PRÊTRES, SOLDATS ET JUGES SOUS RICHELIEU

 

LE CLERGÉ CATHOLIQUE.

CHAPITRE I. — RECRUTEMENT DU CLERGÉ ET NOMINATION AUX BÉNÉFICES.

 

 

Absence de séminaires. — Ignorance d'une partie du bas clergé. — Effets du concile de Trente. — Saint Vincent de Paul et le mouvement religieux. — Bénéfices à la nomination du Pape, du toi, des évêques ; des chapitres et autres patrons ecclésiastiques ; les seigneurs et patrons laïques. — Pays d'obédience et pays réduits. — Transmission de bénéfices : Induits, résignations, pensions réservées. — Moyens de conserver la jouissance de ces biens. — Feuille des bénéfices. — Concours aux cures des paroisses.

 

L'Église, depuis le commencement de l'ère chrétienne, a subi, accepté, conquis ou obtenu des puissances, bien des systèmes de vie commune. Persécutée, protégée, dominante, intolérante, souple ou roide, enrichie ou spoliée, exigeante ou modeste, amicale ou hostile, jamais indifférente ; elle s'est trouvée successivement, par rapport aux pouvoirs civils, à la force matérielle, dans les situations les plus diverses. Trois phases résument son histoire dans notre pays : persécution, domination, union ; chacune d'elles a duré plusieurs siècles. Une quatrième vient de commencer, la séparation, c'est-à-dire l'indépendance.

L'Église avait conquis le monde et le monde à son tour l'avait conquise. Il la rejette aujourd'hui et en la repoussant il la fait libre. D'ailleurs si depuis cent ans, par le Concordat de 1801, l'Église et l'État demeuraient mariés, c'était, en fait, sous le régime de la séparation de corps.

Au temps où le catholicisme d'État florissait, les hommes avaient adossé des baraques foraines au roc donné pour fondement à l'Église. Les révolutions ont emporté ces baraques ; la superstructure fragile de la religion temporelle s'est écroulée. Mais, en désincrustant l'édifice des appentis de bois et de boue qui s'appuyaient sur lui, les démolisseurs, qui pensaient l'ébranler, l'ont fait apparaître dans la force et la nudité superbe de ses lignes éternelles et l'on s'aperçut que leurs marteaux, en offensant ses murs, en avaient seulement gratté la mousse et effacé la vétusté.

Le clergé, puissant dans le chaos barbare, plus puissant encore dans l'organisation féodale, en face de ces centaines de souverains émiettés et dispersés, perd de plus en plus de terrain à mesure que le pouvoir laïque se concentre et s'affermit. Protectrice jadis, l'Église sera désormais protégée ; mais tout protecteur est ou devient un maître. Au temps de sa domination, le spirituel avait empiété sur le temporel, à force ouverte ou dissimulée ; l'État respecta celle de ces invasions qui ne le gênaient pas, consacra même celles qui lui étaient utiles, — il y en avait plusieurs, — et repoussa les autres. Puis à son tour il envahit le spirituel : chaque pas fait par la royauté dans la voie de l'absolutisme, correspond pour le clergé à l'aliénation de quelque morceau nouveau de sa liberté. Chaque privilège qu'on lui concédait, devait être payé par l'abandon de quelque droit. Le plus criant de ces abandons forcés, ce fut la nomination aux évêchés et aux dignités éminentes de l'Église française, accordé au Roi par le concordat de 1515. Ce concordat abolit les antiques élections capitulaires, et permit ainsi que les biens ecclésiastiques, au lieu d'être une force pour la religion, devinssent pour la conscience chrétienne une occasion de scandale.

A l'avènement de Richelieu, la politique religieuse de la monarchie, inaugurée depuis plusieurs siècles, avait déjà porté ses fruits. Par suite des incursions réciproques de chacun des deux pouvoirs, clerc et laïque, sur le domaine de l'autre, il s'était formé un enchevêtrement singulier dans la justice et l'administration, d'où résultaient des relations très spéciales, des attributions très confuses, entre les ministres de la terre et ceux du ciel. Cardinal et chef d'État, Richelieu unissait en sa personne une double qualité ; comme chef d'État, il était absolu ; comme cardinal, il était tolérant. Nous considérons ce destructeur du parti protestant, ce réformateur parfois violent des ordres monastiques, comme un des fondateurs de la liberté de conscience dans notre pays. On en verra plus d'une preuve. Tyrannique en fait d'administration, Richelieu était libéral en matière de doctrines ; mais, dans le culte, la doctrine et l'administration sont intimement liées ; l'État avait peine à s'occuper de l'une sans se mêler de l'autre, il était destiné ou à se désintéresser de toutes deux, ou à s'emparer de toutes deux ; ce fut ce qui arriva. Le gouvernement, curé du dehors, bras séculier, comme on disait au moyen âge, finit, sous Louis XIV, par tenir des conciles, et par s'ingérer judiciairement dans la chaire et le confessionnal.

Au temps de Louis XIII, un clergé nombreux se trouve en face de biens ecclésiastiques considérables, et par un étrange abus, ces biens n'appartiennent que pour partie à ce clergé, et pour une infime partie à ceux des membres du clergé qui remplissent les fonctions cléricales ; dans cette ruche sainte, ce sont les frelons qui mangent presque tout. Si bien que l'Église, être de raison, est riche, et que les prêtres sont en majorité pauvres. Les cahiers des États de 1614 demandent que nul ne puisse être promu à la prêtrise sans assignation de titre de 60 livres, au moins, de rente ou revenu par chaque année. Le difficile cependant n'était pas d'être ordonné prêtre. Dès qu'un jeune homme savait assez de latin pour expliquer us évangile et entendre le bréviaire, on le jugeait capable d'être élevé au sacerdoce. On trouvait des prêtres qui baptisaient sans faire aucune onction, bénissaient des mariages sans en avoir les pouvoirs, ne savaient même pas la formule de l'absolution, et se permettaient de transposer, de changer, d'abréger à leur gré les paroles sacramentelles. Dans bien des paroisses, plus de sermons, pas de catéchismes ; le peuple, privé d'instruction, ignore parfois jusqu'à l'existence de Dieu. A Paris même, M. Olier trouva, dans le quartier Saint-Sulpice, un autel élevé à Belzébuth ; des prêtres s'y livraient aux superstitions des sorciers.

Malgré les prescriptions du concile de Trente et les ordonnances royales, il n'existait en France, vers l'an 1620, aucune école où l'on préparât à la réception des saints ordres. A peine quelques essais fort imparfaits à Bordeaux et Mâcon. Chose bizarre, c'est le Tiers État qui 'avait demandé aux derniers États Généraux que, dans le délai de deux ans, tout évêque fût tenu d'établir un séminaire, en prélevant, s'il le fallait, une contribution sur les bénéfices d'un revenu supérieur à 600 livres. Richelieu développa la même idée en un projet de règlement (1625), qui contenait une exhortation dans ce sens, et demeura sans effet. Quelques tentatives se produisirent : à Troyes, le chapitre cherche à s'entendre avec l'évêque pour dresser un séminaire. Des arrêts du parlement de Toulouse enjoignent aux évêques de Nîmes et Uzès d'en pourvoir leurs diocèses dans les trois mois, pour former des sujets capables, à peine de saisie de leur temporel.

Au concile provincial de Tours, en 1583, les prélats avaient décidé que des séminaires seraient établis partout sous trois ans ; et cinquante ans après, il n'y en avait encore nulle part ; à Tours notamment, il n'y en eut un qu'en 1662.

Mais tandis que l'État et l'Église d'État se bornent l'un à de vaines prescriptions, l'autre à des encouragements stériles, Dieu suscite une pléiade de ces hommes apostoliques dont le zèle et la piété n'ont pas eu besoin d'être décrétés par le conseil royal, ni allumés par le don d'une riche prélature.

Bourdoise n'est pas encore prêtre, que déjà il commence à Paris, avec dix associés (1620), la petite cléricature, où l'on mène en commun une vie pauvre et régulière. L'archevêque autorise son œuvre et le Roi la reconnaît sans lui apporter de concours effectif. Ce ne fut qu'en 1644 que cette maison de Saint-Nicolas du Chardonnet devint le séminaire officiel de la capitale. Encore le diocèse de Paris n'était-il pas propriétaire du local ; on ne songea à l'acheter que cinq ans après la mort de Bourdoise. Saint Vincent de Paul, au même temps (1635), fonde dans le collège des Bons-Enfants, qu'il doit à la munificence d'un grand seigneur, la congrégation de la Mission pour évangéliser aussi bien les prêtres que les fidèles. L'apôtre de la charité trace à ses disciples leur conduite future : Quiconque veut être admis en cette congrégation, leur dit. il, doit se persuader qu'il est venu pour souffrir et travailler, non pour vivre en délices et en oisiveté. Déjà Bérulle avait réuni trente jeunes gens qu'il préparait par des conférences, des retraites, des études suivies, à devenir de dignes ministres du sanctuaire. Olier jetait à Vaugirard (1641) les bases d'une autre congrégation qui tira son nom de la paroisse Saint-Sulpice dont lui-même est demeuré la gloire.

Oratoriens, Sulpiciens, Prêtres de la Mission vont partout porter le solide enseignement théologique et surtout le feu d'une dévotion avide de prosélytes. Les envoyés de Monsieur Vincent rencontrèrent plus de faveur peut-être que les autres. L'esprit méthodique et très prudent de leur chef rendit leur succès plus assuré ; tandis que l'extension trop rapide de l'Oratoire l'empêcha de s'établir solidement nulle part. Mais tous réunis faciliteront le bon recrutement du clergé.

Seulement, outre le pouvoir spirituel, il fallait au prêtre un bénéfice. Le caractère sacerdotal ne donnait pas à lui seul des moyens d'existence. Cinq autorités diverses disposaient des revenus du clergé : le Pape, le Roi, les évêques, les chapitres et autres dignitaires religieux, les seigneurs de fief et autres patrons laïques. Chacune de ces autorités disputait constamment  aux autres ses prérogatives. A chaque vacance, les cours de justice regorgeaient de procès entre les pourvus du Saint-Siège et les mandatés de l'ordinaire. Depuis le XVIe siècle, les ambassadeurs royaux protestaient contre les abus qui se commettaient de la part du Pape, contre les préventions par lesquelles la plus grande partie des bénéfices revenaient à des gens ignorants et indignes, qui en étaient dotés à Rome, où l'on n'examinait rien que la bourse, — dove non si esamina niente che la borsa. — Depuis le concile de Constance (1414), le Pape nommait eux bénéfices vacants pendant huit mois, et les évêques pendant quatre mois seulement. La proportion fut retournée par le concordat de 1515 ; les évêques eurent les deux tiers de l'année, le Saint-Siège un mois seulement par trimestre ; l'ancien usage subsista en Provence, en Bretagne, et dans les Trois-Évêchés, réunis à la couronne depuis la conclusion du concordat, et où il ne fut pas mis en vigueur. Ceux-ci étaient pays d'obédience, par opposition aux autres, nommés pays réduits. Les évêques étaient donc plus ou moins puissants, selon les diocèses ; en Lorraine, par exemple, ils étaient réputés simples vicaires du Pape, et n'avaient d'autre juridiction que celle qu'ils lui empruntaient.

Nos relations avec le Souverain Pontife étaient monopolisées, au point de vue du temporel, par les banquiers expéditionnaires en cour de Rome. Ils envoyaient les suppliques au Saint-Siège, facilitaient la transmission amiable d'une abbaye ou d'un canonicat, faisaient aboutir les démissions conditionnelles que l'on donnait par-devant notaire. Pour les bénéfices dépendants de la nomination du Roi ou des tiers, ils se chargeaient d'obtenir les bulles au meilleur compte, et savaient marchander avec la Componenda et les bureaux du cardinal dataire. Gros personnages, propriétaires de leur charge, comme des agents de change ou des avoués, mais opérant à tarif variable. Couturier, l'un d'eux, amasse plus de 1.200.000 livres ; c'était le plus grand arabe du monde, mais quoiqu'il prit plus que les autres, beaucoup de gens allaient à lui, parce qu'il était habile et en réputation.

L'effort constant d'une famille tendait à ne pas laisser échapper un bénéfice, une fois qu'elle le possédait. Il existait dans ce but des procédures multiples : permutations frauduleuses, prises de possession lorsque le résignant était proche de la mort servaient à frustrer les indultaires munis des grâces expectatives, c'est-à-dire de promesses de succession. Une autre fraude consistait à laisser au résignant des pensions qui égalaient ou dépassaient le revenu ; c'était échanger le bénéfice contre une rente viagère. Par procurations antidatées, par révocations secrètes, on arrivait du reste à rendre les titres des biens d'Église tellement incertains, entre le résignant et le résignataire, qu'ils ne pouvaient vaquer par la mort de l'un ni de l'autre. Les tiers ripostaient en s'interposant par d'autres combinaisons : ils se faisaient nommer coadjuteurs de l'abbé, du chanoine ou du curé qu'ils voulaient remplacer. La sœur du marquis d'Huxelles sollicite l'abbaye de Sainte-Menehould, en reçoit le brevet, mais craint que l'abbesse vivante ne la résigne à une autre ; Bouthillier, le secrétaire d'État, a beau lui dire que cette résignation serait nulle et non avenue, elle se croit plus assurée en obtenant la coadjutorerie,

Quoi de plus singulier que ces Indults, concédés au Parlement, dont le chancelier Séguier trafiquait, et qui permettaient à plus de trois cents conseillers de disposer pour eux-mêmes de bénéfices ecclésiastiques.

L'envoi des placets dans la Ville Éternelle était l'objet de procédés ingénieux. Le banquier offre au plus riche de ses clients de le faire expédier à l'avantage : lorsqu'il n'était plus qu'à quelques journées de Rome, le courrier ordinaire faisait porter le paquet privilégié par un postillon qui le devançait d'un jour, et gagnait ainsi de vitesse lès concurrents, dont les lettres demeuraient dans la valise. Avec ces vingt-quatre heures d'avance et un ami dévoué, on enlevait l'affaire. Toutefois, si le revenu avait quelque valeur, ce n'était plus au Pape, que, depuis le concordat, il fallait s'adresser, mais au Roi. Urbain VIII voulant procurer quelque chose d'avantageux à un Français, écrit au nonce Mazarin de s'en occuper à Paris, sachant bien, ajoute-t-il, qu'il ne nous vient plus rien de France ici, dont nous puissions gratifier les personnes de mérite.

Aussi le Roi est-il assailli de pétitions de tout genre. M. d'Oppède, premier président de Provence, dont un fils a été tenu au baptême par Louis XIII, apprend que l'archevêché d'Arles est vacant, et écrit aussitôt à Richelieu, afin d'obtenir sur cet archevêché une pension pour entretenir ce petit au collège. L'archevêque de Tours, au moment de la mort du grand prieur de Vendôme, se lamente sur ce qu'on a disposé de toutes les vacances, advenues en la personne de feu M. le grand prieur de France ; la moindre petite miette m'eût un peu soulagé... ; on m'a ôté les deux misérables mille francs que j'avais pour mon plat de premier aumônier. L'évêque du Mans (Lavardin) sollicite à genoux de traiter de la trésorerie de la Sainte-Chapelle, dont l'abbé du Dorat veut se défaire. Sans cesse on lit des lettres, signées par les plus grands personnages, et toutes conçues dans les mêmes termes : Un tel, qui a tel prieuré, est en extrémité de maladie, je vous supplie... ; ou, je me vois forcé, par la nécessité de notre maison, de vous importuner si souvent pour un de mes frères ; je viens d'avoir présentement avis que M. des Yveteaux est mort, ce qui m'oblige à recourir à votre autorité, pour obtenir du Roi les abbayes qu'il possédait... J'ai mon neveu sur les bras..., j'ai mon fils aîné à pourvoir... ; vingt mains se tendent, vingt plumes se mettent à noircir le papier, cent personnes se remuent pour atteindre le bénéfice vacant.

Comment faire pour ne point sacrifier le service de Dieu à des intérêts politiques ? Un saint ne saurait en sortir tout à fait à son avantage. On comprend pourquoi l'assemblée du clergé de 1608 parle du droit des élections qui lui a été ravi, et ne parait pas, après un siècle environ, en être encore consolée. Si, aux États Généraux de 1614, le tiers seul persiste à réclamer l'élection canonique des évêques, et la réélection des abbesses après trois ans d'exercice, le clergé demande la création d'un conseil supérieur destiné à éclairer le Roi, et à le guider dans l'exercice de la plus périlleuse de ses prérogatives. Le prince, pour des abbayes ou des canonicats, consulte parfois l'évêque diocésain. Mais ce sont là des phrases de politesse qui n'engagent et ne lient en rien le souverain. Louis XIV fit de son confesseur une espèce de ministre des cultes, en lui remettant (1670) cette fameuse feuille des bénéfices, qui créa tant d'ennemis à la Compagnie de Jésus. Richelieu n'aurait pas souffert que Louis XIII déléguât une portion aussi intéressante de son pouvoir : N'ayez point l'ambition, disait-il au contraire au confesseur du Roi, de disposer des évêchés ou des abbayes, étant chose qui doit dépendre immédiatement de Sa Majesté. Au Père Caussin, il reproche amèrement d'avoir voulu, en entrant en charge, avoir pleine connaissance des bénéfices, contre ce qui avait été pratiqué par ses prédécesseurs.

Dans son Testament politique, Richelieu déclare qu'il faudrait ne choisir que ceux qui auront passé un temps considérable à enseigner dans les séminaires, n'étant pas raisonnable que le plus difficile métier du monde s'entreprenne sans l'avoir appris. Voilà une belle phrase, mais qui n'empêche pas son auteur d'avoir, pendant son ministère, toléré, provoqué même des choix indignes. On peut dire que le souverain était bien moins difficile pour la nomination des évêques que pour celle des généraux, par exemple, et qu'il se souciait bien plus de savoir qui mènerait ses sujets à l'ennemi que de savoir qui les conduirait au ciel.

Notre cardinal, qui trouvait que le Roi était assez capable de choisir seul les titulaires du haut clergé, exhortait les archevêques et évêques à faire examiner les prétendants aux cures, par une commission de quatre ou cinq ecclésiastiques, les plus capables du diocèse ; il conseillait aux autres la voie du concours, à laquelle il n'eût point trouvé bon d'astreindre le pouvoir royal. Les vœux du concile de Trente, ceux de la nation française par la voie de ses mandataires, étaient d'accord pour recommander ce mode de sélection, du reste difficile à employer pour la plupart des postes. En effet, les bénéfices qui n'étaient à la nomination ni du Pape, ni du Roi, n'étaient pas tous à la nomination des évêques ; le plus petit nombre même rentrait dans cette catégorie. Des abbayes, des chapitres, des patrons laïques, tels que grands seigneurs, municipalités urbaines, sont en possession de choisir des curés, vicaires et chapelains.

Richelieu lui-même fait remarquer que c'était là une déviation de l'usage de la primitive Église, où les diacres et les prêtres étaient désignés par le peuple. Il conseille de laisser subsister ces patronages, bien qu'ils soient fort dangereux, mais parce qu'ils ont été établis, à titre onéreux, par les fondateurs. Seulement, par suite de cette dispersion de la responsabilité, des vicieux, pour s'introduire dans les cures, s'en font pourvoir in forma gratiosa, sur des attestations de vie et mœurs qu'ils tiennent souvent par surprise.

Un prélat écrit à une dame, propriétaire d'un fief, pour lui demander de révoquer la présentation qu'elle a faite d'un curé incapable. On devait, en tout cela, user de diplomatie. Un autre refuse d'admettre, à cause de leur ignorance, des ecclésiastiques nommés par des collateurs laïques ; mais c'est qu'alors cette ignorance passait un peu les bornes ; un des candidats ne sait que répondre, quand on lui demande ce que veut dire : Confiteor unum baptisma in remissionem peccatorum.