De fait, les dispositions de Louis XIII devenaient de moins en moins favorables. Le roi est plus mal content que jamais du cabinet de la reine, écrivait Marillac à Richelieu ; je ne sache point qu'on y apporte remède. Quinze jours plus tard, Marillac répétait : Le roi n'est pas content de la reine ; il ne veut pas ouïr parler de la faire venir près de lui[117]. Pendant toute cette campagne de 1622, les lettres de Louis XIII à Anne seront des billets secs, sans effusion, hautains et autoritaires : Je m'assure, lui dira-t-il, que vous n'aurez autre désir que de me plaire[118].

Cependant, effet peut-être du temps, de l'éloignement, nostalgie des heures de bonheur passées, il se prenait à lui rappeler ce qu'elle lui avoit promis de son affection. Il l'entretenait de l'ennui que vous avez certainement de mon éloignement : il lui avouait : Je souhaite de toute mon affection de vous revoir. Je me promets bien cet effet de mon affection qu'elle vous entretient clans un désir continuel d'avoir de mes nouvelles et que vous serez encore bien aise d'en apprendre[119]. Parvenu vers la fin de sa campagne et sur le point de rentrer à Paris, il souhaitait revoir la reine et lui demandait de venir au-devant de lui à Lyon : Le désir que j'ai de vous voir, lui écrivait-il, ne me permet pas de vous laisser davantage éloignée de moi ; c'est pourquoi je vous envoie mon cousin le duc d'Uzès pour vous accompagner au voyage et vous rendre la présente qui est pour vous prier de partir incontinent que votre commodité le permettra. Il lui indiquait les personnes qui devraient l'accompagner : Cette bonne compagnie me fait croire que le chemin vous durera moins et que s'il vous ennuie ce ne sera que l'impatience que vous aurez de me voir qui me sera toujours fort agréable[120]. La paix de Montpellier conclue, il avait hâte de revoir la petite reine : Je suis plus libre à vous donner des preuves de mon affection, lui écrivait-il ; je ressens accroître les désirs de vous voir. Il reste encore quelques affaires, qui m'arrêteront pour un peu de temps : ce sera le moins que je pourrai, ne pouvant vivre plus routent que près de vous[121]. Et Anne d'Autriche étonnée, craintive, répondait, moitié sincère, moitié par convenance. Alors le désir de revoir sa femme redoublait chez Louis XIII ; il lui mandait : Venez jusqu'à Arles. Ne pouvant vivre davantage si fort éloigné de vous et me trouvant engagé, il faut, pour mon contentement, que vous ayez la peine de venir à Arles : je vous la donne d'autant plus librement que ce sera selon votre désir dont les témoignages que j'ai de votre affection me rendent assuré. Les circonstances contraignant la reine à attendre à Lyon, il en était contrarié : Je me souhaite si souvent près de vous, lui mandait-il, que l'éloignement m'est à peine. Mais il faut donner au bien de mes affaires et repos de mes sujets l'établissement nécessaire[122].

Contradictions inexplicables du cœur humain, pourquoi après cette hâte à la revoir, la retrouvait-il ensuite à Lyon avec indifférence ? Les sentiments que Louis XIII avait exprimés dans ses lettres étaient-ils le résultat de l'éloignement ? L'impression produite par le contact dissipait-elle chez lui l'affection attendrie éprouvée au loin ? ou quelque incident que nous ignorons avait-il fait renaître les antipathies passées ? L'entrevue fut froide[123]. Les rapports redevinrent cérémonieux et conventionnels, Louis XIII reprenant sa sécheresse autoritaire, Anne d'Autriche se renfermant, hostile et dédaigneuse. Des mesures prises par le souverain attestèrent la méfiance réciproque. Le roi trouva à redire à ce qu'il vint trop de monde et n'importe qui dans L'appartement de sa femme. Assez imprudemment, il chargea sa mère d'en l'aire des observations[124]. Il défendit expressément qu'aucun homme n'entrai dans le cabinet de la reine, lui n'étant pas présent. Anne se fâcha[125]. Un mois auparavant, venait de traverser Paris incognito, accompagnant le prince d'Angleterre, un jeune seigneur anglais de vingt-huit à vingt-neuf ans, grand, mince, blond, à la barbe un peu rousse, aux joues colorées, aimable et séduisant, le duc de Buckingham. Louis XIII avait-il été informé de l'effet produit par le beau gentilhomme ? Peut-être, puisque ensuite il déclarera ne pas vouloir que le duc repasse par Paris, pour beaucoup de raisons, écrivait M. de Bréval au duc de Lorraine, générales et particulières, publiques et domestiques que Votre Altesse jugera bien[126].

Les relations des deux époux s'aigrirent. En juillet de cette année 1623, la reine eut une étrange attaque de nerfs ; elle tomba, se blessa à la main, au nez et au front, dut s'aliter, éprouvant des maux de tête violents. On lit quelque mystère de cet accident dont il ne fut parlé qu'en secret, les uns prononçant les mots de délire et de convulsion, les autres de mal caduc. Ce ne fut rien. Elle se releva. Il y avait peut-être un rapport entre cet accident bizarre et les crises intérieures du ménage[127].

Une de ces crises se manifesta en octobre, lorsque pour éloigner définitivement madame de Chevreuse, Louis XIII supprima la charge de surintendante de la maison de la reine. Anne pleura. Le roi qui, dans ce qu'il entreprenait, était extrêmement violent et obstiné, maintint sa décision envers et contre tous[128]. La présence de Marie de Médicis, revenue près du roi, achevait de brouiller le ménage.

 

Exilée à Blois, Marie de Médicis avait tâché de demeurer en bons termes avec sa bru. Elle lui avait écrit. Lorsqu'elle s'était enfuie en 1619, elle lui avait demandé de s'interposer afin de calmer le roi[129]. Mais quelle sympathie pouvait exister entre l'ancienne maîtresse du royaume et la nouvelle reine de France jouissant de tous les honneurs, privilèges, prérogatives de la fonction jadis attribués à l'autre ? Dès qu'il avait été question que les deux princesses se retrouvassent à Tours, en 1619, il y avait eu une série de discussions, pour savoir laquelle des deux aurait le pas. Louis XIII avait cédé à sa mère la préséance. La contrariété d'Anne avait été vive. Il avait fallu que Louis XIII priât Richelieu de régler les relations des deux reines entre elles, de fixer le ton, les manières, les gestes, afin d'éviter les heurts[130]. Malgré les précautions, les heurts se produisaient. Un jour il s'agissait d'un mot d'ordre à donner au régiment des gardes ; le lendemain de la place d'un carrosse. Si le roi quittait Paris pour aller en campagne et nommait sa femme régente, ce nouveau titre ne modifiait-il pas les prérogatives d'Anne en lui donnant le pas sur sa belle-mère ? De dépit, Marie de Médicis allait s'enfermera Fontainebleau jusqu'au retour de son fils[131].

Lorsqu'après la mort de Luynes Marie de Médicis se rapprocha de Louis XIII, il n'y eut personne qui ne prévît que cette réconciliation allait contribuer à la mésentente du ménage royal. Un incident amena une scène violente. Rucellaï, que Marie de Médicis ne pouvait plus souffrir, ayant reçu l'ordre de ne jamais reparaître devant l'ancienne régente, se trouva dans la chambre d'Anne d'Autriche un jour où la mère du roi y était. Celle-ci lui dit de sortir ; l'abbé ne bougea pas et même parut ricaner avec les dames. La vieille reine, rouge de colère, ordonna à M. de Bonneuil de chasser Rucellaï, ce qui fut exécuté. Mais alors des protestations s'élevèrent. Se croyant maîtresse du Louvre, Marie de Médicis avait donc osé commander dans l'appartement de la souveraine régnante ! Sans égard ni respect pour celle-ci qui était chez elle, elle avait régenté ses intérieurs ! Ce fut un esclandre. Le conseil du roi dut s'en occuper. Louis XIII exigea des excuses. Marie de Médicis pleura[132]. On devine les sentiments réciproques que pouvaient éprouver l'une pour l'autre une belle-mère et une belle-fille se trouvant à ce point dans leurs rapports ? Saint-Simon croit que rien ne put diminuer l'union qui s'étoit mise entre les deux reines dès le commencement du mariage de Louis XIII dont le nœud était la passion espagnole qui les posséda sans cesse toutes les deux. Il a tort, pour ce moment[133]. Mais Louis XIII ne pouvait qu'être défavorablement impressionné par l'antipathie mutuelle de sa mère et de sa femme. L'animosité de la petite reine à l'égard de sa belle-mère venait s'ajouter à tant d'autres causes prédisposant le jeune roi à s'écarter d'Anne d'Autriche. Tout contribuait à désunir leur ménage ! Les heures de tendresse et d'amour étaient bien passées !

 

 

 



[1] Voir sur ce mariage : Arch. nat., K. 1017, 1626, 1634 ; Bibl. nat., ms. Dupuy 156, fol. 92-124 : Bibl. de l'Arsenal, ms. 4723. Cf. F. T. Perrens, les Mariages espagnols sous le règne de Henri IV et la régence de Marie de Médicis, Paris, Didier, 1809, in 8°.

[2] Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 11, 17, 25 ; Herbert de Cherbury, Mém., trad. Baillon, p. 137 ; Visite du cardinal légat F. Barberini à Louis XIII et à la famille royale, 1625, dans Bulletin de la Soc. de l'hist. de Paris, 1875, p. 174. Il existe au Louvre et aux Offices de Florence d'intéressants portraits d'Anne d'Autriche à l'époque qui nous occupe.

[3] Le roi lui dit (à Montpouillan) que c'étoit ses patins qui la haussoient (Anne d'Autriche) et lui ayant un peu relevé la robe (à la reine) les y fit voir. Lettre de la marquise de la Force à son mari, dans Mém., du duc de la Force, éd. La Grange, t. II, p. 449 ; Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 24.

[4] Card. de Retz, Mém., éd. A. Feillet, t. II, p. 18.

[5] Au milieu d'une grande cérémonie religieuse elle se faisait ragencer les cheveux, un peu dérangés, avec une aiguille d'or devant tout le monde, Chaulnes, Relation exacte, éd. Michaud, p. 481.

[6] Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 9, 13 ; card. de Retz, Mém., éd. Feillet, t. II. p. 17. 174.

[7] Dépêche de Contarini du 27 janvier 1618, Bibl. nat., ms. ital. 1771. p. 561. Tallemant remarque qu'Anne d'Autriche prononçoit le français comme si elle estoit née à Paris (Historiettes, éd. P. Paris, t. II. p. 146).

[8] Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 12-13 ; Herbert de Cherbury, Mém., trad. Baillon, p. 137. La religion d'Anne d'Autriche était toute extérieure, consistant en pratiques (Madame de Motteville, p. 12 et dépêche de Monteleone à Juan de Ciriça du 7 avril 1618, Arch. nat., K. 1474, n° 72).

[9] La reyna es un angel de rostro y de condicion y de muy santas inclinaciones (dépêche de Giron au roi d'Espagne du 24 novembre 1618, Arch. nat., K. 1475, n° 107 a).

[10] Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 18 ; Tallemant, Historiettes, éd. P. Paris, t. I, p. 50, 62, 63. Malherbe a écrit deux chansons sur l'amour malheureux de M. de Bellegarde, (dans Œuvres, éd. Lalanne, t. I. p. 293-296).

[11] Madame de Motteville, op. et loc. cit.

[12] Louis XIII parait avoir été un instant amoureux de sa femme au détint de son mariage. Puisieux écrivait à ce moment à M. de Léon : Nous avons ramené une princesse qui a tellement piqué Sa Majesté qu'il en est devenu tout amoureux (lettre conservée à la Bibliothèque de Saint-Pétersbourg et citée par H. de la Ferrière, Marie de Médicis et Louis XIII dans Revue des Soc. sav. des dép., 1864, t. IV. p. 138,

[13] Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 17.

[14] Dépêche de Contarini du 26 juin 1618, Bibl. nat., ms. ital. 1772, p. 123. La reine est dédaigneuse, dit l'ambassadeur, et le roi s'éloigne. Le roi la connaissoit bien et la méprisoit. (Tallemant, Historiettes, éd. P. Paris, t. II, p. 260). Le roi n'aimoit ni n'estimoit la reine sa femme. (Card. de Retz, éd. Feillet, t. I, p. 228). Voir aussi la lettre du nonce du 19 décembre 1617 (Bentivoglio, Lettere, t. II, p. 119).

[15] Rohan, Mém., éd. de 1736, t. I, p. 221.

[16] Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 24.

[17] Le journal d'Héroard nous renseigne sur tous ces faits avec l'abondance et la précision nécessaires : voir par exemple, Bibl. nat., ms. fr. 4025, fol. 394 v°, 423 r° ; 4026, fol. 109 v° et suiv., 115 v°, etc.

[18] Dépêche de Giron au roi d'Espagne du 24 novembre 1618, Arch. nat., K. 1475, n° 107 a.

[19] Lettre d'Anne d'Autriche à Luynes, sans date (Arch. du château de Dampierre) : Mon cousin, ne m'étant pas excusée d'écrire un mot au roi par ce gentilhomme en faveur de M. de Nevers, j'ai bien voulu aussi vous le faire savoir afin que, par votre moyen, le roi connoisse que je ne lui fais aucune prière et laisse le tout à sa volonté.

[20] Dépêche de Contarini du 14 juillet 1618, Bibl. nat., ms. ital. 1772, p. 142.

[21] Ce personnel se composait de dames (comme la comtesse de Castro, Dona Luisa Osorio, Anna de Guzman, Catarina de Cestro, Dona Antonia de Mendoza, Arch. nat., K. 1475, n° 142), de médecins (La Serna, Ferrillo, Ibid., 1479 n° 80 a ; Bibl. nat., ms. fr. 4025, fol. 389 v°), de filles d'honneur (Ibid., fol. 3G5 v°), de confesseurs, d'aumôniers, de femmes de chambre, etc. Anne d'Autriche fut servie à table suivant la mode espagnole jusqu'en 1616 (Ibid., fol. 287 v°).

[22] Sur les sentiments hostiles de Louis XIII à l'égard du personnel espagnol, voir les dépêches des ambassadeurs Monteleone et Giron au roi d'Espagne, (Arch. nat., K. 1475, n° 44, 107 a) ; celles de l'ambassadeur vénitien (Bibl. nat., ms. ital. 1771, p. 155, 482, 502, 567), de Bentivoglio (Lettere, t. II, p. 520).

[23] Voir les dépêches de Monteleone de 1617 (Arch. nat., K. 1473, n° 181, 182), de Contarini du 6 avril 1618 (Bibl. nat., ms. ital. 1772, p. 44). Monteleone avait été chargé par le roi d'Espagne d'instruire et de guider Anne d'Autriche (lettre de Bentivoglio à Monteleone du 9 avril 1620, dans Bentivoglio, Lettres, 1680, in-12°, p. 309).

[24] Chaulnes, Relation exacte, p. 470.

[25] Nous avons un certain nombre de leurs Lettres et les réponses de Philippe III ou du duc de Lerme : Arch. nat., K. 1455, n° 2, 5, 578 ; 1473, n° 102 ; 1475, n° 26, 28 ; 1477, n° 119 ; 1478, n° 75.

[26] Arch. nat.. K. 1431, n° 105 ; 1457, n° 22 ; 1475, n° 25 ; 1476, n° 123 : avec les réponses des personnages. Cf. Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 17, 24. Monteleone prévenait qu'Anne d'Autriche recevait avec grand plaisir les lettres de son père et de ses frères (dépêche du 28 décembre 1617. Arch. nat., K. 1473, n° 194). Pour les envois d'argent du roi d'Espagne à sa fille, cf. Ibid., K. 1455, n° 127, 133 ; 1476, n° 132 ; en 1619 le roi envoie à sa fille 6.000 écus.

[27] Dépêche de Pesaro du 10 février 1623, Bibl. nat., ms. ital. 1779, p. 221.

[28] Chaulnes, Relation exacte, p. 484 ; lettre d'Anne d'Autriche à Luynes du 26 juillet 1620, Arch. du château de Dampierre.

[29] On peut suivre cette histoire, qui agita beaucoup la cour, dans les dépêches des ambassadeurs espagnols (Arch. nat., K. 1475, n° 94, 98, 107a, 121, 129, 134a, 141, 142) ; des ambassadeurs vénitiens (Bibl. mil., ms. ital. 1772, p. 215, 257) ; du nonce (Bentivoglio, Lettere, t. II, p. 568 ; t. III, p. 9, 59, 68, 71, 141). Nous avons l'Estat de la dépense pour le retour en Espagne des dames et damoiselles espagnoles (1618, Bibl. nat., ms. fr. 15 597, fol. 270 et suiv.).

[30] Madame de Luynes fut chef du conseil, surintendante de la maison et finances d'Anne d'Autriche. Bibl. nat., nouv. acq. fr. 9175, fol. 432 r°. Madame du Vernet, que l'on confond souvent avec mademoiselle de Verneuil, se nommait Antoinette de Luynes.

[31] Sur la duchesse de Luynes, voir, avec le livre de V. Cousin, Madame de Chevreuse, 1876, in-12° : Bibl. nat., nouv. acq. fr. 4334 ; Tallemant, Historiettes, éd. P. Paris, t. I, p. 400 ; les dépêches de Priuli de 1621, Bibl. nat., ms. ital., 1770, p. 22, 237.

[32] Herbert de Cherbury, Mém., trad. Baillon, p. 165 ; madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 17.

[33] Héroard, Bibl. nat., ms. fr. 4020, fol. 19 v°, 455 r°. En 1619 Anne d'Autriche fait donner à madame de Luynes de larges gratifications, Arch. nat., E. 78e, fol. 108 r° ; dépêche de Priuli du 29 décembre 1620, Bibl. nat., ms. ital. 1775, p. 194.

[34] Richelieu, Mém., t. I, p. 210 ; madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 21.

[35] Par exemple, lettres d'Anne d'Autriche à Luynes des 11 juillet et 28 sept. 1620, Arch. du château de Dampierre.

[36] Retz, Mém., éd. Feillet, t. II, p. 186. La femme de Luynes qui est un esprit écervelé qui n'a que dix ans... (Seconde partie et réponse à la Chronique des favoris, 1622, in-12°, p. 22).

[37] Richelieu, Mém., t. I, p. 282.

[38] Tallemant, Historiettes, éd. P. Paris, t. II, p. 10 ; le Comtadin provençal, p. 22.

[39] Lettre de Marillac, à Richelieu d'avril et sept. 1622, racontant le mot que dit Louis XIII de la princesse de Conti, Arch. des Aff. Étrang., France 775, fol. 96 r°, 148 v°, 200 v° ; Tallemant, Historiettes, éd. P. Paris, t. I, p. 78 et suiv. : madame de Motteville, Mém., p. 19.

[40] Dépêche du nonce Corsini du 23 février 1622, dans B. Zeller, Richelieu et les ministres, p. 304 ; Tallemant, op. cit., t. IV, p. 172. Le Cabinet satyrique, ou recueil parfait de vers piquants et gaillards de ce temps, (Paris, Estoc, 1618, in-12°) était aussi licencieux que le Parnasse satyrique ; il ne fut pas poursuivi par le Parlement parce qu'il ne contenait rien de contraire à la foi.

[41] Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 18. Herbert de Cherbury, Mém., trad. Baillon, p. 152.

[42] Il re non ha mostrato senso alcuno di cio. Sur cette affaire de mademoiselle de Maugiron, qui se passa dans l'été de 1617, voir les lettres du nonce (Bentivoglio, Lettere, t. I, p. 349. 383, 403) ; la dépêche de l'ambassadeur vénitien du 1er août 1617 (Bibl. nat.. ms. ital. 1771, p. 304) ; le Journal d'Arnauld d'Andilly. éd. Halphen, 1857, p. 312. Anne d'Autriche donna à sa demoiselle d'honneur 10.000 écus pour qu'elle s'en allât.

[43] Tous ces renseignements se trouvent dans les dépêches de l'ambassadeur d'Espagne Fernando Giron de 1619 et 1620, Arch. nat., K. 1476, n° 79, 171a, 173 ; 1477, n° 3 : dans les lettres du nonce, de 1617-1620, Bentivoglio, Lettere, t. II, p. 119, 184, 194 ; t. IV. p. 231). Voir aussi la dépêche de Contarini du 20 janvier 1621, Bibl. nat., ms. ital. 1775, p. 135 : Tallemant, Historiettes, t. I, p. 400 ; Bassompierre, Journal, éd. Chantérac, t. II, p. 387.

[44] Voir par exemple les vers de Malherbe dans Œuvres, éd. Lalanne, t. I. p. 237.

[45] Du Chambort, la Défaite des envieux, Paris, 1621, in-12° p. 59 : Balzac, le Prince, dans Œuvres, édit. Moreau, 1854, t. I, p. 60.

[46] Nous rappelons sur ce sujet le livre de A. Baschet, le Roi chez la reine, Paris, Plon, 1866, in-18°. Nous avons repris les textes, précisé et complété le récit de Baschet.

[47] Lettre de Louis XIII à Richelieu du 4 juin 1637, dans Catalogue of the collection of Morrison, t. III. p. 219. Je suis résolu à ne m'engager jamais avec quelque personne que ce soit. J'essaierai à vivre le mieux que je pourrai en ce monde pour faire en sorte de pouvoir gagner paradis à la fin, qui est le seul but que l'on doit avoir en ce monde, etc.

[48] La verita e, écrit Bentivoglio (Lettere, t. II, p. 336, 14 avril 1618), com'egli (le confesseur) m'ha assicurato, che il re, sin ora, ha piu vergogna che sensualita, e che non sente stimolo alcuno di carne che gli faccia perderla vergogna. Voir aussi une lettre du même du 19 juillet 1617 (t. I, p. 383).

[49] Suo padre comincio tardi, ma poi suppli con troppo eccesso nel resto del tempo : piaccia a Dio che se il figliuolo l'imita sinqui, non l'imiti, poi nell' eta futura. Lettre du 14 avril 1618, ibid., t. II, p. 330.

[50] Nous suivons la lettre du nonce au Saint-Siège du 23 avril 1618, ibid., t. II, p. 341.

[51] Lettre du nonce du 30 janvier 1619, rapportant les confidences que lui fait le P. Arnoux. ibid., t. III, p. 173.

[52] Monteleone est assez sobre dans ses dépêches. C'est l'ambassadeur vénitien qui nous instruit de ces détails d'après ses conversations avec l'ambassadeur d'Espagne (sa dépêche du 23 mai 1617, Bibl. nat., ms. ital. 1771. p. 131-2). Le nonce surtout est très informé (Bentivoglio, Lettere, t. II, p. 105, 335, 336) : Bisogna lasciar fare il tempo, dit-il. Bentivoglio nous fait assister aux conférences répétées qui ont lieu sur le sujet qui les préoccupe, entre lui, le confesseur, le P. Arnoux et l'ambassadeur d'Espagne, Monteleone.

[53] Lettre du 31 décembre 1617, ibid., t. II, p. 145. Il padre Arnoux m' ha detto in gran confidenza ch'egli lia fatto col re, in quest'ultima confessione ogni buon ufficio per la regina sua moglie. Il detto padre mi ha assicurato che Luynes ha fatti e fa i medesimi uffici.

[54] Questa e materia un poco grasso, e percio ho voluto scriverne a parte a V. S., Bentivoglio, lettre du 17 janvier 1618, ibid., t. II, p. 176. Voir aussi t. III, p. 10 : le comte de Gondomar passant par Paris émet sur Louis XIII la même opinion que les dames espagnoles ; dépêche de Contarini du 26 février 1618, Bibl. nat., ms. ital. 1771, p. 617.

[55] Ces remarques sont faites par le confesseur, le nonce et par Monteleone ; lettre de Bentivoglio du 9 mai 1618 (Lettere, t. II, p. 394) ; dépêche de l'ambassadeur d'Espagne du 29 juillet 1618 à Juan de Ciriça, Arch. nat.. K. 1175, n° 12.

[56] Dépêches de Contarini des 6 et 21 septembre 1618, Bibl. nat., ms. ital. 1772, p. 178 et 190. On avait annoncé par exemple comme date la nuit de saint Côme et saint Damien.

[57] Dépêches de l'ambassadeur Fernando Giron au roi d'Espagne des 21 octobre 1618 et 17 janvier 1619, Arch. nat., K. 1475, n° 94 ; 1476, n° 4. Ora, le cose vanno tuttavia fredde, ajoute Bentivoglio (Lettere, t. III, p. 165, lettre du 16 janvier 1619).

[58] Dissi burlando à S. M. : Sire, io non credo gia che voi vorrete ricevere questa vergogna che vostra sorella abbia prima un figliulo che V. M. un delfino ! Il re si fece un poco rosso, e in questo mostro il suo pudore, e poi mi rispose, ridendo con buona grazia, che sperava di non dever ricevere questa vergogna. Ibid., t. III, p. 166.

[59] Héroard, Bibl. nat., ins. fr. 4026, fol. 131 v°. Les détails, que nous ne pouvons reproduire, sont donnés par Contarini dans sa dépêche du 27 janvier 1619, Bibl. nat., ms. italien 1772, p. 303.

[60] Le roi résista fort et ferme, par effort, jusques aux larmes ; y fut emporté. La scène est contée par Héroard (Bibl. nat., ms. fr. 4026, fol. 133 v°), Contarini (dépêche du 5 février 1619, ibid., ms. italien 1772, p. 317), le nonce (Bentivoglio, Lettere, t. III, p. 173). Tout le monde parait avoir connu le détail : Cf. Gramond, Historiarum Galliæ ab excessu Henrici IV, libri XVIII, Amsterdam, 1653, liv. III, p. 214. Amplexatum, nec obluctantem, veste fortuita tegit, transfertque brachiorum nisu in reginæ cubiculum.

[61] Héroard, Bibl. nat., 4026, fol. 133 v° à 152 r°. On ne peut transcrire les précisions que fournit le manuscrit d'Héroard. La reine du XVIIIe siècle à laquelle nous faisons allusion est Marie-Antoinette : voir les Mém. de madame Campan, éd. Barrière, 1826, t. I, p. 187.

[62] Dépêches de Fernando Giron de janvier 1619, Arch. nat., K. 1476, n° 6, 7 et 9.

[63] Lettre du nonce du 30 janvier 1619, Bentivoglio, Lettere, t. III, p. 169. Pontchartrain (Mém., éd. Michaud, p. 403), Bassompierre (Journal, éd. Chantérac, t. II, p. 142) mentionnent le fait.

[64] Lettre de Puisieux à Marquemont du 30 janvier 1619, Bibl. nat., nouv. acq. fr. 7319, fol. 387 r°.

[65] Voir, par exemple, une lettre datée de Paris du 26 février 1619, Bibl. nat., collection Moreau 724. fol. 200 r°.

[66] Le matin qui suivit cette première nuit, le roi promit à la reine, avec serment, qu'il lui serait fidèle et n'aimeroit jamais aucune autre femme. Lettre du P. Joseph à un ministre d'Espagne, du 14 février 1619, dans Revue rétrospective, 1re série, t. II. p. 253 ; confirmée par une dépêche de Contarini du 27 janvier 1619, Bibl. nat., ms. ital. 1772, p. 304.

[67] Le signe adopté par Héroard est N° (nota) V 1. Sur les délais de quinzaine dont nous parlons et qu'observait Louis XIV, voir les Mémoires de Primi Visconti, éd. J. Lemoine, Paris, Calmann-Lévy, in-8°, p. 106.

[68] Il re, contra l'uso suo, sta tardi a letto,la mattina, e, di cacciatore sollecito, i divenuto ubidientissimo marito. Dépêche de Contarini du 5 février 1619, Bibl. nat., ms. italien 1772, p. 316.

[69] Lettre de Puisieux à Léon du 6 février 1619, conservée à la Bibliothèque de Saint-Pétersbourg, citée par H. de la Ferrière dans Revue des Soc. sav. des départements, 1864, p. 142.

[70] Lettres du nonce des 4 et 18 décembre 1619, Bentivoglio, Lettere, t. IV, p. 16 et 18.

[71] Dépêches de F. Giron au roi d'Espagne des 23 décembre 1619 et 12 janvier 1620, Arch. nat., K. 1476, n° 177 ; 1477, n° 3.

[72] Lettre de Bentivoglio à Monteleone du 17 mars 1619, dans Bentivoglio, Lettres, éd. de 1680, p. 249.

[73] Sorrise la regina, si fece rossa in volto, e rispose nel voler d'Iddio conviene rassegnare questi desiderii. Dépêche de Contarini du 3 octobre 1620, Bibl. nat., ms. ital. 1775, p. 6.

[74] Lettre de Malherbe probablement à M. du Bouillon, dans Œuvres, éd. Lalanne, t. IV, p. 244.

[75] Dépêche de Contarini du 7 janvier 1620, Bibl. nat., ms. ital. 1773, p. 371 ; J.-B. Matthieu, Hist. de Louis XIII, dans P. Matthieu, Hist. de Henri IV, t. II, p. 121 et suiv.

[76] Nous avons tous les détails circonstanciés de la crise dans : le Récit de la maladie de la reine fait le sixième de février 1620, Paris, F. Bourriquant, 1620, in-12° ; les rapports, envoyés à Madrid, du médecin espagnol la Serna, des 6 et 10 février 1620, Arch. nat., K. 1477, n° 18 et 23 ; J.-B. Matthieu, op. et loc. cit. ; Pontchartrain, Mém., éd. Michaud, p. 411.

[77] Tous ces détails sont donnés par les dépêches de l'ambassadeur Giron à la cour d'Espagne des 7 et 12 février 1620 (Arch. nat., K. 1477, n° 20, 27 et 28), le Journal d'Héroard (Bibl. nat., ms. fr. 4026, fol. 266 r° et suiv.), la dépêche de Contarini du 18 février 1620 (Bibl. nat., ms. italien 1773, p. 416), les lettres du nonce des 12 et 13 février 1620 (Bentivoglio, Lettere, t. IV, p. 121, et Lettres, éd. de 1680, p. 299, 301) ; Boitel de Goubertin, Histoire des guerres de Louis le Juste, 1622, in-8°, p. 477.

[78] De Nervèze, Actions de grâces à Dieu et prière pour la convalescence de la reine, Paris, T. du Bray, 1620, in-12° ; de Molières, la Réjouissance et les souhaits des filles de la reine pour le recouvrement de sa santé, Paris 1620, in-12° ; voir aussi les stances de Malherbe, dans Œuvres, éd. Lalanne, t. I, p. 297. On organisa une procession générale le 8 février à Paris (Arnauld d'Andilly, Journal de 1620, éd. Halphen, p. 7). Louis XIII fit le pèlerinage à Notre-Dame de Liesse vers la fin des jours gras (Malingre, Hist. universelle de ce qui s'est passé ès années 1619 et 1620, Paris, A. Vitray, 1621, in-12°, p. 68 ; sur le pèlerinage de Notre-Dame de Liesse à ce moment, cf. le travail de E. Fleury, dans Bull. de la Soc. acad. de Laon, t. VI, 1857, p. 2).

[79] Bibl. nat., ms. fr. 3722, fol. 27 v°. Louis XIII écrivait au roi d'Espagne à ce sujet une lettre témoignant de sa vive joie. Elle est datée du 13 février 1620, Arch. nat., K. 1477, n° 30 bis.

[80] Les différents aspects d'une fête semblable ont été figurés dans les gravures de Crispin de Pas qui illustrent le livre de Pluvinel : l'Instruction du roi en l'exercice de monter à cheval, Paris, 1625, in fol.

[81] Tous les détails se trouvent rapportés dans la Description générale de ce qui s'est fait et passé en la Place royale dimanche dernier 17 mai, Paris, S. Moreau, 1620, in-12° : Cf. J.-B. Matthieu, Hist. de Louis XIII, dans P. Matthieu, Hist. d'Henri IV, in-fol., 1631, t. II, p. 120-127 ; la dépêche de l'ambassadeur vénitien du 26 mai 1620, Bibl. nat., ms. ital. 1774, p. 90. Ces textes se complètent.

[82] Bibl. nat., Cinq Cents Colbert 98, p. 127. Lettre de Louis XIII à Anne d'Autriche d'août 1620.

[83] Ibid., Anne d'Autriche avait été indisposée. Louis XIII lui disait : Si j'eusse appris votre maladie par autre que par vous, elle m'auroit mis en grande peine ; la nouvelle n'est que bonne de votre main, puisqu'elle m'apprend que vous êtes bien guérie.

[84] Lettre du 24 octobre 1620, Bibl. nat., Cinq Cents Colbert 98, p. 135.

[85] Ibid., p. 122 et 124 (lettre du 28 août 1620).

[86] Ibid., p. 126. Je serai samedi à Paris, écrit encore Louis XIII à Anne d'Autriche (ibid., p. 124), où je m'acheminerai d'autant plus volontiers que je sais de n'y être pas seulement souhaité d'un chacun, mais attendu de vous avec impatience. C'est avec un désir pareil au vôtre que je vous donne le bonsoir.

[87] Lettre d'Anne d'Autriche à Luynes du 26 octobre 1620, Arch. du château de Dampierre.

[88] Lettre du 3 novembre 1620, Arch. du château de Dampierre.

[89] Lettre de Louis XIII à Aime d'Autriche, 1021, Bibl. nat., Cinq Cents Colbert 98, p. 138.

[90] Dépêche du nonce Corsini du 12 mars 1621, Arch. nat., L. 397, fol. 320 v°. Nouvelles espérances en juin, également déçues (dépêche de Priuli du 27 juin 1621, Bibl. nat., ms. italien 1770, p. 220).

[91] Dépêche de Priuli du 13 avril 1621. Bibl. nat., ms. ital. 1770, p. 92, traduite dans B. Zeller, Le Connétable de Luynes, p. 64. Nous avons l'original de la lettre de condoléances écrite à Madrid par Louis XIII pour la mort de son beau-père Philippe III, et datée de Fontainebleau, 10 avril 1621. Elle est revenue d'Espagne avec les autres papiers de Simancas, conservés aux Archives nationales (Arch. nat., K. 1478, K. 1478, n° 71a). Louis XIII fit célébrer des offices solennels pour le repos de l'âme de son beau-père (Les Cérémonies royales observées à Fontainebleau et dans l'Église Notre-Dame de Paris, le jeudi 29 avril et samedi 1er mai, aux obsèques et funérailles du très catholique roi d'Espagne, par le commandement du roi, Paris, 1621, in-12°). Le 28 avril, le nouveau roi Philippe IV écrivait au duc de Luynes pour le remercier des attentions qu'il avait à l'égard d'Anne d'Autriche (Arch. nat., K. 1377, n° 51).

[92] Lettre d'Anne d'Autriche à Luynes, le remerciant de me tirer de la peine ou j'estois de ce que le roi étoit à la tranchée, 1621. (Arch. du château de Dampierre).

[93] On peut suivre dans Héroard chacun de ces voyages (Bibl. nat., ms. fr. 4026, fol. 490 r°, 495 r°, 500 r°, 505 r°, 509 r°). Lorsque Anne vient à Piquecos, M. le connétable lui donne à dîner.

[94] Lettre d'Anne d'Autriche à madame de Monglat, datée de Moissac, 3 novembre 1621, Bibl. nat., ms. IV. 3818, fol. 20 r°.

[95] Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 17.

[96] Voir plus loin, chap. IX.

[97] Elle lui communiquoit (à la reine) autant qu'elle pouvoit son humeur galante et enjouée pour faire servir les choses les plus sérieuses et de la plus grande conséquence, de matière à leur gaieté et à leurs plaisanteries (Madame de Motteville, op. et loc. cit.).

[98] Dépêche du nonce Corsini du 23 février 1622, Arch. nat., L. 397, fol. 353 v°.

[99] Dépêches du nonce du 7 mars (ibid., fol. 336 v°), de Pesaro des 5 et 15 mars 1622 (Bibl. nat., ms. ital. 1778, p. 19, 56).

[100] Nous sommes renseignés sur cet accident par les dépêches du marquis de Mirabel, ambassadeur d'Espagne, à Juan de Ciriça, du 17 mars 1622 (Arch. nat., K. 1479, n° 21) ; du nonce Corsini du 22 mars Arch. nat., L. 397, fol. 392 r°) ; de l'envoyé florentin du 23 mars (dans Zeller, Richelieu et les ministres, p. 68) ; par Héroard (Bibl. nat., ms. fr. 4027, fol. 26 r°, 27 r°), et principalement par Bassompierre (Journal, éd. Chantérac, t. III, p. 15). En quittant Paris, Louis XIII, par lettres patentes du 10 mars 1622, avait donné à Anne d'Autriche plein pouvoir de commander à sa place pendant son absence (Arch. des Aff. Étrang., France 776, fol. 327 r°).

[101] Dépêche de Pesaro du 14 février 1622. Bibl. nat., ms. ital. 1777. p. 242. Il avait été même question que madame de Luynes abandonnât sa charge de surintendante de la maison de la reine laquelle aurait été rendue à la connétable de Montmorency (ibid., p. 266, 22 février). La dame d'atour, madame du Vernet, sœur de Luynes, avait été remerciée et renvoyée du Louvre (ibid., p. 263).

[102] Dépêche Corsini du 4 avril 1622, Arch. nat., L. 397, fol. 327 v° ; de Pesaro des 1er et 6 avril. Bibl. nat., ms. ital. 1778, p. 92, 108 (nous avons les documents dont parle Pesaro ; on peut saisir ici la précision des renseignements de cet ambassadeur) ; Bassompierre, Journal, éd. Chantérac, t. III, p. 10 ; Fontenay-Mareuil, Mém., éd. Michaud, p. 166 ; Caquets de l'accouchée, éd. Fournier, p. 149.

[103] Lettre de Louis XIII à madame de Luynes du 23 mars 1622, Bibl. nat, ms. fr. 3722, fol. 137 r°.

[104] Cette lettre était une réponse à une protestation un peu hautaine de la marquise de Verneuil (ibid., fol. 93 v°). Nous avons la lettre par laquelle Louis XIII confie sa sœur à la duchesse d'Angoulême (fol. 92 v°) ; mademoiselle de Verneuil assura le roi de son obéissance et de ses bonnes dispositions et le roi lui répondit (fol. 93 v°). Le 8 avril Louis XIII lui disait que sa bienveillance à son égard demeurait la même (ibid.).

[105] Lettre de Louis XIII à Anne d'Autriche du 25 mars 1622, Bibl. nat., ms. fr. 3722, fol. 136 v°.

[106] Dépêche de Pesaro du 1er avril 1622, Bibl. nat., ms. ital. 1778, p. 92.

[107] Lettres de Louis XIII à Anne d'Autriche du 27 mars, jour de Pâques, et du 12 avril 1622, Bibl. nat., ras. fr. 3722, fol. 137 v° et 138 v°.

[108] Ibid.

[109] Journal d'Arnauld d'Andilly, 1622, Bibl. de l'Arsenal, ms. 5181, fol. 6 v°. Le roi dit qu'il vouloit parler de cette affaire en son conseil. Enfin le roi dit à Blois qu'il vouloit être obéi, qu'elles (ces dames) sortissent et qu'il leur permettroit d'aller voir la reine, mais non de coucher au Louvre.

[110] Lettre de Louis XIII au président Jeannin du 15 avril 1622, Bibl. nat., ms. fr. 3722, fol. 139 v°.

[111] Lettre de Jeannin au roi par laquelle il rend compte de sa mission (18 avril 1622), Et. Charavay, Collection de lettres autographes du règne de Louis XIII, Paris, 1873, in-8°, p. 46.

[112] Lettre de Louis XIII a Anne d'Autriche d'avril 1622, Bibl. nat., ms. fr. 3722, fol. 139 r°.

[113] Madame de Motteville, Mém., éd. Michaud, p. 23 ; Remontrance faite au roi par Messieurs les princes contre les perturbateurs du repos de l'État, in-12°, p. 12.

[114] Lettre détaillée et assez caustique de Marillac à Richelieu du 20 avril 1622, Arch. des Aff. Étrang., France 773, fol. 145 v° : autre lettre du même du 29 avril (ibid., fol. 148 v°). Nous rappelons que Lésigny avait appartenu à Luynes ci lui venait de la succession de Léonora Galigaï. Nous avons le contrat de mariage du duc et de la duchesse de Chevreuse date du 19 avril, Bibl. nat, ms. Clairambault 378, fol. 118-121. Cf. la dépêche de Pesaro du 13 mai 1622. Bibl. nat., ms. ital. 1778, p. 173.

[115] Ce serait Bassompierre et Puisieux, au dire de Marillac, qui auraient fait revenir madame de Chevreuse (lettre de Marillac à Richelieu du 3 juillet 1622, Arch. des Aff. Étrang., France 775, fol. 102 r°). En ce qui concerne la bienveillance du roi à l'égard du duc de Chevreuse, voir une lettre du prince au duc de Chaulnes pour le règlement de la succession du connétable de Luynes après le second mariage de la veuve de celui-ci (Bibl. nat., ms, fr. 3722, fol. 150 r°). Les provisions de la charge de grand fauconnier de France en faveur du duc de Chevreuse sont du 27 mai 1622 (Arch. des Aff. Étrang., France 776, fol. 130 r°).

[116] Dép. de Pesaro du 22 février 1622, Bibl. nat., ms. ital. 1777, p. 265.

[117] Lettres de Marillac à Richelieu des 29 avril et 17 mai 1622, Arch. des Aff. Étrang., France 775, fol. 148 v°, 167 v°.

[118] Bibl. nat., ms. fr. 3722, fol. 154 v°, du 4 juillet 1622. Voir aussi la note envoyée de la part du roi au chancelier Brulart de Sillery le 21 juillet : Le roi veut et entend que la reine vienne à Lyon au plus tôt ainsi et avec les personnes que Sa Majesté a ordonnées ; et moins elle y apportera de réplique, plus elle fera plaisir au roi, etc. (Arch. des Aff. Étrang., France 776, fol. 234 r°).

[119] Lettres de Louis XIII à Anne d'Autriche de 1622 : Bibl. nat., ms. fr.. 3722, fol. 154 v°, 159 v°, 161 v°, 165 v° et suiv.

[120] Ibid., fol. 154 r° : lettre de Louis XIII à Anne d'Autriche d'octobre 1622.

[121] Bibl. nat., ms. fr. 3722, fol. 158 v°.

[122] Ibid., fol. 163 r° et 166 r°, lettre de Louis XIII à Anne d'Autriche datée de Caderousse, 21 novembre 1622.

[123] Dépêche de Pesaro du 20 décembre 1622, Bibl. nat., ms. ital. 1779, p. 62. Anne d'Autriche, elle, était allée au devant du roi, con passione di affetto.

[124] Richelieu, Mém., éd. Michaud, t. I. p. 281. Ce fut toute une histoire à laquelle se trouvèrent mêlés Puisieux et sa femme.

[125] Journal d'Arnauld d'Andilly de 1623, 30 avril, Bibl. de l'Arsenal, ms. 5181, fol. 47 v° : dépêche de Pesaro du 12 mai 1623. Bibl. nat., ms. ital. 1780, p. 245. On rétablissait ainsi, paraît-il, un ancien usage.

[126] Lettre de M. de Bréval au duc de Lorraine, Bibl. nat., nouv. acq. fr. 3143, fol. 388 v°. Buckingham passa à Paris le 8 mars 1623 (dépêche du nonce Corsini, Arch. nat., L. 397, fol. 381 v° : il accompagnait le prince d'Angleterre. Pour le portrait du duc, voir : Visite du cardinal F. Barberini à Louis XIII, dans Bull. de la Soc. de l'hist. de Paris, 1875, p. 175 : Nous vîmes ce duc traverser la cour, etc.

[127] Dépêches de Pesaro des 3, 10 et 21 juillet 1623 (Bibl. nat., ms. ital. 1780, p. 319, 336, 301) ; du marquis de Mirabel à Juan de Ciriça du 24 juillet (Arch. nat., K. 1479, n° 67).

[128] Dépêches de Corsini des 27 et 30 octobre 1623, dans Zeller, Richelieu et les ministres, p. 229 ; Journal d'Arnauld d'Andilly de 1623, Bibl. de l'Arsenal, ms. 5181, fol. 57 v°.

[129] Lettre de Marie de Médicis à Anne d'Autriche datée de Loches, 23 février 1619, Bibl. nat., Cinq Cents Colbert 97, fol. 14 r° et v°. En juillet 1618, Marsillac, secrétaire d'Anne d'Autriche, avait été mis en prison en raison de ses intelligences avec Marie de Médicis (dép. de Contarini du 14 juillet 1618, Bibl. nat., ms. ital. 1772, p. 143).

[130] Lettre à Richelieu du 25 septembre 1619, Arch. des Aff. Étrang., France 773 fol. 122 r° ; lettres du nonce des 23 août et 13 septembre 1619 (Bentivoglio, Lettere, t. III, p. 430, 513).

[131] Dépêches de Contarini des 3 et 27 octobre 1620, Bibl. nat., ms. ital. 1775, p. 9, 61 ; lettre de Marillac à Richelieu du 24 août 1621, Arch. des Aff. Étrang., France 775, fol. 58 r°. On invoquait dans la discussion les précédents du temps de Catherine de Médicis.

[132] Cette affaire agita vivement toute la cour : Cf. les dépêches du nonce Corsini du 22 mars (Arch. nat., L. 397, fol. 330 r°) ; de Pesaro du 15 mars (Bibl. nat., ms. ital. 1778, p. 51) ; de l'envoyé florentin du 12 mars 1622 (dans Zeller, Richelieu et les ministres, p. 305) ; le Journal d'Arnauld d'Andilly de 1622 (Bibl. de l'Arsenal, ms. 5181, fol. 3 v°) ; Richelieu, Mém., éd. Michaud, t. I, p. 259.

[133] Saint-Simon, Parallèle des trois premiers rois Bourbons, Paris, 1880, in-8°, p. 20. Cependant, au dire de Richelieu, en 1623, par exemple, Louis XIII venant se plaindre d'Anne d'Autriche à Marie de Médicis et, avec un visage tout interdit, lui conter ses douleurs, Marie de Médicis cherchait à excuser sa belle-fille, parlait à Anne, lui donnait des conseils, et tâchait de rapprocher le ménage (Richelieu, Mém., éd. Michaud, t. I, p. 273). Les relations d'Anne d'Autriche avec les sœurs de Louis XIII, à en juger par les lettres qu'elle leur écrit, sont correctes (Bibl. nat., ms. fr. 3818, fol. 18 r° et suiv.).