MICHEL LE TELLIER ET LOUVOIS

 

APPENDICES.

 

 

APPENDICE I

Contrat du mariage de Michel Le Tellier et d'Elisabeth Turpin

(Archives Doudeauville, carton 29, liasse 101)

 

Le contrat fut passé le 11 février 1629, par devant les notaires Jacques Charles et Guillaume Herbin. S'il n'est pas mentionné dans le répertoire de la première étude (A. N., minutier central, XVIII), il l'est dans celui de la seconde (A. N., minutier central, LI) mais il est absent de la liasse contenant les actes passés de janvier à mars 1629. Dans cette liasse, on trouve seulement à la date du 12 février, jour du mariage, une quittance des deux époux reconnaissant que Jean Turpin s'est acquitté des obligations indiquées dans le contrat et de nouveau énumérées. — Une copie du contrat, collationnée par les notaires Simonnet et Gallois, se trouvait parmi les papiers de Le Tellier et l'analyse en est donnée dans l'inventaire effectué après le décès du chancelier : A. N., minutier central, LXXV, 5 novembre 1685 et sq., p. 5-6. — Le document conservé aux archives Doudeauville est la minute, signée des notaires.

 

Par devant les notaires garde-notes du roi, notre Sire, en son Châtelet de Paris, soussignés, furent présents Monsieur maitre Michel Le Tellier, sieur de Chaville, conseiller du roi en son grand conseil, demeurant à Paris, rue Haute-feuille, paroisse Saint-André des Arts, pour lui et en son nom, d'une part, et messire Jean Turpin[1], sieur de Vauvredon et de Lifermeau, conseiller du roi en ses conseils d'état et privé, demeurant aussi à Paris, rue des Juifs[2], paroisse Saint-Gervais, tant en son nom que comme stipulant en cette partie pour damoiselle Isabelle Turpin, sa fille et de feue dame Marie Chapelier[3], jadis sa femme, ladite damoiselle à ce présente et de son consentement, d'autre part.

Lesquels, en la présence et par l'avis et savoir, de la part dudit sieur Le Tellier, de noble homme Jean Baptiste Colbert, sieur de Saint-Pouenges[4], conseiller du roi et correcteur en sa chambre des comptes, beau-frère à cause de damoiselle Claude Le Tellier, sa femme, Monsieur maître Charles Le Tellier[5], conseiller du roi et maître-ordinaire en sa chambre des comptes, oncle paternel, Louis Chauvelin[6], écuyer, seigneur de Grisenoir, oncle, noble homme Louis Compaing[7], conseiller et secrétaire du roi, maison et couronne de France, grand oncle maternel à cause de damoiselle Catherine Chauvelin, sa femme, noble homme maître Toussaint Chauvelin[8], avocat en parlement, grand oncle maternel, et noble homme maître Le Tellier, grand oncle paternel[9].

Et, de la part de ladite damoiselle Turpin, messire Etienne d'Aligre[10], seigneur de La Rivière, conseiller du roi en ses conseils d'état et privé, cousin germain, messire Louis d'Aligre[11], aussi conseiller du roi en ses conseils, seigneur de Chauvillier, damoiselle Suzanne Chapelier[12] veuve de noble homme Jean Savary, tante, noble homme Savary, conseiller et secrétaire du roi, cousin germain, André Le Sellier, aussi conseiller et secrétaire du roi, cousin germain, tous parents maternels : — Charles Longuet, écuyer, sieur de Machaut, cousin germain du côté paternel, damoiselle François Baudet[13], veuve de feu noble Jacques Goury, vivant sieur du Majurier, conseiller du roi et auditeur en sa chambre des comptes, cousine germaine dudit côté paternel, noble homme Habert[14], trésorier et payeur de la gendarmerie de France, et noble homme Le Regrattier, conseiller du roi et trésorier des Cent Suisses de la garde du corps de Sa Majesté, amis.

Volontairement ont reconnu et confessent avoir fait les traités et accords de mariage, promesses et conventions qui en suivent. C'est à savoir :

Que ledit sieur Turpin a promis et promet bailler et donner par nom et loi de mariage ladite demoiselle Elisabeth Turpin audit sieur Le Tellier, sieur de Chaville, qui a promis aussi la prendre à sa femme et épouser, et ledit mariage faire et solenniser en faveur de notre mère Sainte Eglise le plus tôt que bonnement et commodément faire se pourra, et qu'il sera avisé et délibéré entre eux et leursdits parents et amis, si eux et notre Sainte Eglise s'y consentent et accordent.

En faveur duquel mariage ledit sieur Turpin a promis bailler et donner à ladite demoiselle sa fille la somme de 103.400 livres tournois. Savoir : somme de 40.000 livres tournois en argent comptant, 43.000 livres tous en rentes sur particuliers au denier seize, et la somme de 7.000 livres en argent ou rentes sur particuliers pour les causes et ainsi qu'il sera déduit ci-après, et la somme de 1.117 livres 3 sols 8 deniers sans garantie en rentes sur l'hôtel de ville de Paris en plusieurs parties constituées pour la somme de 13.400 livres six sols tournois. Et savoir : 420 livres sur les aides, 100 livres sur le sel, 525 livres sur les recettes générales, et 72 livres 3 sols 8 deniers sur le clergé. Lesdites rentes sur l'hôtel de ville de Paris appartenant à ladite future épouse de la succession de dame Marie Chapelier, sa mère, et de la succession aux propres[15] de dame Marie Turpin, sa sœur, religieuse. Et, pour le regard des rentes sur particuliers, ledit sieur Turpin promettra les garantir, fournir et faire valoir, tant en son principal, arrérages que rachat pendant un an. Lequel passé, si ledit sieur futur époux les veut retenir, ledit sieur Turpin demeurera déchargé de la garantie d'icelles. Sinon, sera ledit sieur père tenu de lui en fournir le prix.

Toutes lesquelles sommes, rentes sur particuliers et sur la ville, revenant ensemble à ladite somme de 103.400 livres, ledit sieur père baille et donne à ladite demoiselle, future épouse, pour tous les droits successifs, mobiliers et immobiliers qui lui peuvent appartenir à cause de la succession de ladite dame sa mère, y compris la dixième partie advenue à sadite mère de la succession aux propres/maternels de feu Monsieur Quétin, conseiller au Châtelet, et aussi la succession advenue à ladite demoiselle, future épouse, au propre de la dite Marie Turpin, religieuse, sa sœur. Ensemble, pour les intérêts et revenus de tous lesdits biens depuis la garde noble[16] finie jusques au jour dudit futur mariage, même ceux de portions de maisons et héritages qui seront délaissés audit sieur Turpin père, ainsi qu'il sera dit ci-après. Le tout jusques à la concurrence de tout ce que lesdits biens, intérêts et revenus d'iceux se montent, et le surplus en avancement de l'hoirie future dudit sieur père.

Et d'autant qu'a cause desdites successions de sadite mère et sœur, il appartient à ladite future épouse une huitième partie en la maison de la Notre Dame d'argent, sise rue des Juifs, à cause du quart d'icelle acquis par sesdits père et mère dudit sieur et dame de Monthelon par contrat du 22e mars 1617, passé par devant Guéreau et Parque, notaires, et autres actes passés en conséquence d'icelui, moyennant 4.560 livres, dont en avait été payé par lesdits sieur et dame, ses père et mère, 4.400 livres pendant leur mariage, et le surplus par ledit sieur père depuis la dissolution à la communauté d'icelui.

Comme aussi appartient à ladite demoiselle, future épouse, à cause desdites successions, une huitième partie en la maison, terre et seigneurerie de Lifermeau, à cause du quart d'icelle acquise par lesdits sieur et dame, père et mère, de Jean Acarie[17], écuyer, sieur de Porcheresses, moyennant 3.750 livres par contrat passé par devant Guinaut, notaire, le 28e décembre 1609.

Lui appartient pareillement, à cause des dites successions, une dixième partie en une maison sise au coin de la rue des Juifs du côté de l'hôtel de Lorraine, échue à ladite dame mère et de la succession aux propres maternels dudit sieur Quétin, et moitié aux neuf autres parts de ladite maison acquise' par lesdits père et mère de ladite demoiselle, future épouse, des autres cohéritiers aux propres maternels dudit sieur Quétin, moyennant 4.050 livres par contrat passé par devant Guéreau et Parque, notaires, le 21e jour d'août 1618.

Plus lui appartient la moitié en quelques petites portions d'héritages, acquises par sesdits père et mère, és environs de la terre et seigneurie de Vauvredon, moyennant 634 livres par six contrats compris en l'inventaire fait par ledit sieur père après le décès de sadite femme, et de toutes lesquelles maisons, terres et héritages les autres plus grandes portions appartiennent audit sieur père tant de ses propres que par acquisition qu'il en a fait depuis son second mariage.

A été convenu et accordé pour éviter l'incommodité des partages qu'il conviendrait faire des immeubles et pour la commodité desdits futurs époux que ledit sieur Turpin, père, retiendra lesdites portions de maisons, terres et héritages sur partie de sa portion de ladite communauté et succession aux meubles, acquêts et conquêts[18] de sadite fille religieuse, au lieu de la somme de 6.867 livres qui est le prix auquel reviennent sesdites acquisitions pour la part qui en appartient à ladite demoiselle, future épouse, pour la somme de 7.000 livres et pour la huitième de Lifermeau sera prise pour 2.000 livres et le surplus pour les autres portions desdites maisons et héritages. Laquelle somme de 7.000 livres, comme faisant partie des 103.400 livres, sera fournie par ledit sieur père, la veille des épousailles en argent comptant ou rentes sur particuliers, ainsi qu'il est dit ci-dessus.

Moyennant le paiement de laquelle somme de 7.000 livres, lesdits futurs époux ont fait et font, par ces présentes, délaissement audit sieur père desdites portions de maison, huitième de ladite seigneurie de Lifermeau et héritages sis près Vauvredon. Et s'est obligé et oblige le sieur futur époux en son propre et privé nom faire ratifier ledit délaissement à ladite future épouse, lorsqu'elle aura atteint l'âge de [sa] majorité, sans qu'au cas que ledit futur époux décède auparavant la majorité de ladite damoiselle, future épouse, sans enfants, les héritiers en soient tenus.

Seront tenus lesdits futurs époux, dedans un an d'hui, de faire partage avec ledit sieur père des biens de la ,communauté d'entre lui et sa défunte femme et succession de sadite fille religieuse, et arrêter le compte que ledit sieur père entend leur en rendre par un bref état de la tutelle, jouissance et administration des biens de ladite damoiselle, future épouse, depuis la garde noble finie jusques au jour dudit mariage. Et ce qui se trouvera, après le partage et compte-rendu, avoir été baillé de plus par ledit sieur père que ne montent lesdites successions, intérêts et revenus d'iceux, leur demeurera en avancement de l'hoirie future dudit sieur père. Et néanmoins, procédant audit partage, sera tenu ledit sieur père prendre, sur sa part des biens de ladite communauté et successions aux meubles, acquêts et conquêts de sadite fille religieuse, lesdites portions de maisons et héritages et huitième de la terre et seigneurie de Lifermeau, pour 'lesquels ladite somme de 7.000 livres aura été fournie, comme dit est, auxdits futurs époux. Auxquels aussi ne sera loisible de reprendre lesdites portions, terres. et héritages, mais seulement sera tenu ledit sieur père leur tenir compte du revenu desdits biens dans ledit compte.

En outre lesdites sommes et rentes sur particuliers et sur la ville, pour les mêmes causes, fera ledit sieur père délaissement à ladite damoiselle, future épouse, du quart de tout ce qui reste à recevoir des dettes sur particuliers et sur le roi, intérêts et dépens d'icelles, délaissés en commun entre la dame mère de ladite damoiselle, future épouse, et ses beaux-frères, comprises en un état de délaissement fait d'icelles par dame Madeleine Boulenger[19], sa mère, d'elle signé le dernier jour de janvier 1602, reconnu ledit jour et an par devant Guéreau et Parque. notaires, et autre délaissement fait en conséquence à ladite dame, mère de ladite future épouse, par devant lesdits notaires le dernier août dudit an 1602, ensemble de ce qui reste à recevoir du quatrième lot de quelques petites dettes, dont aussi avait été fait délaissement à ladite dame, mère de ladite damoiselle, future épouse, par ladite dame Boulenger, par état passé devant lesdits notaires ledit jour dernier août 1602.

Et, au regard de ce qui a été reçu des dettes comprises esdits deux états auparavant le décès de la dame mère de ladite damoiselle, future épouse, ledit sieur père en a fait déclaration par sondit inventaire, dont celle des dettes communes est signée de Monseigneur Haligre, chancelier de France, et Monsieur Savary, oncle de ladite damoiselle, future épouse, et a déclaré n'en avoir depuis reçu aucune chose. Et, pour le regard de ce qui a été reçu avant le décès de la dame, mère de ladite demoiselle, future épouse, des dettes comprises èsdits deux états demeureront compris en la somme fournie en deniers comptants ou rentes sur particuliers, donnés en mariage à ladite damoiselle, future épouse.

Comme aussi demeurera à ladite damoiselle, future épouse, ce qui peut rester à recueillir de la dixième partie en la succession des propres maternels dudit sieur Quétin, fors la dixième partie de ladite maison, sise au coin de la rue des Juifs, du côté de l'hôtel de Lorraine, 12 livres 12 sols faisant partie de sic vingt six livres quatre sols huit deniers de rente sur le sieur de Beranglise, 325 livres reçues par ledit sieur père pour la dixième d'une petite maison sise rue Jacarie[20] vendue par licitation au sieur Savary, et 109 livres reçues pour les causes portées en certain contrat passé entre les héritiers dudit sieur Quétin, qui demeureront aussi audit sieur père comme compris aux sommes et rentes baillées en mariage à ladite damoiselle, future épouse.

Demeurera aussi à ladite damoiselle, future épouse, le quart, à elle appartenant, en 306 livres de rentes et arrérages d'icelles en quatre constitutions[21] demeurées en commun entre ladite dame mère et ses beaux-frères, comme fort douteuses par partage passé le eue septembre 1602, l'une sur le sieur Laisné, la deuxième sur la dame de Contenain, les trois et quatrième par deux constitutions sur Jean Galleman.

De toutes lesquelles dettes restant à recevoir desdits deux états, rentes communes, et de ce qui reste à recueillir de la dixième partie de la succession des propres maternels dudit sieur Quétin, fors ce qui est dit ci-dessus excepté, ledit sieur père fera délaissement à ladite damoiselle, future épouse, sans aucune garantie en quelque sorte et manière que ce soit. Et seulement leur fournira lesdits états de dettes, partage et quelques pièces qu'il a des dettes restant dues et contenues au quatrième lot. Le tout compris audit inventaire et sera ledit délaissement fait à la charge que ce qui sera reçu des choses susdites par lesdits futurs époux, venant par ladite damoiselle, lutine épouse, à la succession de Bondit père, elle sera tenue d'en rapporter ce qui peut appartenir à sondit père, soit à cause de la communauté d'entre lui et sadite défunte femme ou de la succession aux meubles, acquêts et conquêts de sadite fille religieuse. Et sera permis auxdits, futurs époux de composer[22] desdites rentes, dettes et intérêts d'icelles, ainsi que pour telle somme qu'ils verront bon être. Et de la composition qu'ils en feront, le père de la future épouse ou ses héritiers s'en rapporteront à la bonne foi des futurs époux ou du survivant d'eux.

De laquelle somme de 40.000 livres, qui sera fournie en deniers comptants, en entrera la somme de 32.000 livres en la communauté. Et le surplus des deniers comptants, rentes sur particuliers et sur la ville, toutes les dettes ci-dessus délaissées à ladite damoiselle, future épouse, et intérêts d'icelles, et ce qui reste à recueillir de la succession dudit sieur Quétin, et tout ce qui écherra à ladite damoiselle, future épouse, soit meubles ou immeubles, par succession directe ou collatérale, donation ou autrement, demeurera propre à ladite damoiselle, future épouse, et aux siens de son côté et ligne.

Seront les futurs conjoints uns et communs en tous biens, meubles, acquêts et conquêts, immeubles, qui se pourront faire pendant la communauté, suivant la coutume de la prévôté et vicomté de Paris, nonobstant même que lesdits biens fussent assis en autres coutumes à ce contraires.

Mais ne seront lesdits futurs époux tenus des dettes, l'un de l'autre, faites et créées auparavant ledit futur mariage, ains s'acquitteront par celui qui les aura faites et créées, ni ladite communauté obligée auxdites dettes pour la part qui écherra à celui desdits conjoints qui n'en est point tenu.

Sera ladite demoiselle, future épouse, douée, et la doue ledit sieur futur époux, de la somme de 2.400 livres de rente de douaire préfix[23] au cas qu'il n'y ait enfants dudit mariage et, où il y en aurait lors de la dissolution d'icelui, de 2.000 livres de rente seulement, qui sera et demeurera propre auxdits enfants. Duquel douaire elle sera saisie du jour du décès dudit sieur, futur époux, sans qu'elle soit tenue en faire demande en justice.

Le survivant desdits futurs époux, advenant la dissolution dudit futur mariage, prendra, par préciput[24] des biens de la communauté, jusques à la concurrence de la somme de 6.000 livres suivant la prisée[25] de l'inventaire sans crue[26] ou ladite somme à son choix et option.

Si, pendant ledit futur mariage, sont vendus ou aliénés des propres des futurs conjoints ou rentes rachetées, seront les sommes procédant des aliénations ou rachats employées en rentes ou héritages de pareille nature et, où le remploi n'en aurait été fait lors de la dissolution de ladite communauté, seront lesdites sommes reposées sur les biens d'icelle communauté avant partage, et, où elle ne suffirait, sur les propres dudit sieur futur époux pour le regard de ladite future épouse.

Sera loisible à ladite future épouse, aux enfants qui naîtront dudit futur mariage et au père de ladite future épouse, en cas qu'elle le précède sans enfants, d'accepter ou renoncer à ladite communauté. Et, en cas de renonciation, reprendront tout ce qu'elle aura apporté audit mariage et tout ce que, pendant' icelui, lui sera échu par succession directe ou collatérale, donation au autrement, soit meubles ou immeubles, et, outre icelle future épouse, son douaire et préciput, comme dit est, le tout franchement et quiètement, sans qu'elle soit tenue d'aucunes dettes et hypothèques, encore qu'elle y eût par elle et s'y fût obligée. Et pour ledit sieur futur époux et ses héritiers seront tenus les acquitter, ses biens à ce faire obligés. Et néanmoins, en cas de renonciation par ledit sieur père de ladite future épouse à ladite communauté, ledit sieur époux retiendra, sur tous lesdits biens de ladite future épouse, jusques à la valeur de 15.000 livres tournois.

L'office[27], duquel est à présent pourvu ledit sieur futur époux, les deniers qui en proviendront, lui demeureront propres à lui et aux siens de son côté et ligne.

Comme aussi les autres biens, immeubles, appartenant audit sieur futur époux et tout ce qui lui écherra pendant ledit futur mariage lui demeureront propres lui et aux siens, de son côté et ligne.

Car ainsi le tout a été convenu, stipulé et accordé entre lesdites parties, promettant, s'obligeant chacun en droit soi, et renonçant. Fait et passé en la maison dudit sieur Turpin, ce dimanche après midi, 11e jour de février 1629. Et ont signé la minute des présentes, demeurées vers Herbin, l'un desdits notaires soussignés.

CHARLES.

HERBIN.

 

APPENDICE II

Survivance de Secrétaire d'état en faveur de M. Le Tellier fils, 14 décembre 1655.

(A. N., O1, 10, f° 98 r°-100 r° : — B. N., Collection Cangé, Vol. 68°, f° 233.)

 

Louis... A tous ceux... La récompense des services des pères envers leurs enfants est un des meilleurs moyens pour perpétuer la vertu et la fidélité dans les familles, même pour faire que celles qui sont les plus utiles au bien de l'état et au service du souverain augmentent en zèle et affection. Et considérant les fidèles et recommandables services qui ont été rendus au feu roi, de glorieuse mémoire, notre très honoré seigneur et père, que Dieu absolve, à Nous et à cet état par notre ami et féal le sieur Le Tellier, conseiller et secrétaire d'état et de nos commandements, en diverses charges et emplois dedans et dehors le royaume, notamment depuis treize années qu'il exerce la charge de secrétaire d'état avec tant d'assiduité, de vigilance, d'affection, de probité et de bonne conduite qu'il Nous en demeure une parfaite satisfaction et au public, Nous avons estimé juste d'accorder, à sa prière, à François Michel Le Tellier, son fils aîné, ladite charge de secrétaire d'état, sur la démission qu'il en a été faite en nos mains en faveur de sondit fils, à condition de survivance, ayant tout sujet de reconnaître les mérites de ses services en la personne de sondit fils et de Nous promettre, des vertueuses inclinations qui paraissent en lui, du profit que nous savons qu'il fait des bonnes instructions qu'il reçoit des soins que l'on apporte à son éducation[28], et surtout de l'exemple de son père, qu'il se rendra capable de lui succéder en ladite charge et de l'exercer lorsqu'il aura atteint l'âge convenable[29] pour cet effet.

Savoir faisons que Nous, pour ces causes et autres bonnes considérations è. ce Nous mouvant, avons à icelui François Michel Le Teiller, donné et octroyé, donnons et octroyons, par ces présentes signées de notre main, ledit état et office de secrétaire d'état et de nos commandements, que tient et exerce maintenant ledit sieur Le Tellier, son père, duquel il s'est démis en nos mains au profit de sondit fils aîné à ladite condition de survivance, pour icelui office exercer par ledit sieur Le Tellier fils lorsqu'il aura atteint l'âge de vingt-cinq ans, et icelui tenir, en jouir et user, arrivant le décès de sondit père, même en faire les fonctions et exercice de son vivant lors de son absence ou maladie, aux honneurs, autorités, pouvoirs, prérogatives, prééminences, privilèges, franchises, libertés, exemptions, gages, pensions, appointements, entretènements, droits, fruits, profits, revenus et émoluments y appartenant, tels et semblables qu'en jouit ou doit jouir ledit sieur Le Tellier, son père, tant qu'il Nous plaira, sans qu'avenant son décès ou dudit François Michel Le Tellier, son fils, ledit état et office puisse être déclaré vacant ni impétrable sur le survivant d'eux deux, auquel Nous l'avons réservé et réservons de notre grâce spéciale par ces présentes, sans qu'il lui soit besoin d'obtenir d'autres lettres de provision que cesdites présentes ni prêter d'autre serment que celui qu'en a fait ledit sieur Le Tellier père et que prêtera en nos mains ledit sieur Le Tellier fils.

En vertu d'icelles, si donnons en mandement à nos amés et féaux, conseillers en notre conseil d'état, les trésoriers de notre épargne, présents et à venir, et à chacun d'eux en l'année de son exercice, de payer, bailler et délivrer audit sieur Le Tellier père lesdits gages, pensions et entretènements, audit office appartenant, et, après son décès, audit François Michel Le Tellier, son fils, par chacun an, aux termes et en la manière accoutumée. Et, en rapportant ces présentes ou copie d'icelles, dument collationnée, pour une fois seulement, avec quittances desdits sieurs Le Tellier père et fils sur ce suffisantes, Nous voulons tout ce qui payé et délivré aura été à cette occasion être passé et alloué en la dépense de leurs comptes, déduit et rabattu de la recette d'iceux, par nos amés et féaux les gens de nos comptes à Paris, auquels nous mandons ainsi le faire sans difficulté et de faire enregistrer lesdites présentes au greffe de notredite chambre des comptes.

Car..., nonobstant toutes les révocations faites ou à faire sur le fait des survivances, auxquelles Nous voulons et entendons que, la présente ne soit aucunement comprise et l'en avons de notre certains science, pleine puissance et autorité royale, exceptée et réservée, exceptons et réservons, et auxdites révocations, ensemble à toutes ordonnances, restrictions, mandements et défenses à ce contraires, et aux dérogatoires y contenus, Nous avons, pour ce regard et sans y préjudicier en autre chose, dérogé et dérogeons par cesdites présentes.

Donné à Paris le quatorzième jour de décembre, l'an de grâce mil cent cinquante cinq et de notre règne le treizième[30].

 

APPENDICE III

Acquisition par Michel Le Tellier du marquisat de Louvois, des terres et droits en dépendant, 4 février 1656.

(Arch. Marne, E, 574)

 

Par devant les notaires garde-notes du roi, notre Sire, en son Châtelet de Paris, soussignés, fut présent en sa personne haut et puissant messire Eustache de Conflans[31], chevalier, seigneur d'Armentières, Brésy et le Buisson, châtelain de la rivière de Thibouville, marquis de Louvois, demeurant faubourg Saint-Germain des Prés lès Paris, rue de Bourbon[32], paroisse Saint-Sulpice.

Lequel, volontairement, a reconnu et confesse avoir vendu, cédé, quitté, transporté et délaisé, vend, cède, quitte, transporte et délaisse par ces prédentes, dès maintenant à toujours, et promet de garantir de tous troubles dons, douaires, dettes, hypothèques, substitutions, évictions et autres empêchements quelconques, à messire Michel Le Tellier, chevalier, seigneur de Chaville et de Villacoublay, commandeur des ordres du roi, conseiller en ses conseils, secrétaire d'état et des commandements de Sa Majesté, demeurant rue d'es Francs Bourgeois, paroisse Saint-Gervais, à ce présent et acceptant, acquéreur pour lui, ses hoirs et ayant cause,

C'est à savoir, le marquisat, terre et seigneurie de Louvois[33], fiefs et seigneuries de Tauxières, Germaine, Vertuelle-Bullon, La Neufville en Chaillois, Verzenay, Chigny, Rilly, Vauzillon, Vaudemanges, Sarbruches et partie de Ludes et Mutry, avec leurs dépendances, appartenances, circonstances et annexes, tant en fief que roture et franc-alleu[34], sis ès bailliages d'Epernay et Chatillon, coutume de Vitry le François.

Consistant ledit marquisat de Louvois en un château[35], enclos de fossés pont-levis, auquel il y a quatre, grosses tours aux quatre coins, trois corps de logis, un grand pavillon sur le pont-levis et une galerie joignant lesdites tours. Au-devant duquel château est une grande basse cour bâtie de neuf, à l'entrée  de laquelle il y a aussi pont-levis et trois pavillons sur l'entrée d'icelle, avec deux grands rangs d'écurie, bergerie, vacherie et autres commodités. Une autre basse-cour, à côté de la susdite, en laquelle il y a un grand' colombier avec grange et écurie, cinq arpents[36] ou environ de terre en sainfoin, et garenne à côté et derrière ledit château.

Duquel marquisat dépendent deux paroisses, savoir celle dudit Louvois et celle de Tauxières, avec deux hameaux, appelés Vertuelle-Bullon et la Neufville en Chaillois de la paroisse dudit Louvois.

Item, une grande cense[37] sise audit Louvois, appelée la ferme de la vicomté, ayant droit de vicomte, et une petite cense sans bâtiment avec les terres qui en dépendent.

Item, deux pressoirs dans ledit lieu.

Item, un moulin à eau, appelé de haut, et la cinquième partie au moulin de bas, acquis au seigneur par confiscation.

Item, douze arpents de terre labourable, joignant ledit château.

Item, trois arpents de vignes en plusieurs pièces, plusieurs autres terres labourables à censés.

Item, les cens et rentes, tant muables que autres, en deniers, grains et volailles.

Item, les offices de bailli, prévôt, gruyer[38], lieutenant, notaire, tabellion[39], sergent[40], présentement établis audit marquisat de Louvois et autres terres ci-après déclarées : même le greffe dudit marquisat avec les défaults[41] et amendes, et tous droits de justice, avec pouvoir de création d'offices de bailli, prévôt, gruyer, lieutenant, notaire et tabellion, avec droit de scel pour l'exercice d'icelle justice.

Item, la seigneurie de Vertuelle, paroisse de Louvois, dépendant dudit marquisat, consistant en cens, rentes, lods, ventes[42], à la même redevance et payable ainsi qu'audit Louvois. Ensemble un droit de corvée, dû par les villages de Louvois, Tauxières et Vertuelle, avec un autre droit d'aller abattre et enlever du bois dans ceux de l'archevêché de Reims, autant que chacun  harnais de ces trois villages en peuvent apporter le lendemain de la Pentecôte.

Item, la moitié par indivis de la seigneurie du hameau de La Neufville en Chaillois, paroisse dudit Louvois, consistant en cens et rentes, l'autre moitié appartenant à l'abbé de Chartrenne.

Item, la seigneurie du village de Tauxières, consistant en une cense sans bâtiments, avec vingt arpents, tant terre que pré, et quelques terres acensées, les tuileries sises audit lieu, les cens et rentes, muables tant en argent, grains que volailles.

Item, un moulin à eau, maintenant en ruines, aliéné de l'abbaye de Sainte-Cornille.

Item, la sixième partie en la seigneurie du village et paroisse de Ludes, aussi annexée audit marquisat, avec deux fermes et terres en dépendant et droits seigneuriaux, deux septiers[43] de vignes ou environ au même lieu.

Item, le droit de vicomté aux villages de Rilly et Vauzillon, Chigny et Verzenay, avec un moulin à vent, sis audit Rillv.

Item, au village de Vaudemanges et le petit Billy, un droit appelé de sauvement[44] et part en la seigneurie, consistant en rentes, en avoine et argent.

Item, ès villages d'Isse et Ambonnay, un droit consistant en rentes, en avoine et argent.

Item, la seigneurie de Cherville et mairie d'Athis, aliéné de l'abbaye de Saint-Basle, consistant en terres labourables, cens et rentes, et pour le retrait de laquelle il y a procès pendant au grand conseil, qui est indécis, Pour raison de quoi ledit seigneur vendeur ne sera tenu d'aucune garantie envers ledit seigneur acquéreur, auquel il cède et transporte tout et tel droit, noms et actions, demandes et prétentions, qui lui appartiennent pour ce regard depuis le jour du partage ci-après daté, se réservant ledit seigneur vendeur les fruits desdites terres, échus auparavant ledit partage et qui lui appartiennent en commun avec ses cohéritiers en la succession de défunt M. de Comblizy[45], et ce, en cas que, par l'arrêt qui interviendra sur l'instance pendante audit grand conseil, ils soient adjugés.

Item, une ferme en franc-alleu, sise au village de Tours-sur-Marne, consistant en maison, terres labourables et prés.

Item, 64 fauchées[46] de pré ou environ en plusieurs pièces, sises ès prairies d'Ay, Plivot, Bisseuil, Mareuil et Tours-sur-Marne.

Item, la ferme de Montorgueil, avec 80 arpents de terre en dépendant.

Item, la ferme de Grandpré, avec cent arpents de terre. Lesdites deux fermes et terres faisant partie du bâtis de Damerv.

Item, le quart par indivis du fief de Mutry, consistant la totalité d'icelui en droits seigneuriaux, droits de tuilerie, un ...?... de cinq boisseaux d'avoine, une ferme sise audit Mutry, consistant en bâtiments et terres labourables avec 48 arpents et 27 verges[47] de bois en cinq pièces. Ledit quart dudit fief de Mutry et dépendances, mouvant et relevant du seigneur d'Oger près Vertus, et chargé envers lui des droits et devoirs féodaux accoutumés.

Item, tous les bois dépendant dudit marquisat de Louvois, savoir les bois dudit Louvois en 36 pièces, contenant 708 arpents ou environ. Item, les bois dits de La Neuville, consistant en 3 pièces, contenant 57 arpents et demi ou environ. Item, les .bois, de Tauxières en 5 pièces, contenant 108 arpents ou environ. Item, les bois de Ludes en 7 pièces, contenant 146 arpents un tiers ou environ. Item, le droit de grurie et grairie[48] appartenant audit marquisat de Louvois sur 23 pièces de bois contenant ensemble 450 arpents ou environ, où le seigneur dudit Louvois prend moitié à son choix lorsqu'il se coupe. Tout ce que dessus, mouvant et relevant du roi à cause de sa grosse tour du Louvre[49], et chargé envers Sa Majesté des droits et devoirs féodaux accoutumés, à la réserve de ladite ferme de Tours sur Marne, qui est, comme dit est, en franc alleu de 12 fauchées de pré en deux pièces, situées dans la prairie dudit Mareuil, faisant partie des 64 fauchées ci-dessus, qui relèvent dudit seigneur de Nanteuil et dudit quart en ladite seigneurie de Mutry, ferme, terres et bois en dépendant, relevant dudit seigneur d'Oger.

Item, lesdites terres et seigneuries de Germaine et Sarbruche, consistant, savoir : au village dudit Germaine, dans lequel il y a les murailles d'une vieille tour, château et forteresse, lequel château est aussi ténu et mouvant du roi à cause de sadite grosse tour du Louvre. Item, audit village il peut y avoir é. présent environ 20 feux, tant hommes que femmes veuves. Item, un moulin à eau qui est à présent en ruines et ne moud point depuis quatre ou cinq ans. — Item, 5 arpents, 87 verges et demi de terre en plusieurs pièces audit terroir. Savoir : demi-arpent lieu dit La Pierre au parisis, un arpent lieu dit Grouc, un autre arpent audit lieu, un arpent 12 verges et demi lieu dit les Roises, demi-arpent lieu dit le Champ Parisis, demi-arpent audit lieu et un quartier au même lieu. — Item le droit de haute, moyenne et basse justice audit Germaine et en tout le terroir d'icelui, pour l'exercice de laquelle il y a bailli, lieutenant, gruyer, procureur fiscal, greffier, sergent, garde bois, garde scel ès contrats et tout ce qui à un seigneur châtelain appartient. Item, huit livres dues par chacun an à ladite seigneurie par les habitants dudit Germaine pour leur usage[50]. Item, trois quartées[51] d'avoine en mesure de Louvois, dus par chacun an par chaque habitant dudit Germaine, et les veuves dudit lieu en doivent moitié seulement. Item, 29 livres 13 sols 2 deniers et six chapons de rente par chacun an pour le cens des héritages dudit Germaine, suivant la transaction faite entre les habitants dudit lieu. Item, les droits de rachats, reliefs[52], quints et requints[53], lods, ventes, saisines[54] et amendes, forfaitures[55], confiscations, aubaines[56], épaves[57] et autres droits seigneuriaux, qu'a un châtelain suivant la coutume de Vitry. Item une corvée due par chacun an par les habitants dudit Germaine, laquelle ils ne font point pour n'en avoir le seigneur vendeur aucun titre. Item une pièce de bois, sise audit terroir, contenant environ 7 arpents, que les seigneurs ont ci-devant acquise des habitants dudit Germaine, appelée les bâtis du Gouffre, tenant de toutes parts aux autres bois dudit seigneur vendeur. Item une autre pièce de bois, appelée le château de Vernay, contenant 10 arpents ou environ, tenant des deux parts et d'un bout au sieur baron du Tour, d'autre part au grand étang de Vernay appartenant ii messieurs du chapitre de Notre-Dame de Reims. Item le droit de grurie et grairie, dû par ledit chapitre de Reims sur une pièce de bois contenant 80 arpents ou environ, tenant d'une part au chemin du côté du Gouffre, d'autre part et d'un bout au bois du sieur baron du Tour, d'autre part aux terres et bois, broussailles de La Neuville en Beauvais : ledit bois appartient à ladite seigneurie pour droit de grairie, moitié toutefois et quantes qu'on le coupe. Item deux pièces de bois au terroir dudit Germaine, tenant l'une l'autre, contenant ensemble 1.873 arpents. 71 verges, ...?... le chemin, les terres de la Neuville, les bois d'Avenay, les Artillons, les bois de Chaunes, la route et bois de fontaine Villauserve et les bois du roi, d'autre part aux terres de Germaine, Vaucemont, la cense des Haies. Item la foi et hommage dus à ladite seigneurie par ledit chapitre de Notre Dame de Reims pour la terre et seigneurie d'Avrezy, consistant en haute, moyenne et basse justice et tout ce que en icelle seigneurie leur appartient, pour laquelle ils baillent homme vivant et mourant[58], qui est arrière fief au seigneur dudit Nanteuil.

Item une ferme et métairie appelée Sarbruche, consistant en maison, grange, étable, cour et accins[59], ainsi qu'il se comporte, et 80 arpents de terre ou environ, qui, anciennement, étaient baillés à cinq sols chacun arpent, lesquelles ont été depuis reprises par ledit seigneur vendeur. Item le droit de haute, moyenne et basse justice sur ladite maison, terres et étendue d'icelles, le tout mouvant et relevant de messire Louis de Rohan, chevalier, seigneur et baron de Nanteuil, à cause de son château et baronnie dudit Nanteuil, excepté la dite vieille tour, château et forteresse dudit Germaine, qui relève de sa Majesté, ainsi qu'il est dit ci-dessus, et chargé envers ledit seigneur de Nanteuil des droits et devoirs féodaux accoutumés.

Item, la seigneurie du hameau de Vaucemont, paroisse dudit Germaine, consistant en rentes muables d'avoine, poules et deniers, relevant de Sa Majesté à cause de sadite grosse tour du Louvre, et chargé des droits et devoirs féodaux accoutumés, franc e quitte de tous lesdits droits et devoirs du passé jusques à présent tant envers Sa Majesté que lesdits seigneurs.

Et généralement ledit seigneur d'Armentières vend et délaisse, comme dessus, audit seigneur Le Tellier tous et chacun les autres droits, fiefs, domaines, cens, rentes, bâtiments, terres, prés, bois, vignes et autres héritages, appartenances, dépendances et annexes dudit marquisat de Louvois, terres, seigneuries, ci-dessus déclarées, ainsi que le tout se poursuit, comporte et étend de toutes parts, même tous droits, noms, raisons[60] et actions[61], rescindants et rescisoires[62], qui peuvent compéter et appartenir audit seigneur ès dites choses vendues, sans en rien excepter, réserver ni retenir de façon quelconque, et tout ainsi que défunt messire Claude Pinard, chevalier, seigneur de Comblizy et dudit Louvois en a joui ou dû jouir, et ledit seigneur d'Armentières depuis lui. Le tout à icelui seigneur d'Armentières appartenant, à lui advenu et échu par le partage fait entre lui et ses cohéritiers en la succession dudit seigneur de Comblizy, passé par devant Bergeon et Bruneau, notaires à Paris, le 28e septembre mil six cent cinquante un.

Et encore ledit seigneur d'Armentières vend et délaisse audit seigneur Le Tellier tous les meubles, qui sont audit château de Louvois.

A été, pour la sûreté de la présente vente, fait un état, par le menu, de la contenance des bois contenus en icelle vente, tant des coupes qui ont été faites par chacune année des taillis que des bois coupés à blanc[63], esto. Lequel état a été certifié véritable par ledit seigneur d'Armentières et signé de lui et dudit seigneur acquéreur, annexé à la minute des pré !entes pour y avoir recours.

Pour, de tout ce que dessus vendu, jouir par ledit seigneur acquéreur, ses-dits hoirs et ayant cause, et en faire et disposer comme de chose lui appartenant vrai et loyal acquêt, à commencer du jour de Noël dernier passé. A été accordé que le prix de la vente, qui a été faite par ledit seigneur d'Armentières, de la coupe de la présente année des bois dudit Louvois, qui est comprise audit état ci devant mentionné sous le titre qui contient ces mots, Taillis dont on ne fait état de nulle feuille, attendu qu'il se coupe en janvier mil six cent cinquante six, montant à 87 arpents 85 verges, appartiendra entièrement audit seigneur acquéreur. Et, à cette fin, ledit seigneur vendeur promet lui mettre ès mains, dans un mois prochain, les marchés qui ont été faits avec les obligations et promesses, déclarant ledit seigneur vendeur n'avoir reçu aucune chose dudit prix. Et, s'il se trouvait qu'aucune chose en eût été reçue, il en sera fait déduction sur le prix de la présente vente.

Cette vente, cession, transport et délaissement, faits à la charge desdits droits et devoirs seigneuriaux et féodaux, d'exécuter la transaction, qui a été passée entre ledit seigneur d'Armentières et le sieur Billet, fermier du domaine dudit Louvois et dépendances, le 12 août 1653 ; passé par devant Rallu et Paysant, notaires à Paris, pour raison du bail fait dudit domaine.

Et moyennant la somme de 480.000 livres, tous francs deniers, au profit dudit seigneur d'Armentières vendeur, dont 474.000 livres pour le principal et 6.000 livres pour le pot de vin. Lesquelles 6.000 livres ledit seigneur d'Armentières confesse avoir reçu présentement comptant dudit seigneur Le Tellier en louis d'argent, le tout bon et ayant cours, présents les notaires soussignés, dont il se tient content et l'en quitte. Sur laquelle somme, de 474.000 livres, ledit seigneur d'Armentières a consenti et accordé que ledit seigneur Le Tellier paie, en son acquit et décharge, les sommes qui ensuivent. Savoir : à Monsieur le Président de Chevry[64], 60.000 livres tous pour le principal de 3.000 livres de rente et 2.691 livres 13 sols 4 deniers pour les arrérages qui en restent dus depuis le 11e mars 1655 jusques à aujourd'hui. Plus, à Monsieur Le Ragois[65], maitre des comptes, pareille somme de 60.000 livres aussi pour le principal de 3.000 livres de rentes et 2.691 livres 13 sols 4 deniers, pour ce qui en reste dû aussi jusques à cedit jour. Plus, à M. Le Ragois, curé de Saint-Sulpice, la somme de 40.000 livres pour le principal de 2.000 livres de rente, et 1.794 livres 8 sols 10 deniers pour ce qui en reste aussi dû d'arrérages jusques à ce dit jour. Plus, à M. Martineau, conseiller, la somme de 20.000 livres pour le principal de 1.000 livres de rente, et 897 livres 4 sols 5 deniers pour les arrérages restant dus jusques à cedit jour. A M. Hourselle pareille somme de 20.000 livres aussi pour le principal de 1.000 livres de rente, et 897 livres 4 sols 5 deniers pour ce qui en reste aussi dû d'arrérages jusques à cedit jour. Lesquelles cinq parties de rentes sont dues par ledit seigneur d'Armentières et ont été par lui constituées, moyennant la somme de 200.000 livres qu'il a employées aux rachats et paiements de toutes les dettes, qu'il est tenu de payer et acquitter, de celles dues par ladite succession dudit défunt, seigneur de Comblizy, son aïeul maternel, suivant ledit partage, avec subrogation, par les quittances au profit desdits sieurs créanciers, aux hypothèques acquis auxdites dettes acquittées de leurs deniers. Promettant ledit seigneur Le Tellier faire lesdits paiements incessamment et en fournir les quittances valables audit seigneur d'Armentières dans huit jours prochains.

Par icelles, il se fera subroger, pour sa plus grande sûreté de la présente acquisition, aux droits et hypothèques desdits sieurs créanciers et retiendra par ses mains les grosses desdits contrats de constitutions avec les autres pièces nécessaires à ladite subrogation et des expéditions desdites quittances. Laquelle subrogation ledit seigneur d'Armentières a consenti et accordé, par ces présentes, au profit dudit seigneur Le Tellier, qui s'est chargé des arrérages desdites cinq parties des rentes, qui écherront cedit jour auxdits paiements. Et le surplus de ladite somme de 474.000 livres, montant à 265.027 livres 15 sols 8 deniers, ledit seigneur Le Tellier promet et s'oblige le bailler et payer audit seigneur d'Armentières ou à ses créanciers, dans cette ville de Paris, dans un an prochain avec les intérêts de ladite somme, à raison du denier vingt, à compter de cedit jour et date du présent contrat. Et ce, suivant l'état que ledit seigneur d'Armentières en a signé, annexé à la minute des présentes.

Auxquels paiements ledit marquisat de Louvois, terres, seigneuries et choses vendues, demeurent spécialement et par privilège affectés, obligés et hypothéqués avec tous et chacun les autres biens meubles et immeubles quelconques, présents et à venir, dudit seigneur Le Tellier, l'une desdites obligations ne dérogeant à l'autre.

Transportant, par ledit seigneur vendeur, audit seigneur acquéreur tous droits de propriété, fonds, saisine, possession, noms, raisons, actions, hypothèques, qu'il a pu avoir sur ledit marquisat de Louvois, terres, seigneuries et choses présentement vendues. S'en dessaisissant, auxdites charges, au profit dudit seigneur acquéreur et de sesdits hoirs et ayant cause. Voulant qu'ils en soient saisis, vêtus, mis et reçus en bonne possession et saisine par qui et ainsi qu'il appartiendra. Constituant à cette fin son procureur le porteur des présentes, lui en donnant pouvoir.

Pourra ledit seigneur Le Tellier, si bon lui semble, pour purger toutes hypothèques, faire décréter[66] sur lui et à ses frais et dépens, pendant un an, de cedit jour, ledit marquisat de Louvois, terres, seigneuries et choses vendues, en telle juridiction que bon lui semblera et s'en rendre adjudicataire moyennant ladite somme de 480.000 livres, ou telle autre somme que besoin sera, sans toutefois aucune augmentation ni diminution entre lesdites parties. Et si, audit décret, il intervient des oppositions provenant du fait dudit seigneur d'Armentières et de ses auteurs, tant de la part des créanciers mentionnés en l'état ci-dessus annexé à la minute des présentes que d'autres qui pourraient intervenir, ledit seigneur sera, tenu de les dénoncer audit seigneur d'Armentières au domicile ci-après élu. Et, en cas que toutes les oppositions, qui seront formées audit décret, n'excèdent 'pas ladite somme de 265.027 livres 15 sols 8 deniers, que ledit seigneur Le Tellier doit de reste du prix de la présente vente, ensemble les intérêts qui courent d'icelle d'huy en avant, en ce cas ledit seigneur acquéreur sera obligé de consentir que lesdites oppositions soient, jusques à ladite concurrence, converties en saisies entre ses mains, et de payer, huit jours après que ledit décret lui aura été délivré, signé et scellé en bonne forme sans autres oppositions ce qui se trouvera dû à chacun desdits opposants. Et, où lesdites appositions se trouveront monter à la plus grande somme que celle qui est due pour le restant dudit prix et intérêt courant, sera tenu ledit seigneur d'Armentières de les faire incessamment lever sans que la poursuite du décret en puisse être retardée, et, en ce cas, permis audit seigneur Le Tellier de faire passer outre à l'interposition dudit décret et de consigner ce qu'il devra de reste dudit prix et ledit seigneur d'Armentières tenu de consigner ce qui sera dû aux autres opposants du par dessus du restant dudit prix, et du tout acquitter ledit seigneur Le Tellier, ensemble de tous frais et droits de consignation autres généralement quelconques au sujet desdites oppositions, parce que ledit seigneur Le Tellier ne sera tenu que des frais ordinaires d'un décret volontaire sans opposants.

Lequel décret avec le présent contrat ne vaudront ensemble que pour une seule et même acquisition.

Et, où ledit marquisat, terres, seigneuries et choses vendues seraient enchéris au par dessus de ladite somme de 480.000 livres, ledit seigneur d'Armentières promet et sera tenu de payer la surenchère à la décharge dudit seigneur Le Tellier acquéreur et le rendre adjudicataire desdits marquisat, terres, seigneuries et choses vendues pour ladite somme de 480.000 livres, à peine de tous dépens, dommages et intérêts.

Promettant aussi ledit seigneur d'Armentières de fournir et mettre ès mains dudit seigneur Le Tellier, dans quinze jours prochains, tous les titres et papiers qu'il a en set possession, concernant ledit marquisat, terres, seigneuries et choses vendues, dont sera fait inventaire. Et, dès à présent, il lui a baillé et mis ès mains une expédition dudit partage des biens de la succession dudit feu seigneur de Comblizy, devant daté.

Car, ainsi a été accordé entre lesdites parties, qui ont élu et élisent leurs domiciles irrévocables en cettedite ville de Paris, savoir : ledit seigneur d'Armentières, en la maison de M. de La Berthonnière, procurant en la cour de parlement, sise rue Pavée[67], paroisse Saint-André des Arts, et ledit seigneur Le Tellier en la maison où il est demeurant, en ladite rue des Francs-Bourgeois.

Auxquels lieux ils consentent et accordent que tous actes et exploits de justice, qui y seront faits, soient de tel effet, force et vertu que si, faits, étaient parlants à leurs propres personnes, nonobstant changement de domicile, promettant et obligeant chacun en droit soi, renonçant de part et d'autre.

Fait et passé à Paris en la maison de Gallois, l'un desdis notaires soussignés, le quatrième jour de février, après midi, l'an mil six cent cinquante six. Et ont signé la minute des présentes, demeurée vers ledit Gallois, l'un des notaires soussignés.

GUNEAU.

GALLOIS.

 

APPENDICE IV

Brevet en faveur de M. le marquis de Louvois pour expédier et signer toutes lettres patentes et closes et autres expéditions dépendantes de la charge de secrétaire d'état, dont il est pourvu en survivance, nonobstant son défaut d'âge, du 24 février 1662

(B. N :, Collection Cangé, vol. 68, f° 235, copie)

Aujourd'hui..., du mois de février 1662, le roi étant à Paris, ayant, par ses lettres patentes, en date du 14e du mois de décembre de l'année 1655 et pour les raisons y contenues, pourvu le sieur Michel François Le Tellier, marquis de Louvois, de la charge de secrétaire d'état et des commandements de Sa Majesté à la survivance de messire Michel Le Tellier, son père, avec pouvoir et faculté, audit sieur Le Tellier fils, lorsqu'il aurait atteint l'âge de 25 ans, d'exercer ladite charge de secrétaire d'état en cas d'absence ou de maladie dudit sieur Le Tellier, son père, et, Sa Majesté ayant été très humblement suppliée par ledit sieur Le Tellier d'accorder audit sieur Le Tellier son fils la permission et pouvoir d'exercer dès à présent ladite charge de secrétaire d'état, bien qu'il ne soit que dans la 22e année de son âge, Sa Majesté, mettant en considération le mérite singulier des longs et laborieux services que le sieur Le Tellier père lui a rendus et au feu roi de glorieuse mémoire pendant plusieurs années, tant en ladite charge de secrétaire d'état qu'il exerce depuis 19 années consécutives avec intégrité et suffisance à l'entière satisfaction de Sa Majesté qu'en diverses autres charges et emplois importants qui lui ont été confiés dedans et dehors le royaume. Sachant aussi que, par les soins et l'application qu'il a apportée à l'éducation dudit sieur Le Tellier et pour son instruction, il lui a donné beaucoup de connaissance des affaires concernant ladite charge de secrétaire d'état, ce qui fait espérer que suivant l'exemple de son père et continuant, comme il a fait jusques à présent, d'agir sous ses ordres, il suppléera par ce moyen au défaut de l'âge et se rendra en peu de temps capable de faire les fonctions de ladite charge et d'y servir utilement à l'avenir, Sa Majesté, pour ces considérations, a ordonné et ordonne, veut et entend que le sieur Le Tellier fils expédie et signe dès à présent toutes lettres patentes et closes et autres expéditions généralement quelconques qui sont du commandement de Sa Majesté et dépendent de la charge de secrétaire d'état et de ses commandements, tant pour ce qui concerne la justice et les finances, les affaires de l'état et celles du public et des particuliers que pour toutes autres affaires et occurrences, et qu'il exerce pleinement et entièrement ladite charge en l'absence ou maladie dudit sieur Le Tellier, son père, selon le pouvoir qui lui en est donné par les lettres de provision qui lui en ont été expédiées en survivance ledit jour 14 décembre 1655 nonobstant qu'il ne soit que dans la 22e année, Sa Majesté l'ayant relevé et dispensé et le relevant et dispensant dudit défaut d'âge et de la rigueur desdites lettres de provision par le présent brevet, lequel, pour témoignage de sa volonté, Elle a signé de sa main et fait contresigner par moi, son conseiller secrétaire d'état et de ses commandements et finances[68].

 

APPENDICE VI

Comment Le Tellier écrivait à Louis XIV.

(B. N., Collection Cangé, vol. 68, f° 210-212)

 

Paris, le 25 décembre 1672.

Je rends grâces très humbles à Votre Majesté de ce qu'il lui a plu avoir la bonté de me donner part de la levée du siège de Charleroi[69]. C'est un événement important à vos affaires présentes, infâme pour les Espagnols et qui soutiendra fort la réputation de Votre Majesté par tout le monde. J'en ai toute la joie que doit avoir celui de tous vos sujets qui est le plus obligé à Votre Majesté et qui a une plus forte passion pour sa gloire. Il vous reste, Sire, à user avantageusement de ce bon succès.

Sur quoi, me servant de la liberté qu'il plaît à Votre Majesté me donner, je prends celle de lui représenter qu'ayant vu tout ce qu'on lui écrit au sujet de la rupture avec l'Espagne, il semble que cette manière-là doit être réglée par le seul intérêt de Votre Majesté sans mélange d'aucune autre passion. Et, si Elle estime qu'il lui soit bon d'ajouter le. Espagnols au nombre de ses ennemis, je demeurerai très fortement persuadé que ce sera tout le meilleur parti que Votre Majesté aura choisi.

Mais, auparavant que Votre Majesté se déclare, il para/trait nécessaire qu'il lui plût faire agir en Angleterre, en Suède et auprès d'e ses alliés en Allemagne pour les porter à entrer dans le sens de Votre Majesté sur la dernière partie du troisième article du traité des Pyrénées[70] — lequel, n'étant pas couché fort clairement, pourra recevoir différentes interprétation —, afin de ne vous pas priver du droit que Votre Majesté a de demander la garantie de l'exécution du traité d'Aix-la-Chapelle[71] aux rois d'Angleterre et de Suède et ôter prétexte è vos alliée en Allemagne de se détacher de vos intérêts en vous imputant la rupture dudit traité.

Votre Majesté peut bien connaître que le comte de Monterey[72] n'a pas cru y contrevenir en donnant des troupes au prince d'Orange pour attaquer Charleroi, puisque Massiet[73] n'a pas chargé celles de Votre Majesté qu'il a rencontrées allant à Binche. Et ils est sans doute que l'Empereur, pour se décharger du reproche que Votre Majesté lui peut faire d'avoir pareillement contrevenu au dernier traité fait avec Elle, ne manquera pas d'inspirer aux princes d'Allemagne ce même sentiment-I& et fonder l'action de ses armes sur l'infraction faite par Votre Majesté audit traité.

Il semble aussi que Votre Majesté pourrait encore différer à prendre sa résolution jusques à ce qu'Elle ait eu réponse de M. de Villars[74], qui pourrait être différente selon ce que lui fera dire la reine d'Espagne[75]. Car, si elle avoue l'action du comte de Monterey à Charleroi et qu'elle soutienne qu'elle puisse fournir ses troupes aux Hollandais pour agir dans votre royaume, elle pourra déterminer Votre Majesté à la rupture, n'étant pas compatible que ses états soient exposés aux forces des Espagnols sous le nom des Hollandais et que cependant ceux du roi catholique n'aient rien à craindre de vos armes.

Si, au contraire, la réponse par écrit de la reine d'Espagne convenait du sens que Votre Majesté donne avec fondement audit troisième article du traité des Pyrénées, vos états demeurant par là à couvert des forces d'Espagne, Votre Majesté pourrait peut-être incliner à un autre parti.

Je sais bien que tout ce que dessus veut du temps. Mais, comme la saison ne permet pas qu'Elle en peut tirer grand avantage, Elle aura celui de trouve' les Espagnols moins préparés à la campagne prochaine, en cas qu'Elle résolve d'agir contre eux, par le repos dans lequel on les aura laissés jusqu'alors.

Je supplie très humblement Votre Majesté de recevoir tous ces faibles raisonnements comme un effet du zèle que je conserve pour tout ce qui regarde la gloire de Votre Majesté dans une grande infirmité[76], qui m'accable et qui me fait appréhender de ne plus paraître devant Votre Majesté, lui protestant qu'en quelque état qu'il plaise à Dieu me mettre, rien ne diminuera la passion que je suis obligé d'avoir pour son service.

LE TELLIER.

(Signature autographe).

 

APPENDICE VII

Comment Louvois écrivait à Louis XIV

(B. N., Collection Cangé, vol. 68, f° 206-209)

 

Ath, 23 décembre 1672.

Toutes les nouvelles que nous recevons de toutes parts confirment la levée du siège de Charleroi, et toutes les lettres qui viennent des villes espagnoles portent qu'il n'a point été attaqué et que ce qu'il y a eu de gens de tués, ça été à une sortie que Monsieur de Montai a voulu faire sur leur camp.

Monsieur le Maréchal d'Humières[77] a monté aujourd'hui à cheval avec 500 chevaux et a marché jusqu'à quatre lieues d'ici, d'où il a envoyé 50 maîtres une lieue par delà comme pour y préparer un logement pour demain pour toute l'armée. Il a trouvé é. une portée de canon de cette ville des cavaliers espagnols, qui, dès qu'ils ont vu paraître ces coureurs, ont fui à toute bride vers Mons. Et, de quart d'heure en quart d'heure, il en a rencontré qui ont pris le même chemin. Ses coureurs en ont pris 4 qui sont du régiment de Quincy, qui est en garnison à Soigny[78]. Ils ont confirmé que l'armée hollandaise n'est plus devant Charleroi et qu'elle est entre Binche[79] et Bonne-Espérance. On n'a fait aucun mal è. ces cavaliers. Mais on ne les renverra de trois ou quatre jours, afin qu'ils ne puissent point porter de nouvelles aux ennemis.

Un des partis que l'on avait envoyés pour prendre des courriers, qui vont incessamment du camp du prince d'Orange au comte de Monterey, est revenu, qui n'a pu demeurer sur le chemin par la quantité de partis espagnols et hollandais qui y croisent perpétuellement. Mais il a vu deux régiments d'infanterie italienne entrer dans Soigny, lesquels revenaient du siège de Charleroi et s'en allaient vers Bruxelles.

Comme j'en étais à cet endroit, Choisy[80], l'un des deux ingénieurs que M. de Vauban avait envoyés pour se jeter dans Charleroi, est revenu. Il rapporte que, mardi au soir, il arriva à deux lieues de Charleroi, du côté de Damrémy, où il quitta ses chevaux pour s'en aller à pied tâcher à entrer dans la place. Il arriva jusques au bord du Piéton sans aucune difficulté. Mais il se trouva garni de tant de corps de gardes qu'il remonta et il ne lui fut jamais possible de le passer. II assure que, pendant toute la nuit, il vit faire un très grand. feu de la place, particulièrement de grenades et de feux d'artifices, ce qui lui faisait juger que l'on attaquait quelqu'un des dehors. Au point du jour, il se retira dans la maison d'un paysan qu'il connaissait, à demi-heure de là. À peine y fut-il entré qu'il entendit heurter à la porte quinze ou seize Hollandais ou Espagnols. Il se sauva dans le grenier, d'où il entendit en deux ou trois heures une ample relation de ce qui se passait au siège. Les soldats se disaient les uns aux autres que c'était des diables qui étaient dans Charleroi ; qu'ils avaient déjà tué ou blessé mille hommes, et qu'assurément on ne prendrait point la place ; que les dragons du comte de Monterey avaient attaqué la première nuit et que plusieurs étaient demeurés sur la place ; que le canon de Charleroi tirait aussi fréquemment que la mousqueterie, et que, la plupart du temps, il était chargé de balles de mousquet, qui faisaient un terrible fracas ; qu'il y avait tel coup de canon qui avait tué 14 hommes. Sur le soir du même jour, mercredi, il vint des paysans avertir cet hôte que tout était perdu, que l'armée du prince d'Orange avait quitté Charleroi pour venir piller la prévôté de Binche. Ce paysan envoya de ses enfants pour savoir si cela était vrai, et ils rapportèrent 9 heures du soir que les premières troupes n'étaient qu'à un quart de lieue de là et que tout était en marche. Ce qui obligea Choisy à se sauver par les bois et marcher toute la nuit vers Le Quesnoy où il arriva hier sur le midi.

Toutes ces nouvelles sont si conformes qu'il n'y a plus moyen d'en douter, ce qui me fait dépêcher ce courrier à Votre Majesté pour l'assurer que Charleroi ne sera point pris et qu'on en sera quitte pour quelques vaches de la prévôté de Binche.

Nous ne savons point encore si le prince d'Orange la quittera bientôt et s'il voudra garder la ville, auquel cas, si Votre Majesté l'approuve, quand on apprendra que le prince sera par delà Maëstricht, les 2.000 chevaux de Lorraine auront rejoint, on pourra y marcher en 24 heures : on en chassera les troupes des Hollandais., en quelque nombre qu'elles soient, ou l'on punira l'infidélité de ces habitants, qui ont crié Vive l'Espagne, aussitôt que les Espagnols ont paru à leurs portes.

Le major de cette place est arrivé ce soir ici avec les officiers qui, par la capitulation, ont eu la liberté de s'en revenir. Ce major est un misérable, qui la tête a tourné' et qui ne méritait pas les appointements qu'il avait là S'il avait désarmé les bourgeois, il aurait assurément tenu 2 ou 3 jours et se serait fait donner une bonne capitulation pour lui et pour la garnison.

M. le maréchal d'Humières va envoyer un trompette en l'armée du prince d'Orange pour avoir des nouvelles de ce qui s'y passe. Et demain au soir on enverra un gros parti jusques au premier village où les Hollandais sont logés pour savoir ce qu'ils deviennent.

J'adresse présentement des ordres de Votre Majesté aux 2.000 chevaux que Monseigneur le prince[81] doit avoir détachés pour les faire marcher à Guise, d'où ils enverront h l'ordre de M. Du Rancher[82] au Quesnoy, auquel je mande de les faire venir dans Le Quesnoy, si, lorsqu'il apprendra leur arrivée à Guise, il croit qu'ils puissent arriver sûrement au Quesnoy. Et, lorsque j'apprendrai qu'ils y seront, je verrai à les faire venir ici d'une façon ou d'aube, afin que nous soyons en état de marcher à Binche, si Votre Majesté l'ordonne.

Votre Majesté verra, par la lettre, que je viens de recevoir de M. de Saint-Pouenges[83], ce qu'il pense de l'affaire dont il est chargé. Si elle pouvait réussir, le prince d'Orange n'aurait pas sujet de se vanter de son exploit.

(Autographe) Je mets dans le paquet de Votre Majesté une lettre pour mon père et une autre pour Carpatry[84], parce qu'il importe h votre service qu'elles passent vivement en leurs mains, c'est-à-dire la dernière, et que, dans celle pour M. Le Tellier, il y a une relation de ce qui s'est passé aux environs de Charleroi, pour parler comme les Espagnols.

DE LOUVOY.

(Signature autographe).

 

APPENDICE VIII

Testament mutuel de Monsieur et Madame les chancelier et chancelière Le Tellier, 10 juin 1683.

(A. N., Minutier central, LXXV, 28 novembre 1698)

 

Les documents relatifs aux dernières volontés de Michel Le Tellier et d'Elisabeth Turpin sont au nombre de quatre. Le testament du 10 juin 1683 est en deux exemplaires, renfermés dans deux enveloppes portant des cachets de cire rouge, aux armes de Le Tellier. Sur chacune d'elles, celui-ci a écrit la mention suivante : Ici dedans est enfermé notre testament mutuel et commun que nous ne voulons pas être ouvert qu'après le décès du dernier mourant de nous soussignés, Le Tellier et Turpin. Voilà pourquoi il ne faut pas rechercher cet acte à la date de la mort du chancelier (30 octobre 1685), mais à celle de la mort de la chancelière (28 novembre 1698). — Louvois étant décédé en juillet 1691, la chancelière rédigea un codicille pour régler la succession, marquer divers legs et ses dernières volontés : elle enferma cet acte dans une troisième enveloppe, sur laquelle elle écrivit dépos pour M. Chauvelin — Louis Chauvelin, conseiller d'état. Elle confia le tout à Claude Le Pelletier, désigné comme exécuteur testamentaire : de là une quatrième enveloppe, dépau pour M. Peltier. — Le dossier est complété par divers procès-verbaux rédigés par le lieutenant civil au Châtelet de Paris, Jean Le Camus.

 

Par devant les notaires garde-notes du roi, notre Sire, au Châtelet de Parie, soussignés, furent présents en leur personne Très haut et puissant seigneur Messire Michel Le Tellier, marquis de Barbezieux, chancelier çle France, et Très haute et puissante dame Elisabeth Turpin, son épouse, de lui autorisée en tant que besoin serait, demeurant à Paris, rue des Francs-Bourgeois, paroisse Saint-Gervais.

Lesquels étant, savoir ; mondit seigneur chancelier au lit, malade de corps[85], mais sain d'esprit, mémoire et entendement, ce qui est apparu auxdits notaires par ses paroles et actions, et madite dame, son Épouse, étant en bonne santé et disposition de sa personne, désirant pourvoir à l'affermissement de leur maison, et ne laisser aucune matière de procès entre leurs enfants et petits-enfants, issue de Monseigneur le duc d'Aumont, pair de France[86], et de défunte dame, Madeleine Fare Le Tellier[87] leur fille, ont fait leur testament mutuel et commun, et l'ont dicté auxdits notaires, ainsi qu'il s'ensuit.

Au nom de Dieu père, fils et Saint-Esprit,

Premièrement, lesdits seigneur et dame testateurs donnent et lèguent à Illustrissime et Révérendissime Seigneur, Monsieur Charles Maurice Le Tellier[88], leur second fils, archevêque duc de Reims, premier pair de France, outre et par dessus ce qui est porté par le contrat de donation entre vifs, qu'ils lui ont fait le XVIIe juillet mil six cent soixante huit, passé par devant Gallois et son confrère notaires, qui a été insinué le XXIIIe desdits mois et an, la terre et seigneurie de la Ferté-Gaucher[89], avec ses appartenances et dépendances, acquise par lesdits seigneur et dame testateurs, de Monsieur le marquis de Montglat[90] par contrat du deux août mil six cent soixante un, passé devant ledit Gallois et son confrère notaires. Plus la terre et seigneurie de Largnière, acquise par sentence de décret des requêtes du Palais du trois septembre Mil six cent soixante quatre, et toutes les autres acquisitions que lesdits seigneur et dame ont faites, depuis et jusqu'à présent, proche ladite Ferté-Gaucher. Plus la terre et seigneurie de Beaulieu et Pécy, et toutes ses appartenances et dépendances, acquis de Monsieur Adrien Le Roy, chevalier, seigneur de Buxières, par contrat du XXVIIe octobre mil six cent soixante quinze passé devant ledit Gallois et son confrère. Plus la maison que ledit archevêque de Reims occupe à présent en ladite rue des Francs-Bourgeois et ses dépendances, que lesdits seigneur et dame testateurs ont acquise de Monsieur de Coulanges[91], maître des requêtes, par contrat du ..........[92], et une petite maison, qui leur appartient, sise proche le pont de Ille Notre-Dame, et le tiers de la vaisselle d'argent et des meubles meublant, qui appartiendront eux-dits seigneur et dame testateurs au jour du décès du survivant et dernier mourant d'eux.

Et, à l'égard de mesdames leurs petites filles, filles dudit seigneur duc d'Aumont et de ladite dame Madeleine Fare Le Tellier, mariées, savoir ; Darne Marie Elisabeth d'Aumont[93] à Monsieur de Beringhem[94], premier écuyer de Sa Majesté, et Dame Anne Charlotte Fare d'Aumont[95] à Monsieur le marquis de Créqui[96], à chacune desquelles lesdits seigneur et dame testateurs ont donné, par les contrats de leurs., mariages, trois cent cinquante mille livres, dont a été payé trois cent mille livres, et les autres cinquante mille livres restant dues, que lesdits seigneurs et dame testateurs veulent leur être payses suivant lesdits contrats. Et encore ils donnent et lèguent à chacune desdites dames de Beringhem et de Créqui la somme de cinquante mille livres pour leur être et demeurer propre à' chacune d'elles et aux siens de son côté et ligne, et leur être payée après le décès du survivant et dernier mourant desdits seigneur et dame testateurs.

Au moyen desquelles donations et legs ci-dessus, les parts et portions desdites dames ès successions de ladite dame leur mère et du sieur leur frère[97], décédé depuis ladite dame, demeurent et appartiennent ès successions desdits seigneur et dame testateurs, avec ce qui revient auxdites dames des fruits et revenus desdits droits échus depuis la garde-noble finie[98] par le second mariage dudit seigneur duc d'Aumont15 jusques aux jours de leurs mariages, après la déduction de la dépense de leur entretien. Et, s'il arrivait que lesdites dames ou l'une d'elles prétendissent contester le présent testament, ce que lesdits seigneur et dame testateurs ne croient pas qu'elles fassent puisqu'elles y trouvent un notable avantage, en ce cas lesdits seigneur et dame révoquent ledit legs de cinquante mille livres, qui demeurera nul comme non fait pour celle qui contestera.

Et, à l'égard de messire Louis d'Aumont de Villequier[99], fils aîné dudit seigneur duc d'Aumont et de ladite dame Madeleine Fare Le Tellier, jadis son épouse, reçu en survivance en la charge de premier gentilhomme de la chambre du roi, lesdits seigneur et dame testateurs lui donnent et lèguent, au lieu de ce qui lui revient et appartient ès successions de ladite dame, sa mère, et dudit sieur son frère, décédé depuis ladite dame, et les fruits et revenus desdits droits échus depuis la garde noble finie par le second mariage dudit seigneur duc d'Aumont[100], son père, et jusques au jour du décès du survivant et dernier mourant desdits seigneur et dame testateurs, après la déduction de son entretien, la somme die quatre cent mille livres en deniers comptants, qui seront payés par le seigneur légataire universel, ci-après nommé[101], après le décès dudit survivant et dernier mourant desdits seigneur et dame testateurs. Savoir, deux cent mille livres pour les acquits de pareille somme accordée à Monsieur de Chapes[102], frère consanguin du sieur de Villequier, lorsque ledit sieur de Villequier entrera en possession et jouissance de ladite charge de premier gentilhomme de la chambre de Sa Majesté, de laquelle il est pourvu à la survivance dudit seigneur duc d'Aumont, son père.

A condition de payer lesdits deux cent mille livres audit sieur de Chapes, à quoi lesdits seigneur et dame testateurs se sont obligés en leur nom solidairement par acte du XIXe mars mil six cent quatre vingt un à la décharge dudit sieur de Villequier : sans quoi, ledit seigneur duc d'Aumont, son père, n'aurait point donné sa résignation à condition de survivance. Et d'employer les autres deux cent mille livres au paiement des dettes dont les biens de feu Monsieur le maréchal d'Aumont[103], son aïeul, se trouveront avoir été légitimement chargés, avant la substitution d'iceux faite à son profit par ledit seigneur maréchal d'Aumont. Desquels quatre cent mille livres ledit seigneur légataire universel en paiera l'intérêt audit sieur de Villequier, à raison du denier vingt-cinq[104], jusques à ce que lesdits quatre cent mille livres puissent être employés, ainsi qu'il est ci-dessus exprimé, à compter du décès du survivant et dernier mourant desdits seigneur et dame testateurs.

Et, au cas où lesdites lettres[105] se puissent acquitter à moins que desdits deux cent mille livres, le surplus desdits deux cent mille livres sera employé au profit dudit sieur de Villequier, par l'avis dudit seigneur légataire universel et dudit archevêque de Reims, et non autrement.

Et encore ils donnent et lèguent audit sieur de Villequier le reste de dix-sept cent quarante livres dix-sept sols dix deniers, faisant en principal la somme de trente huit mille trois cent livres au denier vingt-deux[106], qui leur est due et dont ledit principal a été employé au paiement de partie desdites dettes avant ladite substitution avec subrogation d'hypothèque, ladite rente constituée à messire Claude Le Pelletier, à présent conseiller d'état ordinaire, par contrat du vingt-cinq février mille six cent soixante six passé par devant Simonnet et ledit Gallois. De laquelle ledit sieur Le Pelletier aurait, le même jour, fait déclaration au profit dudit seigneur archevêque de Reims, qui l'aurait cédée à maudit seigneur chancelier par contrat du XIIIe janvier mille six cent soixante neuf.

Et, au moyen duquel legs de ladite somme de quatre cent mille livres et de la rente de trente huit mille trois cent livres en principal, ladite part et portion dudit sieur de Villequier ès successions de ladite dame sa mare et dudit sieur son frère, décédé depuis ladite dame, demeurera et appartiendra ès successions desdits seigneur et dame testateurs, et aussi ce qui revient audit sieur de Villequier des fruits et revenus desdits droits échus depuis ladite garde-noble finie et jusques au jour du décès dudit survivant tt dernier mourant desdits seigneur et darne testateurs, déduction faite de toute sa dépense. Et, s'il arrivait contestation de la part dudit sieur de Villequier é. l'exécution du présent testament, en ce cas lesdits seigneur et dame testateurs révoquent ledit legs de ladite somme de quatre cent mille livre ; et de ladite rente de trente huit mille trois cents livres en principal, et réduisent ledit sieur de Villequier à la légitime, dans la computation de laquelle sera comprise la somme de cinq cent vingt-trois mille six cent deux livres, qu'ils ont donnée à ladite dame sa mère tant par son contrat de mariage que par les autres actes faits depuis icelui.

Pour laquelle somme ledit seigneur duc d'Aumont a laissé à sesdits enfants les terres et seigneuries de Montfaucon, à présent Villequier, de Baugy, La Forest-Grailly et La Roche-Guillebault, et encore ledit legs fait à la charge que ledit sieur de Villequier ne pourra se marier[107] que par les avis par écrit dudit seigneur duc d'Aumont son père, dudit seigneur légataire universel et dudit seigneur archevêque de Reims. Et, en cas de contravention, qu'il sera réduit à sadite légitime, comme il est dit ci-dessus.

Laquelle somme de quatre cent mille livres et ladite rente, ainsi donnes et léguées audit sieur de Villequier, lui sera et demeurera propre et aux siens de son côté et ligne maternelle, sans que les héritiers des meubles et des acquêts y puissent succéder. Et, au moyen desdits dons et legs ci-dessus, totalité des terres et seigneuries de Montfaucon, appelé Villequier, Baugy, La Forest-Grailly et La Roche-Guillebault, délaissées par ledit seigneur duc d'Aumont à sesdits enfants, demeureront et appartiendront aux successions desdits seigneur et dame testateurs, et aussi tout ce qui se trouvera lors être dû des fruits et revenus provenant des successions de ladite dame mère et du sieur frère décédé, lesdits seigneur et dame testateurs l'entendant ainsi et faisant lesdits legs à cette condition, après toutefois que la déduction aura été faite de leur dépense.

Et, pour le surplus et résidu de tous et chacun les biens meubles et immeubles, acquêts, conquête et propres droits et actions généralement quelconques, qui se trouveront appartenir auxdits seigneur et dame testateurs, sans aucune exception, en quelque lieu qu'ils soient situés et assis, lesdits seigneur et dame testateurs les donnent, lèguent et laissent à Haut et puissant seigneur messire François Michel Le Tellier, leur fils aîné, chevalier, marquis de Louvois et de Courtanvault[108], conseiller du roi en tous ses conseils, secrétaire d'état et des commandements de Sa Majesté, commandeur et chevalier de ses ordres, pour lui être et demeurer propre et aux siens de son côté et ligne, et, s'il décède avant lesdits seigneur et dame testateurs, à ses enfants, à la charge d'acquitter les legs ci-dessus, de satisfaire audit testament, et de payer et acquitter aussi les dettes et charges de leurs successions, et pour en jouir du jour du décès du survivant et dernier mourant desdits seigneur et dame testateurs.

Ce fut ainsi fait, dicté et nommé par lesdits seigneur et dame testateurs : et, à eux, par l'un desdits notaires, l'autre présent, relu en l'hôtel desdits seigneur et dame dans une chambre basse ayant vue sur le jardin, où ledit chancelier est au lit malade, en ladite rue des Francs-Bourgeois, à Paris, l'an mille six cent quatre vingt trois, le dixième jour de juin, sur les huit à neuf heures du matin.

Et ont signé le présent testament double.

LE TELLIER.

E. TURPIN.

CAILLET.

GALLOIS.

 

 



[1] Turpin (Jean) : v. chapitre XIV, famille.

[2] La rue des Juifs allait des rues Coquerel et des Rosiers à celle du roi de Sicile : elle est aujourd'hui une partie de la rue Ferdinand Duval. Il habitait là une maison appartenant à sa première femme. Cette maison de Notre-Dame d'argent formait l'angle des rues des Juifs et du roi de Sicile. L'hôtel de Lorraine, dont il est question ci-après, était compris entre la rue Pavée à l'est et la rue des Juifs à l'ouest. — V. Atlas des anciens plans de Paris.

[3] De son mariage avec Marie Boulenger, Jacques Chapelier, marchand d'étoffes à Paris, eut trois filles : Marie qui épousa Jean Turpin, — Elisabeth, femme d'Etienne I d'Aligre, chancelier de France, — et Suzanne, mariée à Jean Savary, marchand et bourgeois de Paris, devenu secrétaire du roi. Chacune d'elles eut une dot de cent mille écus.

[4] Jean Baptiste Colbert de Saint-Pouenges : il avait épousé en 1628 la sœur aînée de Le Tellier, Claude v. chapitre XIV, famille.

[5] Charles Le Tellier, mort en 1635 : v. le même chapitre.

[6] Louis Chauvelin, mort en 1654, époux d'Anne Robert et frère de Claude Chauvelin, mère de Le Tellier.

[7] Louis Compaing, conseiller et secrétaire du roi, époux d'une autre Claude Chauvelin : Catherine Chauvelin, femme de Gilles de Saint-Yon, avocat au parlement de Paris. Oncle et tante de Claude Chauvelin, mère de Le Tellier.

[8] Toussaint Chauvelin, avocat au parlement de Paris, frère de Catherine.

[9] On ne sait lequel choisir entre les cinq frères du grand-père de Michel Le Tellier, Nicolas, Guillaume, Jérôme, Charles, Etienne.

[10] Etienne II d'Aligre, 1592-1677, fils d'Etienne I, chancelier de France et d'Elisabeth Chapelier : de 1672 à 1677, garde des sceaux, puis chancelier : aura pour successeur son cousin, Michel Le Tellier.

[11] Louis, dit le marquis d'Aligre, 1617-12 août 1654, fils du précédent.

[12] Suzanne Chapelier et Jean Savary, v. la troisième note de cet appendice : le Savary qui suit doit être leur fils.

[13] Françoise Baudet, veuve de Jacques Goury : parmi ses subordonnés au secrétariat de la guerre, Le Tellier cite un Goury, son cousin.

[14] Peut-être Jean Habert, trésorier général des guerres en 1600 et trésorier de l'épargne, mort en 1639. Habert et Le Regrattier étaient en relations d'affaires avec Jean Turpin, par exemple pour la construction du pont Marie et des maisons bâties sur ce pont.

[15] Ferrière, II, 450 : les propres sont des immeubles qui nous sont échus par succession en ligne directe ou collatérale ou par donation en ligne directe.

[16] Garde noble, droit appartenant à une personne noble de jouir des biens d'un mineur jusqu'à ce qu'il eût atteint vingt ans, à condition de le nourrir, de l'élever et de l'entretenir. Très long article dans Ferrière, I, 572.

[17] Ce ne peut être l'époux de la célèbre Madame Acarie, introductrice des Carmélites en France, puisqu'il était maître des comptes, et que cc titre aurait été mentionné dans le contrat.

[18] D'après Ferrière, I, 386, les conquêts sont les immeubles acquis par le mari et la femme pendant leur communauté.

[19] Madeleine Boulenger, femme de Jacques Chapelier, mère d'Elisabeth et de Marie Chapelier.

[20] La rue Jacarie ou Zacharie était comprise entre la rue Saint-Séverin et le quai Saint-Michel : c'est aujourd'hui la rue Xavier Privas.

[21] La constitution de rente est une garantie, par un acte authentique, une rente, une dotation à une personne : Ferrière, I, 397.

[22] La composition est un accord, un traité par lequel on fait à quelqu'un grâce ou remise de quelque chose : Ferrière, I, 353.

[23] Sur ces mots, v. Ferrière, I, 550-551 : Le douaire préfix et conventionnel est celui qui provient de la convention des parties et qui se doit prendre sur la part qui doit appartenir au mari dans les biens de la communauté.

[24] Faculté pour le survivant de prélever, avant tout partage, une certaine somme sur les biens meubles de la communauté : Ferrière, II, 378.

[25] La prisée est l'estimation des choses, faite soit p.ar autorité de justice, soit par des experts et gens à ce connaissant : Ferrière, II, 423.

[26] La crue est l'augmentation du prix de chaque chose estimée. Elle est variable : à Paris, le quart en sus ; ailleurs, le cinquième denier ; Ferrière, I, 455.

[27] Celui de conseiller au grand conseil.

[28] V. chap. I, éducation de Louvois.

[29] L'âge convenable est fixé, quelques lignes plus bas, à 25 ans.

[30] V. append. IV, le texte du brevet du 24 février 1662.

[31] Eustache III de Conflans, né en 1620, mort en 1690.

[32] Cette rue s'appelait rue du Petit Bourbon : elle porte aujourd'hui le nom de rue de Bourbon-le-Château et, très courte, est comprise entre les rues de l'Echaudé et de Buci (6e arrondissement).

[33] Pour les noms de lieux, insérés dans le contrat d'achat, v. les cartes du département de la Marne et les cartes routières pour les automobilistes, p. ex. Tarride.

[34] Ferrière, I, 700 : franc alleu est un héritage exempt de tous droits seigneuriaux et qui ne reconnaît aucun seigneur.

[35] Il ne reste plus rien du château, sauf quelques communs.

[36] L'arpent est une mesure variable : arpent d'ordonnance, 51,07 centiares, — arpent commun, 42,21, — arpent de Paris, 34,19 : v. Ferrière, I, 121.

[37] Le mot cense peut signifier : 1° une ferme ou une métairie dans certaines régions de la France ; 2° une terre donnée à condition de payer le cens v. Ferrière, I, 28.

[38] Ferrière, I, 750 : le gruyer est aun officier subalterne qui juge en premier ressort les délits qui se commettent dans les bois et ne peut pas condamner à une amende supérieure à 12 livres.

[39] Le tabellion garde les minutes notariales et en délivre les expéditions : Ferrière, Il, 749.

[40] Le sergent est un officier de justice, qui procède à des significations, à des ajournements, à des arrestations, de telle sorte, dit Ferrière, II, 681, qu'il est le serviteur du juge.

[41] Le défaut est un acte qui se donne en justice au demandeur de la contumace du défendeur défaillant et Ferrière, I, 466, distingue trois sortes de défauts.

[42] Droits payés au seigneur direct, duquel relève un héritage tenu en censive, par l'acquéreur d'icelui à titre de vente : 12e partie du prix de la vente ou 1 sol 8 deniers pour livre : Ferrière, II, 178.

[43] Mesure de capacité, de valeur variable suivant les pays : contient environ 150 litres.

[44] Droit payé en blé et vin pour l'entretien, par le seigneur, des murailles du bourg, la sûreté des habitants et la conservation de leurs biens en cas de guerre ou de quelque autre accident : Ferrière, II, 642.

[45] Comblizy (Claude II Pinart, vicomte de), marquis de Cramaille et de Louvois, gouverneur de Château-Thierry, fils d'un secrétaire d'état sous Charles IX et Henri III.

[46] Fauchées, c'est-à-dire ce qu'un faucheur peut couper de foin dans un jour ou sans changer de faulx.

[47] La verge est une mesure agraire, valant le quart de l'arpent.

[48] Grairie ou grurie v. Ferrière, I, 750.

[49] V. chapitre XIV.

[50] L'usage est le droit français non écrit, qui, par une longue habitude, s'est acquis la force et l'autorité de la loi : Ferrière, II, 813. P. ex., en fait de forêts, les tenanciers, moyennant redevance, ont le droit de couper du bois, de mener paître leurs troupeaux dans les bois du seigneur.

[51] Godefroy dit : mesure de terre. Du Cange, Glossarium, 1845, V, 545, précise : mensura frumentaria, de capacité variable : il donne des exemples aux mots quarta, quartallus, quartellus, quarteria, quarterium, quarterius, etc.

[52] Rachats et reliefs, droit dû au seigneur pour les mutations qui arrivent de la part du vassal en certains cas : revenu du fief pendant une année ou paiement d'une somme une fois offerte : Ferrière, II, 484.

[53] Quint, cinquième denier du prix d'une vente requint, cinquième denier du quint denier : Ferrière, II, 478-479.

[54] Saisine, droit dû au seigneur pour la mise en possession d'un héritage, qui relève de lui : Ferrière, II, 640.

[55] Forfaitures, prévarication commise par un officier public dans l'exercice de ses fonctions et entraînant sa destitution : Ferrière, I, 692.

[56] Ferrière, I, 568, droit de succéder aux étrangers, qui décèdent dans ce royaume sans enfants qui y soient nés en légitime mariage.

[57] Le mot épaves signifie, dit Ferrière, I, 624, toutes choses nobiliaires, vivantes ou inanimées, qui ont été égarées ou dispersées ; non réclamées dans le temps prescrit, elles appartiennent au roi ou au seigneur haut justicier, dans la justice duquel elles ont été trouvées.

[58] Homme vivant et mourant est, dit Ferrière, I, 771, un homme baillé au seigneur par les gens de main morte pour lui tenir lieu de vassal.

[59] Les accins et préclôtures sont les environs et prochaines clôtures de quelque lieu seigneurial : v. les exemples dans Ferrière, I, 20.

[60] Raison, droit de poursuivre une chose en justice : Ferrière, II, 485.

[61] Action, droit de poursuivre en jugement ce qui nous est dû ou ce qui nous appartient : Ferrière, I, 35.

[62] La rescision est l'annulation d'un contrat, prononcée par des juges, qui doivent être autorisés par des lettres de la chancellerie : Ferrière, II, 579-580.

[63] Peut-être les bois coupés cette année et restés encore sur le terrain.

[64] Charles François Duret de Chevry, 1614-1700, président à la chambre des comptes de 1637 à 1699.

[65] Probablement Bénigne Le Ragois de Bretonvilliers († 15 janvier 1700), qui fut aussi président à la même chambre.

[66] Le décret d'adjudication est le jugement qui autorise la vente, qui se fait en justice, au plus offrant et dernier enchérisseur, d'un héritage saisi réellement : Ferrière, I, 462.

[67] Cette rue s'appelait alors rue Pavée d'Andouilles, et allait du quai des Grands Augustins à la rue Saint-André des Arts : c'est aujourd'hui la rue Séguier.

[68] V. appendice II, le texte des lettres de provision, pour la survivance, du 14 décembre 1655.

[69] Charleroi avait été brusquement assiégé par Guillaume d'Orange grâce à l'énergique défense de Montai et aux mesures prises par Louvois, accouru aux Pays-Bas, les Hollandais durent se retirer. V. chap. V.

[70] Pour le troisième article de la paix des Pyrénées, V. Vast, Les grands Traités du règne de Louis XIV, I, 96-97.

[71] Pour le traité d'Aix-la-Chapelle, V. Vast, Les grands Traités du règne de Louis XIV, II, 19, article VII.

[72] Gouverneur des Pays-Bas espagnols.

[73] Probablement le colonel Massiette, qui commandera la place de Lewe dans les Pays-Bas.

[74] Villars (Pierre, marquis de), 1623-1690, ambassadeur de France à Madrid, père du maréchal.

[75] Marie-Anne d'Autriche, 1634-1696, veuve de Philippe IV, mère de Charles II.

[76] Le 22 décembre 1672, Le Tellier a eu é. Louvres une attaque d'apoplexie (V. chapitre V) et est retourné à Paris, d'où il écrit sa lettre trois jours après.

[77] Humières, maréchal depuis 1668 ; un des trois insubordonnés contre Turenne au début de la campagne contre la Hollande : a fait rapidement sa soumission gouverneur de Lille.

[78] Soignies, aux Pays-Bas, non loin de Mons.

[79] Binche dans le Hainaut, à l'est de Mons.

[80] Thomas de Choisy, 1632-1710 : un des meilleurs aides de Vauban, avec qui il a fortifié Charleroi et fortifiera Sarrelouis : ses services remarqués lui valurent d'atteindre le grade de lieutenant-général en 1704. Cousin du mémorialiste abbé de Choisy.

[81] Condé.

[82] Gouverneur du Quesnoy.

[83] Gilbert de Saint-Pouenges, premier commis, cousin de Louvois.

[84] Commis resté avec Le Tellier en France.

[85] Sur la maladie de Le Tellier, v. chap. XIV.

[86] Louis Marie Victor, marquis de Villequier, duc d'Aumont, 1632-1704 : épouse en 1660 Madeleine Fare Le Tellier.

[87] Sur Madeleine Fare, v. chap. XIV, famille.

[88] Sur Charles Maurice, v. id., famille et fortune.

[89] Sur toutes les terres, qui sont énumérées dans le testament, v. id., fortune.

[90] François de Paule de Clermont, marquis de Monglat, maître de la garde-robe du roi, auteur des mémoires bien connus.

[91] Philippe Emmanuel de Coulanges, 1633-1716 : épouse Marie Angélique Dugué, 1641-1723, nièce de Le Tellier.

[92] Contrat du 8 avril 1662 : A. N., minutier central, LXXV.

[93] Marie Madeleine Elisabeth Fare d'Aumont, 1662-1728, fille aînée, marquise de Beringhem.

[94] Jacques Louis Ier, marquis de Beringhem, †1723, appelé Monsieur le Premier.

[95] Anne Charlotte Fare d'Aumont, 1665-1724, fille cadette, marquise de Créqui : sa liaison avec son oncle l'archevêque de Reims, dont elle fut l'héritière, fit scandale.

[96] François Joseph, marquis de Créqui, †1702.

[97] Le fils mort après la mère est le troisième enfant de Madeleine Fare : il mourut en 1669, un an après elle.

[98] Sur la garde-noble, v. Ferrière, I, 572.

[99] La seconde duchesse d'Aumont fut Françoise Marie Angélique de La Motte-Houdancourt, 1651-1711.

[100] Louis d'Aumont de Villequier, 19 juillet 1667-6 avril 1723.

[101] Le légataire universel est Claude Le Pelletier.

[102] Louis François d'Aumont, marquis de Chapes, duc d'Humières, etc., 30 mars 1671-6 novembre 1751 : fils du second mariage.

[103] Antoine d'Aumont, 1601-1669 : gouverneur du Boulonnais, maréchal en 1651.

[104] Denier vingt-cinq, c'est-à-dire 4 %.

[105] Il convient de lire dettes et non lettres.

[106] Denier vingt-deux, c'est-à-dire 4,54 %.

[107] Les testateurs se rappellent les difficultés survenues à l'occasion du mariage de Madeleine Le Tellier avec Tilladet : v. chap. XIV, famille.

[108] Louvois meurt en juillet 1691. Les enfants vivants en 1698, à la mort de la chancelière, et devenus héritiers, sont Courtanvault (†1721), Souvré (†1725), Barbezieux (†1701), abbé Camille de Louvois (†1718), Charlotte Madeleine de La Roche-Guyon (†1735) et Marguerite de Villeroi (†1711).